La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) a tenu, ce jeudi 11 février, une conférence de presse consacrée aux priorités du patronat pour l’année 2021. La question du poids de l’informel dans l’économie nationale est inévitablement revenue dans les débats, suite au drame de Tanger qui a coûté la vie à 29 personnes dans un atelier de textile.
«La tragédie de Tanger nous rappelle le danger quotidien que représente le secteur de l’informel sur la sécurité de nos concitoyens. Pour que la relance post-covid soit saine et durable, il faut impérativement réduire le gap entre le formel et l’informel», a d’emblée souligné Chakib Alj, président de la CGEM.
«Les répercussions de l’informel sont connues de tous et s’aggraveront davantage sans la mise en place en urgence de mesures concrètes et courageuses comme la généralisation de la couverture sociale, demandée par Sa Majesté», a ajouté le patron des patrons.
Chakib Alj rappelle au passage que la CGEM n’a pas attendu ce drame pour lutter contre l’informel. Ce fléau constitue même une préoccupation majeure du patronat depuis plusieurs années, dans la mesure où l’informel représente un frein réel au développement économique.
Lire aussi : Drame de Tanger: la CGEM appelle à une task force sur le secteur informel
S’attaquer résolument à l’informel, c’est avant tout connaître l’ampleur du phénomène. En 2018, une étude diligentée par le patronat avait conclu que l’économie informelle pèse plus de 20% du PIB, avec des pointes à 50% dans le textile, 70% dans le BTP et 80% dans l’agriculture.
Aujourd’hui, ces chiffres semblent déjà obsolètes. «Je pense personnellement qu’entre 2018 et aujourd’hui, le poids de l’informel a augmenté», a affirmé Alj. Hicham Zouanat, président de la commission sociale de la CGEM, a rappelé, de son côté, que la crise sanitaire a révélé l’ampleur réelle du phénomène: 4,3 millions de ménages vivent de l’économie informelle.
Informel de subsistance vs informel organiséDans son approche pour éradiquer le phénomène, la CGEM fait la distinction entre le «petit informel» d’une part, c’est-à-dire l’informel de subsistance et, d’autre part, «le grand informel», à savoir l’informel organisé. C’est précisément ce secteur qui doit faire l’objet de toutes les attentions de la part des pouvoirs publics.
Lire aussi : Info360. Voici comment la CGEM entend combattre la politisation au sein de ses instances
Des mesures ont certes déjà été annoncées dans le cadre de la loi de Finances 2021, telles que la généralisation de la protection sociale, ou la pénalisation des fausses factures. Mais la CGEM estime qu’il faut allez plus loin et propose:
- l’éradication des rentes (identifier et supprimer les sources de rentes);
- le renforcement de l’action douanière au niveau des frontières (contrebande);
- la lutte contre la corruption (dématérialisation des échanges avec l’administration);
- l’accompagnement des unités de production informelles pour les intégrer dans l’économie formelle à travers la mise en place d’un cadre réglementaire spécifique pour ces unités (appui à l’accès au marché et renforcement des capacités).
Pour le «petit informel», outre l’élargissement de la protection sociale, la CGEM propose le déploiement de mesures favorisant l’inclusion financière. A ce titre, le patronat préconise le déploiement du paiement mobile, la refonte du statut de la micro-finance pour en faire un fort levier d’inclusion, ou encore le développement des outils de financements des TPE et des particuliers.
«Nous n’avons pas de baguette magique», a conclu à ce sujet Alj, qui a insisté sur la nécessité d’un engagement national pour intégrer «de façon assumée» l’informel de subsistance et éradiquer l’informel organisé.