Que Mohamed Sifaoui choisisse d’aborder l’état de santé du président algérien dans une vidéo consacrée aux coulisses de sa rencontre avec Boualem Sansal n’a rien d’anodin. Loin d’être un hors sujet, ce détour éclaire le contexte dans lequel s’inscrit la situation de l’écrivain. L’auteur du «Serment des barbares» a en effet exprimé sa volonté de retourner en Algérie pour récupérer ses affaires, notamment son ordinateur portable. Lors de leur rencontre, le 26 novembre à Paris, Mohamed Sifaoui a tenté de le dissuader, estimant qu’il «fait la même erreur qu’Emmanuel Macron et que l’écrasante majorité des analystes français, car il pense qu’en face, en Algérie, le régime est tenu par des personnes rationnelles, logiques et structurées, or c’est tout le contraire».
Car depuis quelques années, la rumeur sur la détérioration de l’état de santé du président algérien ne cesse d’enfler. En cause, des absences prolongées, des prises de parole décousues, des décisions irrationnelles prises à l’emporte-pièce… À 80 ans, Abdelmadjid Tebboune subit les contrecoups de son grand âge, est-on en lieu de penser. Mais pas que. Car d’après les sources évoquées dans cette vidéo par Mohamed Sifaoui, le mal dont souffre en réalité le président algérien aurait d’ores et déjà était diagnostiqué par ses médecins.
Quand les symptômes de la démence se manifestent dans les décisions politiques
«Abdelmadjid Tebboune est un être irascible et totalement imprévisible, c’est là chez lui un trait de caractère depuis longtemps», rappelle Sifaoui, mais le fait est que ce tempérament est «accentué par la maladie qui le ronge depuis 3 ans», annonce le journaliste. En effet, d’après les sources évoquées par Sifaoui, «le dictateur algérien est atteint d’un début de démence sénile et les médecins soupçonnent un syndrome de Korsakoff».
De quoi s’agit-il précisément? Une petite recherche sur un site médical permet de s’en faire une idée précise: «C’est un trouble neurologique chronique causé par une carence sévère en thiamine (vitamine B1) souvent liée à une consommation excessive d’alcool. Il entraîne des troubles cognitifs majeurs, notamment des problèmes de mémoire, et peut être le stade final de l’encéphalopathie de Wernicke, un état aigu. Les symptômes incluent l’amnésie rétrograde (perte de mémoire des événements passés) et antérograde (difficulté à former de nouveaux souvenirs), l’affabulation (inventer des histoires pour combler les lacunes de mémoire), et une désorientation temporelle.»
Autant de symptômes dans lesquels il est difficile de ne pas reconnaître le président algérien. Et les exemples ne manquent pas en ce sens. Le dernier en date, évoqué par Sifaoui, remonte à il y a deux mois, en septembre 2025, lorsque «Abdelmadjid Tebboune annonçait lors d’un entretien télévisé devant des journalistes algériens incapables de le contredire que l’Algérie avait intégré le G20». Et le président algérien d’annoncer son intention de se rendre en Afrique du Sud avant la fin de l’année. «Il y a une confusion manifeste, car l’Algérie n’a jamais intégré le G20 et ce n’est pas demain qu’elle l’intègrera. Elle était seulement invitée ainsi que d’autres pays du continent étant donné que la rencontre se tenait en Afrique», précise le journaliste.
Par ailleurs, révèle-t-il au sujet de l’absence du président algérien au sommet du G20 qui a donné lieu à de nombreuses interprétations, «Tebboune qui avait annoncé lui-même ce voyage a été dissuadé par ses médecins, car ce périple est clairement contre-indiqué pour les gens atteints de démence sénile. Son état de santé ne pouvait pas lui permettre de supporter un vol aussi long». Ainsi, Sifaoui n’épouse pas la thèse avancée par Boualem Sansal dans une interview accordée après sa libération à un média français. L’écrivain et essayiste de 81 ans déclarait en effet au sujet de l’absence de Tebboune en Afrique du Sud que son intention était d’«humilier Macron», car les deux dirigeants «avaient pris rendez-vous». On comprendra à la lumière des révélations de Sifaoui qu’il n’en est rien.
Un régime d’autant plus dangereux qu’il est dépourvu de raison
À Sansal qui rêve de retourner chez lui en homme libre et qui s’imagine que ce voyage permettrait de laver l’injustice dont il a été victime (si toutefois il ne se faisait pas arrêter à nouveau), Mohamed Sifaoui rappelle que «ce pays est dirigé par une personne incapable de raisonner calmement». Car, avance-t-il dans une hypothèse fort probable compte tenu de la démence sénile dont souffre le président algérien, «si Abdelmadjid Tebboune venait à apprendre que Boualem Sansal est revenu en Algérie, il serait capable de l’arrêter à nouveau en oubliant qu’il l’a déjà gracié». La chose peut prêter à sourire, mais le fait est, rappelle gravement Sifaoui, que le dictateur algérien est à ce jour «incapable de gouverner et de diriger le pays», et que les choses ne vont pas aller en s’améliorant dans les semaines et les mois à venir. «Heureusement que l’Algérie ne dispose pas de la bombe nucléaire, il faut vraiment s’en réjouir dans une pareille situation», ironise-t-il pour souligner la gravité de la situation.
