Les entreprises familiales marocaines s’ouvrent enfin à la Bourse

Présentation de l'arrivée de Cash Plus dans la cotation de la Bourse de Casablanca.

Revue de presseLe marché boursier marocain voit un renouveau marqué par l’arrivée de géants comme SGTM et Cash Plus. Ces opérations illustrent un mouvement nouveau. Les groupes familiaux, longtemps réticents, utilisent désormais la Bourse comme levier de transmission et de croissance, annonçant une nouvelle ère pour l’économie réelle du Royaume. Cet article est une revue de presse tirée de Jeune Afrique.

Le 01/12/2025 à 19h04

Un autre géant fait sensation sur la place casablancaise. Le groupe SGTM, pilier du BTP au Maroc, prépare une introduction en Bourse ambitieuse, portant sur la cession de 20% de son capital pour 5,04 milliards de dirhams. La première cotation, prévue pour le 16 décembre, devrait faire de cette opération la deuxième plus importante jamais réalisée à la Bourse de Casablanca après Maroc Telecom, indique le magazine Jeune Afrique dans une analyse dédiée.

Dans un contexte où les IPO commencent à se multiplier, Cash Plus a récemment franchi le pas, levant 750 millions de dirhams via une combinaison d’augmentation de capital et de cession d’actions. Bien que très différentes par leur taille et leur secteur, SGTM et Cash Plus partagent un point commun: elles appartiennent à des familles qui, pendant longtemps, ont hésité à ouvrir leur capital au grand public. SGTM est détenue par la famille Kabbaj, tandis que Cash Plus relève des familles Amar et Tazi, à la tête de l’entreprise Richbond. Pour un homme d’affaires marocain cité par Jeune Afrique, cette évolution reflète «la fin d’un cycle, car la génération d’entrepreneurs aux manettes depuis plusieurs décennies a besoin de transmettre les sociétés, et la Bourse est un outil de transmission».

Cette tendance des entreprises familiales à se tourner vers le marché des capitaux constitue un phénomène relativement récent. Également citée par Jeune Afrique, une responsable de la Bourse de Casablanca rappelle qu’il fut un temps où la place financière semblait réservée aux sociétés financières ou à des émetteurs sophistiqués peu connus du grand public. «Elle ne semblait pas destinée aux entreprises qui font l’économie réelle du Maroc», souligne-t-elle, tout en saluant les efforts accomplis pour «mettre la Bourse au cœur de l’écosystème économique marocain».

Le parcours du marché boursier marocain n’a cependant pas été linéaire. La crise financière de 2008 a lourdement pesé sur son activité, une situation aggravée par la pandémie du Covid-19. En 2020, le volume des transactions n’atteignait que 57 milliards de dirhams, contre 98,7 milliards quatre ans plus tard, témoignant d’une reprise progressive mais encore fragile.

Sous la direction de Tarik Senhaji à la Bourse de Casablanca, nommé depuis à la tête de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux en octobre, la dynamique s’inverse progressivement, écrit Jeune Afrique. Plusieurs IPO emblématiques ont marqué ce renouveau: CFG Bank, souscrite près de 35 fois par plus de 23.000 investisseurs, la Compagnie marocaine de goutte à goutte et de pompage, le leader de la santé privée Akdital ou encore TGCC, concurrent de SGTM. Ces opérations ont démontré que le marché pouvait accueillir des entreprises familiales bien implantées dans l’économie réelle. L’introduction de TGCC en 2021, souscrite 22 fois par 12.000 investisseurs, reste «un vrai signal au marché».

Les succès de ces entreprises après leur IPO sont éloquents. TGCC, piloté par Mohamed Bouzoubaâ, a acquis en mai la Société des travaux agricoles marocains, tandis que CMGP a racheté 92,5% de la Compagnie de produits chimiques du Maroc. Avant eux, Mutandis s’était lancée sur le marché américain avec l’acquisition de la marque de sardines Season en 2022. Ces exemples suscitent un effet d’entraînement auprès d’autres groupes. Plusieurs fleurons, comme Dislog, Dislog Medical Devices, Buildings & Logistic Services ou Retail Holding, en discussion avec l’AMMC, prévoient leur IPO d’ici 2030. Diana Holding, après avoir travaillé avec la Société financière internationale pour renforcer sa gouvernance, ambitionne également d’entrer prochainement en Bourse. De son côté, Ynna Holding n’exclut pas une introduction via sa filiale GPC spécialisée dans l’emballage en carton ondulé, bien que rien ne soit officiel à ce stade, note Jeune Afrique.

Derrière ce mouvement, se dessine une transformation du profil de l’entrepreneur marocain, plus transparent et attentif à la transmission de son entreprise. Les fonds d’investissement jouent un rôle déterminant dans ce changement, à l’image de Mediterrania Capital Partners, qui a accompagné plusieurs groupes vers la Bourse. «Les fonds d’investissement ont vocation à se désengager de l’entreprise après l’avoir structurée et ouvrent la voie vers la Bourse», résume un entrepreneur partenaire de MCP.

Malgré cet engouement, l’objectif fixé par le Nouveau modèle de développement d’atteindre 300 entreprises cotées d’ici 2035 reste ambitieux. À l’heure actuelle, avec seulement une à deux IPO par an et 77 sociétés cotées, la Bourse de Casablanca est loin de cet horizon. Pour atteindre cet objectif, il faudrait accueillir une vingtaine de sociétés par an, alors qu’à titre de comparaison, la Bourse de Riyad a connu plus de 80 IPO en 2024.

Par La Rédaction
Le 01/12/2025 à 19h04