"Les organes de gouvernance de Renault travaillent activement à la recherche de la meilleure solution pour la gouvernance future", a déclaré le groupe au losange dans un communiqué.
L'annonce est tombée peu après le rejet par le tribunal de Tokyo d'une nouvelle demande de libération sous caution de Ghosn, détenu dans une prison de Tokyo depuis le 19 novembre alors qu'il est encore officiellement PDG de Renault.
Le dirigeant, sous le coup de trois inculpations, pour abus de confiance et autres malversations financières, doit rester en détention provisoire jusqu'au 10 mars au moins. Dernier mince espoir de sortir rapidement: un appel spécial devant la Cour suprême qui doit être déposé par son avocat.
Après avoir longtemps défendu la présomption d'innocence et avec les révélations qui se multiplient et ternissent chaque jour un peu plus l'image de l'homme d'affaires, Renault, comme l'Etat français, son premier actionnaire, ne pouvait plus laisser traîner sans nuire aux intérêts du groupe.
Lire aussi : Carlos Ghosn frappé par deux nouvelles inculpations
"J'ai toujours indiqué, en rappelant la présomption d'innocence de Carlos Ghosn, que s'il devait être durablement empêché, nous devrions passer à une nouvelle étape. Nous y sommes", a déclaré le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, mercredi soir sur LCI.
L'Etat français, qui détient 15% du capital et environ 22% des droits de vote, a demandé la convocation d'un conseil d'administration "dans les prochains jours". La date de dimanche a été évoquée par Le Figaro. Mais jeudi après-midi, aucune convocation n'avait encore été envoyée aux administrateurs, qui doivent être notifiés au moins 48 heures à l'avance. Selon plusieurs sources proches du dossier, la date n'était pas encore définitivement fixée.
"Cela prendra les quelques jours nécessaires mais aucun calendrier précis n'est arrêté. Le conseil décidera après que le comité des nominations et de la gouvernance aura examiné les candidatures et fait ses recommandations", a précisé jeudi soir Philippe Lagayette, administrateur référent de Renault, dans un entretien au Figaro.
La gouvernance transitoire "fonctionne efficacement" mais "puisque l'indisponibilité du PDG semble devoir durer, nous avons maintenant la responsabilité de prendre des mesures durables", a-t-il dit.
Le nom de Jean-Dominique Senard, 66 ans, qui doit passer la main comme patron de Michelin en mai et qui est apprécié du pouvoir politique, est régulièrement cité dans la presse. "Jean-Dominique Senard est bien sûr un dirigeant très estimable. Mais nous ferons les choses dans l'ordre et quand nous serons prêts", a poursuivi M. Lagayette.
"Ce sont les organes de gouvernance de Renault qui ont les décisions en main. Qu'il n'y ait pas d'ambiguïté: c'est Renault qui décide de sa gouvernance, pas l'Etat, même si nous travaillons en parfaite harmonie", a martelé l'administrateur référent.
Le Maire a loué les qualités de Senard, tout en s'abstenant de se prononcer au sujet de son éventuelle candidature. "C'est un grand industriel, un homme qui a une conception sociale de l'entreprise et qui l'a démontré à plusieurs reprises" ainsi qu'"un spécialiste du secteur automobile", a-t-il déclaré.
Lire aussi : Portrait. Carlos Ghosn: la chute d'une star
Scénario souvent évoqué: le poste de PDG de Renault pourrait être scindé en deux, avec un président du conseil d'administration d'un côté et un directeur général exécutif de l'autre, le nom de Thierry Bolloré, nommé il y a un an adjoint de Carlos Ghosn, revenant le plus souvent pour ce dernier poste.
Au-delà de Renault, il faudra un successeur à Carlos Ghosn à la tête de l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, premier ensemble automobile mondial, incarné par la société Renault-Nissan BV (RNBV) basée aux Pays-Bas. D'après ses statuts, son patron est choisi par Renault.
Mais on imagine difficilement qu'une nomination ait lieu sans consultation des partenaires japonais. Des émissaires du gouvernement français étaient d'ailleurs à Tokyo, jeud,i pour chercher un consensus.
Nissan et Mitsubishi ont révoqué le dirigeant franco-libano-brésilien de leurs conseils d'administration dès la fin novembre.
Carlos Ghosn a pu défendre pour la première fois sa cause la semaine dernière au tribunal, lors d'une comparution exceptionnelle à sa demande. Amaigri et menotté jusqu'à l'entrée dans la salle d'audience, il s'est dit "faussement accusé", démentant les allégations point par point.
Le procès de Ghosn, qui risque en théorie jusqu'à 15 ans de prison, n'aura pas lieu avant des mois.