Le responsable franco-libano-brésilien de 62 ans cède la direction exécutive de Nissan à Hiroto Saikawa, mais reste président du Cnseil d'administration, a annoncé le constructeur jeudi. A ce poste, "je vais continuer de superviser et guider l'entreprise", a-t-il déclaré, cité dans un communiqué du groupe dont l'action a d'ailleurs peu réagi à la Bourse de Tokyo (-0,58%).
Il demeure parallèlement PDG du français Renault, dont la transformation n'est pas terminée, et dirige aussi depuis peu le Conseil d'administration de Mitsubishi Motors, qu'il a sauvé l'an dernier de la tourmente.
"Il y a un moment où il faut être réaliste sur ce qu'on fait et ce qu'on peut bien faire, c'est l'élément décisif", a expliqué Ghosn au siège de Nissan à Yokohama (banlieue de Tokyo), selon des propos rapportés par l'agence financière Bloomberg News. "Vient un temps où il faut passer le relais à quelqu'un d'autre. J'ai toujours dit que je voulais qu'un Japonais me succède et cela fait des années que je prépare Saikawa-san".
Cette petite révolution, qui sera effective le 1er avril, n'est pas vraiment une surprise. Saikawa, présent dans le groupe depuis 1977, avait déjà été promu co-PDG fin octobre, quand Mitsubishi Motors avait rejoint l'alliance Renault-Nissan. Il exercera désormais seul le poste de patron exécutif sous l'égide de son mentor.
C'est une page qui se tourne pour Carlos Ghosn, arrivé en 1999 au Japon pour redresser Nissan puis nommé PDG en 2001. Surnommé le "tueur de coûts", il a transformé un groupe au bord de la faillite en une société très rentable au chiffre d'affaires annuel de près de 100 milliards d'euros, ce qui lui vaut une certaine vénération dans l'archipel.
Même le PDG de son grand rival Toyota, Akio Toyoda, lui a rendu hommage, espérant "continuer à bénéficier de sa force pour le bien de l'industrie automobile", d'après l'agence de presse Jiji.
Bâtir une entité mondialeLes conditions sont aujourd'hui réunies pour que Ghosn s'éloigne un peu de Nissan, analyse l'un de ses proches sous couvert d'anonymat: 2017 marque l'aboutissement du plan stratégique "Power 88", son mandat de PDG arrivait à terme en juin, mais "il n'est pas homme à se reposer" et ses ambitions sont désormais de bâtir une entité mondiale avec l'apport de Mitsubishi Motors.
"Ce changement programmé va me permettre de consacrer plus de temps et d'énergie pour gérer l'évolution stratégique et opérationnelle de l'alliance ainsi que son expansion", a souligné Ghosn, à l'énergie semble-t-il intacte.
Son emploi du temps devrait rester tout aussi chargé, partagé entre le Japon, la France et les marchés automobiles clés (Etats-Unis et Chine notamment).
Remettre sur pied Mitsubishi MotorsAu Japon, avec un oeil sur Nissan (groupe qui compte 152.000 employés), Carlos Ghosn va tâcher de remettre sur pied Mitsubishi Motors (30.000 personnes), plongé l'an dernier dans un scandale de fraude.
En France, il garde les pleins pouvoirs chez Renault (120.000 salariés) auquel il vient de fixer un nouveau cap, avec un objectif d'un chiffre d'affaires de 70 milliards d'euros à horizon 2022.
A la tête de l'alliance, née en 1999, il rêve de la première place mondiale, même s'il affirme que là n'est pas la priorité, préférant mettre en avant la possibilité de générer des économies d'échelle potentiellement décisives dans un secteur à faibles marges.
L'ensemble, qui inclut aussi le premier constructeur russe, Avtovaz (Lada), en grande difficulté mais qui commence à remonter la pente , a frôlé les 10 millions de véhicules (9,86 millions exactement) en 2016, se rapprochant de l'américain General Motors (10 millions d'unités), troisième derrière Volkswagen (10,3 millions d'unités) et Toyota (10,18 millions).
Les groupes sont liés par des participations croisées: Renault possède 43,4% de son partenaire japonais et Nissan 15% de la firme de Billancourt. A cela s'ajoutent donc les 34% dans Mitsubishi qui assurent à Nissan le statut d'actionnaire de référence.