Samir: un des investisseurs intéressés furieux contre le syndic

le360

Le cabinet d’avocats saoudien Altayar, représentant la société SKLubricants qui fait partie des 20 intéressés par la reprise de la Samir, serait très remonté contre le syndic en charge de la liquidation du raffineur. En cause, la langue du cahier des charges. Explications.

Le 22/02/2017 à 17h56

Cela devait arriver! Un des investisseurs -ou plutôt son représentant- qui a manifesté son intérêt pour la reprise de la Samir menace aujourd’hui de se rétracter à cause de la langue dans laquelle a été rédigé le cahier des charges. C’est ce que vient d’apprendre le360 de sources sûres.

La question avait d’ailleurs été soulevée lundi dernier alors que le syndic en charge de la liquidation judiciaire de la Samir, Mohamed El Krimi, organisait une conférence de presse pour présenter la procédure de consultation des cahiers des charges. Ce jour-là, El Krimi avait expliqué que le cahier des charges n’était disponible qu’en français en raison d’un problème de coûts. Est-ce à dire que la traduction du document en anglais et/ou en arabe nécessitait des charges supplémentaires qu’il valait mieux éviter à une entreprise en difficulté? Effectivement. C'est l'argument quelque peu surréaliste, compte tenu de la taille de la Samir, qu'a présenté le syndic pour justifier que le cahier des charges ait été rédigé uniquement en français. Selon le syndic, tous les investisseurs rencontrés se sont montrés compréhensifs, sauf un.

Or, de l'aveu d'El Krimi lui-même, ce sont des Américains, des Anglais, des Européens et quelques Arabes qui sont intéressés par la Samir. La logique aurait donc voulu que le document rédigé dans le cadre de la liquidation du raffineur soit au moins disponible en anglais, la langue reconnue et utilisée dans les transactions et les accords internationaux.

C’est ce que reproche aujourd’hui l’investisseur dont parlait El Krimi lundi dernier. Il s’agit, selon nos informations, d’un cabinet d’avocat saoudien qui s’est présenté au syndic comme représentant de la société SKlubricants. Le cabinet se serait déjà réuni avec le syndic au début du mois de février, autrement dit avant le lancement de l’appel à manifestation d’intérêt le 8 du même mois, et aurait soulevé ce problème. Mais il aurait été surpris de voir que le cahier des charges mis à la disposition des investisseurs intéressés avait été maintenu dans sa version française, chose que le cabinet n’a pas hésité à qualifier de favoritisme en direction d’investisseurs français ou francophones.

Au-delà des menaces de retrait de cet investisseur, qui n’est certes qu’un parmi la vingtaine ayant déclaré leur intérêt selon le syndic, cette affaire remet au goût du jour plusieurs autres questionnements qui rendent le processus de liquidation de la Samir encore plus flou.

D’abord, si c’est une question de coût de traduction, pourquoi la version originale du cahier des charges a été rédigée en français et non en anglais? El Krimi a répondu en partie lors de la conférence de presse, mais sans vraiment convaincre. Pour lui, les documents de l’entreprise ayant servi de base à l’élaboration du cahier des charges étaient rédigés en français.

Ensuite, les identités des 20 investisseurs intéressés ne sont pas très claires, pas plus que leur crédibilité. Il y a eu d’abord cette soi-disant offre soumise par un cabinet d’avocat italien alors que le juge n’avait pas encore émis l’ordonnance de vente. A ce jour, l’identité de l’investisseur représenté par ce cabinet n’est pas connue. On ne sait même pas s’il va réellement se manifester lors de l’appel à manifestation d’intérêt en cours. Il y a également ce cabinet d’avocat saoudien qui, selon nos informations, présente son client comme une société saoudienne qui croit au potentiel du Maroc qu’elle considère comme son deuxième pays. Le cabinet en aurait même fait un argument pour tenter de convaincre le syndic de traduire le cahier des charges en anglais ou en arabe.

Or, une simple recherche sur le web permet de constater que Sklubricants est en fait une entreprise basée à Séoul en Corée du Sud. Ses produits sont certes commercialisés en Arabie Saoudite, mais via un distributeur qui n’a aucun lien juridique avec elle.

C’est dire que le feuilleton la Samir est loin d’avoir révélé tous ses dessous et intrigues. Et il risque de durer encore plusieurs mois, voire quelques années !

Par Younès Tantaoui
Le 22/02/2017 à 17h56