Bank Al-Maghrib tient ce mardi 22 septembre son troisième conseil de l’année, dans un contexte de grave crise économique et sociale, engendrée par la pandémie de coronavirus qui a mis à genoux des pans entiers du tissu productif national.
Deux points en particulier seront suivis par les observateurs économiques durant ce rendez-vous très attendu: la décision de Bank Al-Maghrib (BAM) sur le taux directeur, et les nouvelles prévisions macroéconomiques pour le reste de l’année 2020 et pour 2021.
Pour ce qui est du taux directeur, un consensus semble se dégager au niveau du marché pour s'accorder sur le fait qu’il ne devrait pas bouger. Une enquête récente d’Attijari global research montre que 75% des investisseurs institutionnels sondés n’anticipent pas un changement du taux directeur de Bank Al-Maghrib au deuxième semestre 2020, jugeant que le taux actuel est déjà à un niveau très bas.
«Baisser le taux directeur en dessous de 1,5% cette semaine serait une annonce dénuée de sens dans le climat actuel», affirme de son côté Abdelouahed El Jai, ancien directeur de la banque centrale, cité par l’agence américaine Bloomberg.
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Rappelons que BAM a déjà procédé à deux reprises cette année à la baisse de son taux de référence: une première fois de 25 points de base en mars, et une seconde fois de 50 points de base en juin, ramenant le taux directeur de 2,25% en début d’année à 1,50% actuellement, soit le taux le plus bas encore jamais pratiqué au Maroc. L’objectif de ces baisses successives était de soutenir davantage la reprise de l’activité économique par le crédit en agissant sur le coût de l’argent.
Or, force est de constater que ces baisses importantes du taux directeur n’ont pas encore été entièrement répercutées par les banques sur les taux assortissant les crédits à la clientèle. Une telle situation remet sur la table le problème de la transmission rapide des décisions de politique monétaire vers l’économie réelle, via le canal du crédit.
Un problème dont Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-MAghrib, est parfaitement conscient. En juin dernier, il avait assuré que la Banque centrale veillera, plus que par le passé, à la transmission de ses décisions à l’économie réelle et fera le point régulièrement à ce sujet avec "le plus haut management du système bancaire".
"Il y a toujours un temps de latence entre la baisse du directeur de la Banque centrale et la baisse des taux des crédits bancaires", a reconnu Lotfi Sekkat, PDG du groupe CIH Bank, ajoutant que la baisse du taux directeur opérée au premier semestre se fera davantage ressentir durant le second semestre.
En résumé, avant d’opérer une nouvelle baisse du taux directeur, il faudrait déjà consommer les deux premières.
Une croissance revue à la baisse?Sur le deuxième point, à savoir celui des projections macroéconomiques, la banque centrale devrait revoir les prévisions établies fin juin 2020 à la lumière de l’évolution de l’activité économique de ces trois derniers mois.
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En juin dernier, BAM pronostiquait une contraction de la croissance de 5% en 2020. Une révision à la baisse ne serait guère surprenante compte tenu de l’aggravation de la situation épidémiologique, cet été, qui n’a pas été sans conséquences sur certaines activités productives. Des villes ont fait l’objet de mesures restrictives importantes, tandis que l’activité touristique n’a toujours pas redécollé.
En outre, au niveau mondial, les économies des principaux partenaires du Maroc peinent à se redresser, ce qui ne manquera pas de peser sur la demande extérieure adressée au Maroc.
La Banque centrale devrait dans ce contexte établir une prévision plus proche de celle du haut commissariat au Plan (HCP), qui a pronostiqué une décroissance du Produit intérieur brut de -5,8% en 2020, ou encore de celle du Centre marocain de conjoncture (CMC) qui table, lui, sur une récession de l'ordre de 6,2% en 2020.