Niveau de vie des ménages: les principaux résultats de l’enquête nationale du HCP

Photographie d'illustration.

Une famille marocaine. (Photo d'illustration)

Le Haut-Commissariat au plan (HCP) a publié une note sur les principaux résultats de l’enquête nationale sur le niveau de vie des ménages, menée entre 2022 et 2023. Analysant l’évolution des indices entre 2014 et 2022, elle montre que le niveau de vie des Marocains s’est sensiblement apprécié entre 2014 et 2019, avant de subir une réelle détérioration les trois années suivantes.

Le 17/02/2025 à 10h21

Le Haut-Commissariat au plan (HCP) vient de publier une note sur les principaux résultats de l’enquête nationale sur le niveau de vie des ménages 2022-2023. Mené entre mars 2022 et mars 2023 auprès d’un échantillon de 18.000 ménages, représentatif des catégories socio-économiques et de toutes les régions du Maroc, ce travail fournit une vision actualisée des dynamiques socio-économiques au sein de la société marocaine.

Globalement, l’enquête conclut que, structurellement, le niveau de vie des ménages s’améliore, mais sans que cette dynamique ne s’accompagne d’une réduction des inégalités. Le HCP note ainsi que les politiques de filets sociaux ont un impact tangible sur la réduction de la pauvreté, mais la vulnérabilité des couches sociales non ciblées par ces politiques augmente. Résultat, la part des ménages avec un risque de déclassement vers la pauvreté s’élargit, et, pour la première fois, le constat concerne autant le milieu urbain que rural.

Dans le détail, l’enquête montre qu’entre 2014 et 2022, la dépense annuelle moyenne par ménage est passée de 76.317 dirhams (DH) à 83.713 DH, répartie entre 95.386 DH en milieu urbain et 56.769 DH en milieu rural. Ramenée à l’échelle individuelle, cette dépense est passée d’une moyenne de 15.876 DH par personne en 2014 à 20.658 DH en 2022. Elle a ainsi progressé, à prix constants, à un taux annuel moyen de 1,1% entre 2014 et 2022, passant de 3,1% entre 2014 et 2019 à -3,1% entre 2019 et 2022.

S’agissant des dépenses dans le budget total des ménages, la part de celles liées à l’alimentaire a augmenté de 37% en 2014 à 38,2% en 2022, les dépenses d’habitation et d’énergie sont passées de 23% à 25,4%, celles d’hygiène de 2,7% à 3,9% et celles de communication de 2,2% à 2,6%.

A contrario, la part des dépenses de soins de santé ont baissé de 6,1% à 5,9%, celle des dépenses de transport ont reculé de 7,1% à 5,8%, celle des dépenses d’équipements ménagers sont passées de 3,2% à 2,3% et celles des dépenses de loisirs et culture de 1,9% à 0,5%.

Les inégalités sociales se creusent

L’enquête du HCP montre également que le niveau de vie des 20% les moins aisés s’est amélioré annuellement de 1,1% entre 2014 et 2022, avec une amélioration de 3,9% entre 2014 et 2019, contre une détérioration de 4,6% entre 2019 et 2022.

Pour les 20% les plus aisés, le niveau de vie s’est apprécié annuellement de 1,4% entre 2014 et 2022, avec une progression de 2,8% entre 2014 et 2019 et une régression de 1,7% entre 2019 et 2022. Quant à la catégorie sociale intermédiaire, son niveau de vie a progressé de 0,8% entre 2014 et 2022, avec une progression de 3,3% entre 2014 et 2019 et une régression de 4,3% entre 2019 et 2022.

Les couches les plus pauvres et les plus riches ont vu globalement leur niveau de vie progresser alors que la classe moyenne n’a pas pu autant bénéficier ni des fruits de la croissance ni des politiques de redistribution. Dans ce contexte, les inégalités du niveau de vie, mesurées par l’indice de Gini, se sont creusées entre 2014 et 2022, passant de 39,5% à 40,5%, après avoir enregistré une diminution à 38,5% en 2019.

L’enquête du HCP révèle aussi que les disparités entre les milieux urbain et rural sont restées stables à 1,9 fois entre 2014 et 2022, après avoir été réduites à 1,8 fois en 2019. Le taux de pauvreté absolue a globalement reculé entre 2014 et 2022, passant de 4,8% à 3,9%, après avoir atteint un taux de 1,7% en 2019.

