Les opérateurs de l’immobilier au Maroc, notamment les promoteurs et les professionnels des matériaux de construction, attendent du nouveau gouvernement qu’il mette en œuvre les réformes indispensables à la relance d’un secteur qui figure parmi les plus touchés par la crise sanitaire et les mesures de confinement.
Malgré une hausse des transactions observée au premier semestre 2021, et une progression des mises en chantier de 26% par rapport au premier semestre 2020, le secteur n’a pas encore retrouvé ses niveaux d’avant-crise, déplorent les professionnels. «Par rapport au premier semestre de 2019, les mises en chantier sont en baisse de 40%. C’est un chiffre beaucoup plus significatif qui montre à quel point l’activité est réduite», fait savoir Anis Benjelloun, vice-président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI).
Les réformes demandées pour amorcer la relance du secteur immobilier sont nombreuses. Elles vont de la révision profonde du cadre juridique régissant le secteur, jugé obsolète par les opérateurs (et tout particulièrement la loi 25-90 relative aux lotissements et groupes d’habitations, loi 66-12 relative aux infractions en matière de construction, ainsi que la loi 107-12 relative à la vente d’immeuble en l’état d’achèvement), à l’assouplissement des procédures administratives, en passant par la mise en place d’une fiscalité attractive pour les acquéreurs.
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Mais la priorité des priorités, aux yeux de la FNPI, reste le logement social. Le programme du logement social à 250.000 dirhams, lancé par l’Etat en 2010, est en effet arrivé à son terme à la fin de l’année 2020, et avec lui les nombreuses exonérations fiscales et incitations. Les promoteurs jugent nécessaire de le relancer, sous une forme ou sous une autre, pour répondre à une demande qui est toujours là mais dont le pouvoir d'achat reste limité.
«Depuis 2010 et la mise en place des logements sociaux à 250.000 dirhams, qui a été un grand succès, aucun programme digne de ce nom n’a été mis en place», fait remarquer Anis Benjelloun. «Aucune alternative n’a vu le jour depuis la fin du programme en décembre 2020, alors que la demande va se faire encore plus pressante dans les prochaines années, au vu des migrations vers les villes du littoral des populations rurales, avec le très sérieux risque du recours aux logements clandestins et aux bidonvilles», ajoute-t-il.
Les chiffres du haut-commissariat au Plan (HCP) montrent en effet que l’urbanisation au Maroc va se poursuivre au cours des prochaines décennies. La population urbaine passerait ainsi de 20,4 de personnes en 2014 à plus de 32 millions en 2050. D’ici 2030, toujours selon le HCP, le taux d’urbanisation pourrait passer de 60% actuellement à 75%.
Plutôt que d’octroyer des subventions aux promoteurs, comme c’était le cas lors du programme 2010-2020 des logements sociaux, les professionnels de l’immobilier préconisent cette fois que le gouvernement mette en place une aide étatique directe aux acquéreurs de logements sociaux.
Organiser des Assises de l’immobilierLa FNPI appelle donc à ouvrir un dialogue avec le gouvernement, le plus tôt possible, pour se mettre d’accord sur le train de réformes à entreprendre pour relancer durablement le secteur.
«Nous demandons à ce que le prochain gouvernement organise, soit une table ronde, soit des assises de l’immobilier, réunissant tous les intervenants administratifs (ministère de l’Habitat, de l’Intérieur, des Finances, la Direction générale des impôts, etc.) pour décider d’une nouvelle politique à suivre en matière d’Habitat», réclame Anis Benjelloun.
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Concernant le choix du prochain ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme du futur gouvernement que formera Aziz Akhannouch, qui succèdera à la ministre sortante Nezha Bouchareb, les professionnels espèrent qu’il sera à la hauteur des attentes.
«Nous souhaitons la nomination d'un responsable à la tête de ce département qui soit un très bon connaisseur du secteur afin d'être très vite opérationnel et réactif pour la mise en place des dispositions adaptées et attendues pour cette relance», souligne à cet égard le vice-président de la FNPI.
L’immobilier et le bâtiment sont considérés comme des activités névralgique de l'économie nationale, dont les enjeux sont à la fois économiques et sociaux. Le secteur pèse en effet pour 6,8% du PIB, pour plus d’un million d’emplois cumulés, pour 27% des recettes TVA, et pour 30% du total de l’encours des crédits bancaires... Ce n'est pas rien.