Le Maroc poursuit sa mobilisation pour faire face à une directive européenne qui risque de bloquer les transferts des Marocains résidant à l’étranger (MRE). «C’est un sujet que nous prenons très à cœur, car il pèse à la fois sur la balance des paiements et sur les dépôts bancaires, dont les dépôts de MRE représentent autour de 20%. C’est un dossier qui mérite d’être suivi de très près», a indiqué Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib (BAM), à l’issue de la première réunion trimestrielle de son conseil au titre de l’année 2025, tenue le mardi 18 mars.
«Nous ne sommes pas contents de la manière dont cette directive a été rédigée. C’est pratiquement comme si on voulait que ces flux financiers restent en Europe. Par conséquent, nous examinons toutes les solutions, y compris les solutions numériques, pour contourner les difficultés que cette réglementation causera à cette fonction que les banques marocaines assurent auprès des MRE», ajoute-t-il.
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Cette directive, élaborée par la direction générale de la stabilité financière, des services financiers et de l’union des marchés des capitaux (FISMA), relevant de la Commission européenne, a été adoptée par le Parlement européen et publiée au journal officiel le 19 juin 2024, et devrait entrer en vigueur le premier janvier 2026.
Le texte vise certes en priorité à bloquer l’activité des banques britanniques dans l’espace communautaire, après la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (Brexit), avait expliqué le patron de la banque centrale lors d’une précédente réunion. Toutefois, son objet étant la présence de toutes les banques étrangères à l’UE, elle touche directement les banques marocaines, qui disposent de filiales ou de succursales dans 7 pays européens, ainsi que de dizaines de bureaux de représentation en Europe.
Ces différentes entités opèrent dans l’intermédiation bancaire et proposent à leurs clients, notamment les MRE, divers services bancaires, comme l’ouverture et la gestion de comptes et le transfert d’argent. En principe, cette activité sera formellement interdite dès l’application de la nouvelle législation.
Et c’est l’impact de cette directive sur les flux des transferts des MRE qui inquiète le plus les autorités marocaines, puisque les banques marocaines opérant dans l’UE ont développé une proximité avec la diaspora à qui elles facilitent l’envoi de fonds au Maroc.
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Une «task force permanente» a été ainsi constituée avec la participation du régulateur, des banques concernées, du ministère des Affaires étrangères et de celui de l’Économie et des Finances. Elle a lancé des négociations avec les différentes parties prenantes dans l’UE. Il s’agit notamment de la Commission européenne et de sa direction FISMA, mais également des autorités de pays européens, principalement la France, l’Espagne, l’Italie, la Belgique et les Pays-Bas.
Cette équipe a également pris contact avec les banques centrales des pays européens pour demander des explications sur les interprétations nationales qu’aura cette directive communautaire. «Cette directive sera transposée par les États membres en droit national. Elle peut être interprétée différemment d’un pays à l’autre», a fait remarquer le wali de BAM.
Au vu de l’enjeu que représente ce dossier, le Chef du gouvernement est également impliqué. Aziz Akhannouch recevra ainsi cette «task force» afin d’étudier «la manière dont le Maroc défendra la continuation de l’activité normale des banques marocaines en Europe auprès des MRE, en s’inspirant des expériences d’autres pays», a révélé Abdellatif Jouahri.
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