Jumia doit faire face à des accusations graves de fraude à Wall Street. «En 18 ans de publication, notre cabinet n’a jamais vu une fraude aussi évidente que Jumia», a déclaré Citron Research dans son communiqué. «Afin d’obtenir plus d’argent auprès des investisseurs, Jumia a gonflé de 20 à 30% le nombre de ses consommateurs et vendeurs actifs», appuie le cabinet. Pour donner du crédit à ces allégations, le cabinet américain affirme détenir un document confidentiel qui a été présenté par Jumia en octobre 2018 à ses investisseurs, soit 6 mois avant l'IPO. Il affirme que l'entreprise avait tenté à cette date de faire une levée privée avant de solliciter le marché américain.
Un document qui comporterait, selon le cabinet, des informations présentées par le management de Jumia aux investisseurs qui sont totalement différentes de celles fournies au niveau du formulaire F-1, délivré à la SEC (Securities and Exchange Commission, l'organisme fédéral américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers) pour l’introduction de la valeur à la Bourse de New York.
41% des commandes retournées, non livrées ou annulées
Des accusations qui ne sont pas restées sans réponses. La première réaction est venue de Citigroup Global Markets, banque d’affaires de Jumia. Dans une note de recherche publiée le 10 mai 2019, la banque a qualifié ces accusations de «manipulation», mais a recommandé également à son client de «communiquer davantage sur son activité».
De son côté le Cabinet affirme que «Lorsqu’une entreprise courtise des investisseurs avant son IPO, et quelques mois plus tard omet des faits importants et modifie ses indicateurs financiers clés pour donner l’impression que son activité est viable, c’est une fraude sur titres».
Toujours selon l’observateur, Jumia a également oublié de présenter aux autorités boursières ses 41% de commandes retournées, non livrées ou annulées. Jumia affirmait toutefois aux autorités que des commandes représentant 14,4 % du volume brut de marchandises étaient soit des livraisons échouées, soit retournées par ses consommateurs en 2018 laissant ainsi Citron Research en déduire que 30% des commandes ont été annulées la même année. Autrement dit, Jumia aurait selon le cabinet trompé le marché américain sur les ordres annulés, une manière de gonfler ses revenus et son potentiel de croissance et de génération de cash.
Résultats en hausse annoncées au premier trimestre
Avant la chute libre de 54% enregistrée le lundi 13 mai, dûe aux accusations de fraude émises le 09 mai, où l'action de Jumia est passée de 21,25 dollars à 14,50 dollars, l’action Jumia avait atteint un pic de 46,99 dollars le 1er mai (une performance de plus de 220% en moins d’un mois). Dans son rapport d’activité pour le premier trimestre de 2019, Jumia fait état de chiffres excellents, et notamment une mise en avant de l’augmentation de 58% de son volume brut de marchandises vendues par rapport au premier trimestre 2018, menant à une augmentation de 102 % de ses revenus tirés de l’activité de marketplace (plateforme de mise en relation entre clients et vendeurs). En revanche, sur la même période, les pertes du groupe ont continué d’augmenter : elles étaient de 45,8 millions de dollars en 2019, contre 34,1 millions l’année précédente.