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Le régime algérien aux commandes duquel officie cet homme sénile en devient encore plus redoutable que jamais. Mohamed Sifaoui ne manque pas de rappeler dans cette vidéo les exactions dont le président algérien et ses hommes de main sont capables, à commencer par les tentatives de déstabilisation de tous ceux qui s’expriment contre le régime. «Le régime d’Abdelmadjid Tebboune privilégie la brutalité, la censure, la menace et le harcèlement. C’est un régime vide, une fois de plus incapable d’apporter des réponses, des contradictions et des explications sur le fond. C’est un régime qui repose sur le faux, le vide et le mensonge», résume-t-il.
Un régime dont «les services de sécurité mettent encore une cagoule sur la tête d’un détenu», s’indigne-t-il en évoquant les conditions de l’arrestation de Boualem Sansal en novembre 2024 à l’aéroport d’Alger, choqué que l’on procède de la sorte, en 2025, «non pas avec des terroristes mais avec des écrivains». Et de rappeler les barbouzeries commises en France et commandées par Tebboune lui-même à ses hommes de main, lors de l’enlèvement et la séquestration de l’opposant algérien Amir DZ dans le but de l’éliminer.
Autre exemple brandi par Sifaoui, l’incarcération le 27 novembre du doyen de la presse algérienne, Saad Bouakba. Ce que lui reproche concrètement le régime? Avoir accordé une série d’entretiens à Vision Tv dans lesquels il déroule l’histoire du pays et les coulisses du pouvoir depuis l’indépendance du pays, en dressant par ailleurs un portrait trop élogieux de Krim Belkacem, assassiné le 18 octobre à Francfort, en Allemagne, par des tueurs à la solde de Boumediene. Des propos qui lui valent d’être poursuivi pour «atteinte à des symboles de la révolution et diffamation».
«En Algérie, sous Tebboune, on arrête des journalistes ou des intellectuels parce qu’ils n’épousent pas les thèses officielles et les récits élaborés par un pouvoir qui a fait de la falsification de l’histoire mais aussi de la rente mémorielle une ligne de conduite», rappelle gravement Mohamed Sifaoui.
Le sort de Christophe Gleizes plus incertain que jamais
Et c’est précisément entre les mains de ce régime que repose le sort du journaliste sportif français, Christophe Gleizes, arbitrairement détenu en Algérie. Son cas a d’ailleurs été abordé par Mohamed Sifaoui lors de sa rencontre avec Boualem Sansal. Son affaire, réexaminée en appel le 3 décembre prochain, pourrait aboutir à trois issues, analyse le journaliste, car «ceux qui connaissent le régime algérien savent que la décision sera prise dans le bureau de Tebboune et transmise au juge par son directeur de cabinet, Boualem Boualem».
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Ainsi, entrevoit-il, «au travers de cette décision politique maquillée en décision de justice, le régime algérien enverra un message aux autorités françaises». Premier scénario possible et interprétation qui en découlent, «si Gleizes est condamné à une peine plus courte qui lui permettra de couvrir sa durée de détention et qu’il est libéré avant la fin de l’année, cela voudra dire que le régime de Tebboune veut envoyer un message positif à la France».
Deuxième hypothèse, «si la condamnation est seulement allégée mais que le journaliste doit passer encore un peu de temps en détention, cela voudra dire que les discussions entre diplomates français et algériens se poursuivent mais qu’il y a encore des dossiers en suspens qui ne sont pas encore totalement réglés». Enfin, troisième cas de figure et de loin le plus préoccupant, «si la condamnation du journaliste est confirmée, voire aggravée en appel, c’est que le régime de Tebboune veut repartir vers l’escalade».
À la lumière des révélations de Mohamed Sifaoui sur la maladie dont souffre Tebboune, de nombreuses décisions épidermiques et déclarations farfelues du président algérien s’expliquent – enfin. Sa fameuse affirmation à l’Assemblée générale de l’ONU que l’Algérie est en mesure de dessaler 1.3 milliard de mètres cubes d’eau par jour, le mystérieux homme d’affaires malaisien qui va investir 20 milliards de dollars en Algérie, 1 dinar algérien qui équivaut à 100 dollars américains, l’Algérie troisième puissance économique au monde, l’échange de cadeaux entre George Washington et l’émir Abdelkader, ainsi que les mesures irrationnellement agressives contre le Maroc (rupture unilatérale des relations diplomatiques, fermeture du ciel aux avions marocains, fermeture du gazoduc GME, interdiction de travailler avec des entreprises marocaines, instauration de visas…). Tout s’explique quand on sait que l’Algérie est dirigée par un homme atteint de démence sénile.












