Hier, ce sont plus de 15 milliards d'euros de capitalisation boursière qui sont partis en fumée à la Bourse de Francfort. Le titre du constructeur allemand a fini en baisse de 17,14% à 133,70 euros. Les autres titres automobiles et équipementiers en Europe ont aussi accusé le coup.
L'affaire révélée vendredi dernier "va avoir des conséquences financières considérables pour Volkswagen, qui ne sont pas encore calculables", estime le spécialiste automobile Ferdinand Dudenhöffer, interrogé par l'AFP. "L'image et la crédibilité de Volkswagen dans le monde entier sont maintenant entamées". L'est également la réputation d'un fleuron de l'industrie allemande, aux liens étroits avec la politique puisque l'Etat régional de Basse-Saxe en est actionnaire à hauteur de 20%.
Le gouvernement allemand a d'ailleurs ordonné la conduite immédiate de "tests approfondis sur les modèles diesel" de la marque. Le PDG du groupe Martin Winterkorn y a apporté son "entier soutien", a annoncé le ministère des Transports.
Selon les autorités américaines, 482.000 véhicules de marque Volkswagen et Audi, construits entre 2009 et 2015 et vendus aux Etats-Unis, ont été équipés d'un logiciel capable de détecter automatiquement les tests de mesure anti-pollution pour en fausser les résultats. Hors contrôles, les voitures contrevenaient aux normes environnementales. D'autres groupes pourraient être sur la sellette aux Etats-Unis. Les autorités américaines ont annoncé lundi avoir étendu leurs investigations à d'autres constructeurs pour "détecter" la présence de tels logiciels dans des voitures déjà en circulation dans le pays.
Soupçons en Europe
"C'est une affaire grave", a réagi le ministre de l'Economie et vice-chancelier Sigmar Gabriel, se disant "sûr que la société va clarifier les choses rapidement et en profondeur". Le mastodonte allemand, récemment couronné numéro un mondial des ventes devant Toyota, s'expose non seulement à des amendes pouvant atteindre 18 milliards de dollars (16 milliards d'euros), mais aussi au coût - des millions voire des milliards de dollars - du rappel de tous les véhicules concernés, et à de possibles poursuites judiciaires. Et le scandale menace de faire des petits.
Selon l'ONG qui a contribué à révéler le scandale, l'International Council on Clean Transportation, il n'est "pas exclu" que Volkswagen ait eu recours aux mêmes techniques de dissimulation en Europe, a déclaré son directeur exécutif Drew Kodjak dans un entretien à l'AFP. "Il appartient aux régulateurs du continent de déterminer s'ils sont oui ou non en présence d'un "logiciel trompeur" comme aux Etats-Unis", a-t-il déclaré.
Dorothee Saar, de l'ONG de protection de l'environnement Deutsche Umwelthilfe, estime qu'en Europe, "les constructeurs savent qu'il n'y a pas de contrôle postérieur". "Ils sont un peu plus prudents quand ils veulent exporter leurs produits dans un pays comme les Etats-Unis, où les autorités environnementales font beaucoup de vérifications", assure-t-elle.
Berlin veut procéder à des vérifications auprès de tous les constructeurs. La Corée du Sud va de son côté contrôler les niveaux d'émission de polluants de trois modèles de Volkswagen, selon l'agence Yonhap. Un porte-parole du groupe a indiqué que celui-ci cessait jusqu'à nouvel ordre de commercialiser les modèles diesel quatre cylindres de ses marques VW et Audi aux Etats-Unis. Selon l'agence allemande DPA, une partie du conseil de surveillance du groupe tiendra mercredi une réunion de crise
Le patron sur la sellette
L'affaire tombe à un bien mauvais moment pour Volkswagen. Faute de produits adaptés à ce marché friand de gros 4x4, la marque est à la peine aux Etats-Unis et la technologie diesel devait lui permettre de gagner des parts de marché. Le constructeur va devenir "un paria pour le gouvernement et peut-être aussi pour les consommateurs américains", juge Max Warburton, analyste de Bernstein.
"C'est dans l'intérêt de Volkswagen de détailler publiquement et aussi vite que possible comment il va s'y prendre pour réparer les dégâts afin de ne pas perdre ses clients pour de bon", a commenté Jessica Caldwell, du cabinet américain Edmunds.com spécialisé dans l'automobile. Martin Winterkorn, le patron de Volkswagen, a déjà fait son mea culpa dimanche mais risque son poste. Il doit théoriquement être prolongé à la tête du groupe pour deux ans, jusqu'à fin 2018, lors d'une réunion du conseil de surveillance vendredi 25 septembre.