«Les MDM constituent une force pour l’économie nationale, et leur importance n’est pas à démontrer», affirme d’emblée El Mehdi Fakir, expert-comptable et analyste économique, dans un entretien pour Le360. Cet expert rappelle ainsi qu’en 2020, en pleine pandémie, les transferts des MDM vers le Maroc n’ont pas faibli, atteignant plus de 68 milliards de dirhams, et devraient dépasser les 73 milliards de dirhams en 2021.
L’actualité au Maroc est en effet marquée, depuis le 15 juin dernier, par le retour massif des Marocains du Monde à la mère-patrie, dans le cadre de l’opération Marhaba-2021. Après plus de deux longues années d’absence. Au-delà des aspects liés au renforcement du lien entre les MDM et leur pays d’origine, cette opération présente également un grand intérêt économique, au moment où le Maroc entame sa relance post-covid.
Et pour El Mehdi Fakir, la manne des MDM «est d’une importance capitale pour le pays. Elle a, dans un premier temps, un impact monétaire, dans la mesure où elle renforce les réserves en devises du Royaume. Dans un deuxième temps, cet argent est injecté, généralement sous forme de consommation intérieure, dans le cycle de création de richesses et dope la croissance».
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Une fois de retour au pays, les MDM jouent un rôle économique encore plus important en dynamisant les ventes de plusieurs secteurs d’activités comme celui des loisirs ou celui de l’immobilier, indique notre interlocuteur. «Beaucoup de MDM attendent cette opportunité [de revenir au Maroc, Ndlr] pour acquérir un logement, et les professionnels du secteur leur accordent, d’ailleurs, un intérêt particulier», souligne-t-il.
Prolonger l’exonération des droits d’enregistrementSur ce point précisément, El Mehdi Fakir attire l’attention des autorités marocaines sur la nécessité de prolonger l’exonération des droits d’enregistrement. Cette mesure incitative mise en place par le gouvernement pour faciliter l’acquisition d’un bien immobilier, arrive en effet à échéance le 30 juin prochain.
Cette mesure gagnerait à être prolongée pour deux raisons. D’une part, elle a prouvé son efficacité, puisqu’elle a dopé de façon considérable le marché immobilier et les ventes, notamment dans le logement social. D’autre part, les MDM, qui viennent d’arriver, n’en ont pas réellement profité.
«Je pense que c’est un droit constitutionnel que les Marocains soient mis sur un même pied d’égalité», affirme l'économiste. Il n’est pas normal, argumente-t-il, «qu’un Marocain qui n’a pas pu être présent physiquement soit privé d’un tel avantage, alors que son compatriote présent dans le Royaume a pu en bénéficier. Ce n’est pas du tout équitable».
El Mehdi Fakir appelle donc l’exécutif à «s’inspirer de la clairvoyance royale» qui a permis aux MDM d’accéder au territoire nationale dans les meilleures conditions, grâce notamment à des tarifs dans les transports (aériens et maritimes) revus à la baisse. L’esprit de la décision royale pourrait ainsi s’appliquer également en matière fiscale. De ce point de vue, «un rallongement d’au moins deux mois de l’exonération sur les droits d’enregistrement s’impose», estime-t-il.
Lancer une réflexion globale sur la fiscalité des MDMPlus globalement, notre interlocuteur milite pour que soit engagée une «réflexion profonde visant à faire de la fiscalité un levier permettant au MDM d’investir et de consommer dans leur pays d’origine, à travers des incitations ciblées».
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Abordant l’épineuse question de l’échange automatique de données fiscales avec les pays de l’OCDE, El Mehdi Fakir appelle les autorités marocaines à aller dans le sens de l’intérêt des MDM. «Nous ne pouvons pas du jour au lendemain appliquer des mesures restrictives sans préparer le terrain. La DGI a annoncé que cet échange n’entrera pas en vigueur en 2021. Il faut aller plus loin, et rassurer davantage les MDM».
«Il appartient au législateur et aux cadres de la DGI [Direction générale des impôts, Ndlr] de faire preuve d’ingéniosité pour imaginer les carottes fiscales, parafiscales, douanières ou encore foncières, pour favoriser, en toute légalité, nos MDM», préconise-t-il. «Les PME exportatrices pourvoyeuses de devises bénéficient de carottes fiscales. Il devrait en être de même pour les MDM qui, comme cela a été dit, contribuent grandement aux réserves en devises du Royaume», argumente encore l'économiste.
Et d'enjoindre les autorités, en conclusion, à «faire preuve de courage politique, au-delà des aspects purement techniques».