«L'inflation n'est plus la première priorité des banques centrales, ou plus précisément de la plus puissante d'entre elles, la Réserve fédérale des Etats-Unis. L'essentiel, c'est désormais le plein emploi». C'est ce que rapporte Les Echos dans son édition du jour.
Pour le journal, il s’agit d'une révolution dans le monde de la politique monétaire. Le quotidien indique que la banque centrale américaine a annoncé deux changements majeurs dans les règles qui définissent son action. «Le FOMC, l'organe de la Fed qui pilote la politique monétaire, ne regardera plus si l'emploi est au-dessus ou en-dessous de son niveau maximal, mais seulement s'il est en-deçà de ce niveau («shortflall» et non plus «deviation») » est-il relevé.
Cela signifie qu'au lieu de cibler une inflation à 2% l'an, ce qui amène à relever les taux d'intérêt dès que ce rythme approche, «après des périodes où l'inflation a été constamment inférieure à 2%, une politique monétaire appropriée cherchera à parvenir à une inflation modérément supérieure à 2% pendant un certain temps».
Les Echos pense que c’est la première fois depuis des décennies qu'une grande banque centrale pourra ouvertement viser une inflation de plus de 2%, fut-ce pour une durée limitée. Ce qui va permettre d’inverser la contrainte «dorénavant plus forte sur l'emploi que sur l'inflation».
Les Echos assure que «la Fed s'adapte à un monde qui a changé, refermant un cycle d'un demi-siècle». A l’époque des chocs pétroliers qui avaient emballé l'inflation à partir des années 1970, la Fed cherchait d'abord à contenir la hausse des prix. Avec la déflation japonaise et la grande crise financière de 2008 qui a ravivé les craintes de déflation, la Fed et ses homologues ont été poussés à prendre des mesures non conventionnelles.
«La Fed avait lancé une revue de ses objectifs il y a deux ans, et elle a sans doute été confortée dans sa décision de changer ses objectifs suite à la profonde récession entraînée par la crainte de la Covid-19 et les confinements qui s'en sont suivis», rappelle le quotidien.
Du côté de la Banque centrale européenne, le changement devrait être difficile à appliquer les mêmes mesures que sa consœur américaine, «même si elle a à son tour entamé une réflexion sur ses objectifs». Contrairement à la loi américaine, le traité européen ne lui confie que la stabilité des prix.
Sauf que «dans un monde où les frontières se ferment, où la politique environnementale pourrait pousser les prix à la hausse, où l'élection d'un Joe Biden aux Etats-Unis pourrait déclencher une hausse des salaires et des prix, un retour de l'inflation ne saurait être totalement exclu», insiste le quotidien qui pense qu’il s'agit de «l'ultime ironie du revirement de la Fed qui se produit peut-être au moment où la mécanique des prix et de l'emploi change à nouveau».