Le même trend est observé en milieu rural, avec une baisse du taux de pauvreté, passant de 9,5% en 2014 à 6,9% en 2022. En revanche, en milieu urbain, la pauvreté a enregistré une légère hausse, de 1,6% en 2014 à 2,2% en 2022.

Au total, l’effectif de la population pauvre au niveau national est de 1,42 million en 2022, dont 512.000 en milieu urbain et 906.000 dans le rural. En 2022, cinq régions présentent un taux de pauvreté supérieur à la moyenne nationale (3,9%) : Fès-Meknès (9%), Guelmim-Oued Noun (7,6%), Béni Mellal-Khénifra (6,6%), Darâa-Tafilalet (4,9%) et L’Oriental (4,2%).

La vulnérabilité de plus en plus prégnante en milieu urbain

La vulnérabilité à la pauvreté renseigne sur le risque de basculer dans la pauvreté si des filets de sécurité ne protègent pas des chocs économiques et sociaux, explique le HCP. La vulnérabilité a connu une légère hausse de 12,5% à 12,9% entre 2014 et 2022 après avoir atteint 7,3% en 2019. Dans les zones rurales, la prévalence de la vulnérabilité en 2022 (19,2%) demeure similaire à celle observée en 2014 (19,4%), tandis qu’en milieu urbain, elle a augmenté à 9,5% en 2022 par rapport à 7,9% en 2014.

Le nombre de personnes économiquement vulnérables est de 4,75 millions en 2022, dont 2,24 millions en milieu urbain et 2,51 millions en milieu rural. La vulnérabilité économique se développe en milieu urbain : en 2022, une tendance nouvelle se dessine, près de la moitié des personnes vulnérables sont des citadins (47,2%), contre 36% en 2014.

Pour la pauvreté multidimensionnelle, elle a considérablement diminué, passant de 9,1% en 2014 à 5,7% en 2022, surtout en milieu rural, où le taux est passé de 19,4% à 11,2%, tandis qu’en milieu urbain, il est passé de 2,2% à 2,6%.

Deux régions affichent des taux de pauvreté multidimensionnelle à deux chiffres : Béni Mellal-Khénifra (11,6%) et Fès-Meknès (10,4%). Ces deux régions concentrent, à elles seules, plus de 40% de la population en situation de pauvreté multidimensionnelle.

Le revenu annuel moyen des ménages s’élève à 89.170 DH au niveau national, 103.520 DH en milieu urbain et 56.047 DH en milieu rural. Par personne, le revenu annuel moyen est de 21.949 DH en 2022. Il est 2,1 fois plus élevé en milieu urbain (26.988 DH) qu’en milieu rural (12.862 DH). Au niveau national, plus de sept ménages sur dix (71,8%) ont un revenu annuel inférieur à la moyenne, avec des disparités entre le milieu urbain (65,9%) et le milieu rural (85,4%).

Plus de 35% du revenu des ménages provient des salaires

Les revenus salariaux représentent la principale source de revenus pour les ménages, contribuant à hauteur de 35,1% du revenu total. Cette proportion est de 36,4% en milieu urbain et de 29,5% en milieu rural. Les transferts publics et privés représentent 21,3 % du revenu total, avec une proportion de 22,8 % en milieu urbain et de 15,1% en milieu rural.

En conclusion, le HCP note que les politiques sociales en faveur des plus pauvres ont permis à ces couches de la population de mieux bénéficier des fruits de la croissance. Pour autant, l’accentuation des inégalités et l’évolution à la marge du niveau de vie des classes intermédiaires révèlent la nécessité de politiques publiques redistributives volontaristes à l’adresse de la classe moyenne.

Le HCP estime que l’inflexion dans la trajectoire d’amélioration des différents indicateurs à partir de 2019 jusqu’en 2022, une période marquée par la pandémie Covid-19, nécessite une nouvelle évaluation du niveau de vie des ménages afin de distinguer ce qui relève du structurel et ce qui relève du conjoncturel.

Par Nisrine Zaoui
Le 17/02/2025 à 10h21

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