Pékin a fini par le reconnaître la semaine dernière: les droits de douane punitifs imposés par le président américain auront un impact sur la croissance chinoise qui a déjà légèrement ralenti à 6,7% au dernier trimestre. Face à ces "incertitudes extérieures", le gouvernement chinois s'est réuni lundi autour du Premier ministre Li Keqiang pour adopter une série de mesures fiscales et financières destinées à soutenir la demande intérieure.
Un changement de pied bien accueilli par les places boursières chinoises, qui ont dévissé ces dernières semaines avec le début des hostilités commerciales: Hong Kong comme Shanghai gagnaient 1,42% mardi en début d'après-midi et Shenzhen 1,35%. Selon un communiqué diffusé lundi soir par le gouvernement, Pékin va suivre "une politique budgétaire plus active", autorisant un plus grand nombre d'entreprises à déduire de leurs impôts leurs dépenses de recherche et développement.
Le régime communiste va en outre accélérer son rythme d'émission "d'obligations spéciales" en faveur des projets d'infrastructures des collectivités locales, d'un montant total de 1.350 milliards de yuans pour cette année. Et le gouvernement "intensifiera ses efforts" pour attribuer une enveloppe de prêts de 140 milliards de yuans (17 milliards d'euros) à 150.000 petites entreprises chaque année. Quant à l'investissement privé, il sera encouragé dans des secteurs tels que les transports, les télécommunications, le pétrole et le gaz.
"Le gouvernement chinois signale clairement qu'il est prêt à défendre la croissance", observent les économistes de la banque ANZ. Mais le dilemme économique de Pékin reste entier: soutenir l'activité au péril de la dette ou bien réduire l'endettement au risque de tuer la croissance. "La charge budgétaire additionnelle de ces mesures est minimale rapportée au PIB et aux dépenses du budget 2018", relève George Zhu, de l'agence de notation Moody's. "Mais si cela devait conduire à un nouvel accroissement de la dette (...) nous y verrions un impact négatif pour le crédit" du gouvernement chinois, avertit-il.
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Conscient du danger, le pouvoir a assuré qu'il se refusait à "un déluge" de mesures de stimulation, comme il l'avait fait après la crise financière mondiale de 2008. Ces mesures avaient en effet conduit à une flambée de l'endettement. Or Pékin, mis en garde par le Fonds monétaire international (FMI), cherche désormais à combattre les risques financiers. "La politique monétaire prudente ne sera ni trop rigoureuse ni trop accommodante", a averti lundi le gouvernement, alors que la banque centrale a déjà réduit à trois reprises les ratios de réserves obligatoires des banques cette année. "Pékin a raison d'écarter un plan de relance massif pour le moment parce que cela ne pourrait qu'être financé par une nouvelle phase d'assouplissement monétaire et d'endettement", relèvent depuis Hong Kong les économistes de la banque Nomura.
Mais face à la baisse attendue de la demande extérieure (les Etats-Unis absorbent un cinquième des exportations chinoises), la croissance économique devrait continuer à ralentir, pronostiquent-ils. "La Chine pourrait se voir contrainte d'adopter des mesures de relance budgétaire de plus en plus conséquentes et d'assouplir davantage le crédit afin d'enrayer le ralentissement de la croissance et de maintenir la stabilité financière", anticipe Nomura.
Les produits chinois se heurtent depuis le début du mois à des droits de douane punitifs aux Etats-Unis, à hauteur de 34 milliards de dollars d'importations annuelles. Pékin a répliqué avec des mesures du même montant visant les exportations américaines, mais Donald Trump a menacé vendredi de frapper à terme la totalité des importations en provenance de Chine.
Le yuan, qui a perdu de son côté 8% depuis avril, restait mardi en petite forme à 6,81 pour un dollar, à ses plus bas niveaux depuis plus d'un an. La baisse de la monnaie chinoise, étroitement contrôlée par la banque centrale qui fixe chaque jour son taux pivot, est bienvenue pour les exportateurs du géant asiatique.