La hausse des droits de douane à l’importation des produits finis de consommation importés, hors des pays signataires d’ALE avec le Maroc, a connu deux hausses en 2020. Une première hausse, en passant de 25% à 30% au 1er janvier dans le cadre de la loi de finances 2020, et une deuxième, fin juillet, dans la loi de finances rectificative, avec un passage à 40% de droits de douane.
Si les commerçants n'avaient pas contesté la première hausse, ils remettent en question la seconde, qui intervient dans un contexte de crise économique induite par le Covid-19. Le confinement a en effet fortement impacté leur activité, et ils indiquent avoir enregistré des baisses de chiffre d’affaires allant de 25 à 60%, en fonction de leurs types d’activités.
Lire aussi : Loi de finances rectificative: un droit d’importation de 40%, au lieu de 30%
«Nous sommes dans une situation critique. Avec le Covid-19, nous avons eu une grosse baisse de notre chiffre d’affaires et cette augmentation des droits de douane nous a beaucoup affectés. Elle a surtout affecté les consommateurs, car nous avons dû répercuter ces hausses sur les prix. Si cette mesure est maintenue, nous devrions réduire nos importations, ce qui limitera le choix des consommateurs marocains. Nous serons contraints de réduire notre masse salariale en licenciant et ce n’est pas ce que nous voulons», explique Ali Bennis, importateur et distributeur de chaussures.
Selon plusieurs commerçants, la hausse des prix de vente, induite par la hausse des tarifs douaniers, et la baisse du pouvoir d’achat des consommateurs du fait de la crise économique, a fortement réduit leur activité.
Selon les premières estimations des associations représentatives de cette activité du secteur tertiaire, les pertes d’emplois dues à la baisse de l'activité des commerçants pourraient avoisiner les 15%, alors même que les activités commerçantes emploient près de 1,5 million de personnes, et contribue à hauteur de 8% du PIB national.
Par ailleurs, tout en se réjouissant de l’arrêt de l'activité de la contrebande à Sebta et à Melilla, les commerçants estiment que cette hausse des droits de douane favoriserait, en fait, l’informel.
«Dans le projet de loi de finances 2021, nous avons noté la proposition de l’augmentation des droits de douane sur plusieurs articles dans le secteur du tissu d’ameublement, qui vont passer de 10 à 40% et de 17,5 à 40%. Pour nous, cette augmentation est exorbitante, et ce qui nous pose le plus problème, c’est l’informel. Des entreprises citoyennes comme les nôtres ne pourront plus importer ce genre de produits, contrairement aux individus opérant dans l’informel… Des centaines d’entreprises devront fermer et licencier leurs salariés», explique Mouhsine Mekouar, président de l’Association marocaine des distributeurs des produits et matières textiles.
Devant ce constat, les commerçants en appellent à l’Etat, afin d'acter un retour aux droits de douane appliqués en 2019, afin de relancer l’économie, favoriser l’emploi et l’investissement, et préserver le pouvoir d’achat des Marocains.
Or, pour l’Etat, ces hausses consécutives des droits de douane constituent un moyen de protéger l'emploi et les industries locales, et réduire la pression sur les réserves de change.
Lire aussi : PLF 2021: hausse des droits de douane sur les produits chocolatiers
«Actuellement, dans le cadre d’un contexte international marqué par une crise sanitaire majeure ayant généré un ralentissement de l’économie mondiale, un renforcement de la protection de la production nationale semble nécessaire pour accompagner les efforts entrepris en matière d’appui aux entreprises en difficultés», peut-on lire dans une note accompagnant le projet de loi de finances rectificative 2020.
Cependant, pour les professionnels du commerce, «le tissu industriel marocain ne dispose pas encore d’usines capables de répondre à la demande des consommateurs marocains en termes de qualité et prix», souligne Ali Bennis.