Quand ils partent par la porte, la queue entre les jambes, au vu de l’échec de leurs «investigations», c’est pour revenir par la fenêtre. C’est le moins à dire concernant l’acharnement du collectif autoproclamé de journalistes d’investigation Forbidden Stories sur le Maroc. Ils ont eu beau rater leurs «révélations» dans l’affaire du logiciel Pegasus, accusant le Maroc d’y recourir pendant que la société éditrice israélienne, NSO, dessert, entre autres, 22 clients en Europe, rien n’y a fait. Des 22 pays européens, seule la Hongrie a eu droit de cité dans cette organisation que dirige Laurent Richard.
Tout comme pour des ONG telles que Human Rights Watch, le Royaume est un bon client. Soit, mais encore faut-il qu’il y ait des enquêtes sérieuses sur des faits qui dérangeraient, et vraiment.
Poursuivant leurs efforts dans ce qui ressemble fort à une idée fixe, Forbidden Stories nous revient cette fois avec un «complément d’enquête» sur les terres collectives au Maroc. Laquelle enquête aurait été entamée par un certain Omar Radi, condamné pour viol. Qu’y apprend-on? Rien de nouveau, sauf une longue série de rappels mettant en cause le groupe immobilier Addoha autour des terres Ouled Sbiha, et des idées très arrêtées assénant cette idée qu’il y a de méchants prédateurs d’un côté (le Makhzen, le capitalisme marocain, la CDG…), de pauvres victimes spoliées de l’autre, et, dans ce scénario précis, un gendarme de la Bourse qui ferme complaisamment l’œil.
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Bien évidemment, il y a également les témoins du drame, toujours les mêmes: Ahmed Reda Benchemsi et Aboubakr Jamaï, d’anciens journalistes mus en passe-partout de la dénonciation de tout ce qui est Maroc. Dommage qu’il en manque d’autres: il aurait fallu, pour le casting soit au complet, Moulay Hicham, Ali Lmrabet, Fouad Abdelmoumni, et ces militaires défroqués que sont Mustapha Adib et Abderrahim El Mernissi. Là au moins, on aurait eu droit à toute la galerie. La formule est usée, mais que dire quand Forbidden Stories veut absolument utiliser la même recette, digne d’une fiction, tout en espérant un résultat autre qu'un vrai fiasco journalistique?
Forbidden Stories affirme disposer de nouveaux éléments, mais même en lisant et en relisant son «enquête», il est clair que le coup d’éclat n’y est pas, sauf dans le regret d’un résidant français sur «les terres spoliées» en question, transformées en résidences de grand luxe, Plage des Nations, mais qui manquent, au grand dam de ce témoin soi-disant clé… d’épiceries. S'il n'y avait pas eu les colonnes du journal français Le Monde, tout de même censé être un quotidien de référence, qui ont servi de support à cette «investigation», il aurait été facile de croire qu'il s'agit là d'un roman-feuilleton -le suspense et les rebondissements surprise en moins. Mais non! Forbidden stories, c’est du sérieux, tout du moins, c'est ce que son équipe s'attache à faire accroire.
Plus sérieusement, donc, les terres collectives sont effectivement un vrai sujet, qui est suivi de près, traité en long, en large et en travers par les médias au Maroc, de l'audiovisuel public en passant par ceux à capitaux privés, qui se sont saisis du dossier depuis belle lurette et en parlent au quotidien. La problématique est débattue en toute transparence au Maroc, tant par l'équipe gouvernementale que par les membres de la société civile... Ce sujet ne recèle aucune face cachée, ou un quelconque «dessous sensible». Des organismes gouvernementaux étrangers, tels que le Millenium Challenge Corporation des Etats-Unis apportent d'ailleurs leurs précieux concours à sa résolution.
Ce que Forbidden Stories omet cependant de clarifier (et c’est décidément là, pour eux, une véritable démarche éditoriale), c’est qu’à l’origine du problème des terres collectives figure… la colonisation, le protectorat français ayant exploité à sa guise, 44 ans durant, les terres tribales. Activer des leviers aujourd’hui pour revêtir le costume de donneur de leçons, avouons que c’est un tantinet léger.
Si le dossier est complexe, le Maroc et toutes ses forces vives se mobilisent pour le résoudre. Tant pis si l’idée même que l’Etat s’investit pour mobiliser 1 million d’hectares pour l’agriculture et que le capital marocain se déploie pour valoriser ces terres à travers des projets créateurs de valeur et d’emplois, tout en sauvegardant les droits de ceux qui y travaillaient, ne plaît pas, au nom d’un paternalisme aussi suranné que franchement malsain. Et quand la motivation réelle des promoteurs de cette «investigation» n’est autre que la défense d’une hégémonie économique venue d’ailleurs, et qui n’a plus du tout droit de cité.
Dans tous les cas, en tapant à coups de pétards mouillés, Forbidden Stories ne fait que s’enfoncer dans le discrédit. En servant du réchauffé, le collectif, dont le fondateur se gargarise d’être multi-récompensé, risque de ne plus trouver preneur. Celui qui n’hésite pas à afficher des formules comme «Ils ont tué le messager. Ils ne tueront pas le message» sur son site internet, avec un appel au don juste en dessous, court le péril non seulement de tuer le message, s’il y en a réellement un, mais aussi de manquer cruellement de donateurs.
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Et justement, en termes d’argent, la version anglaise de la fameuse «enquête» de Forbidden stories mentionne des dinars algériens à la place des dirhams marocains. La vente des terrains «spoliés» à Ouled Sbiha s’est donc faite en dinars. Quel étonnement!
L’équipe de Laurent Richard a certes vite fait de corriger cette erreur, aux relents de vrai lapsus calami, qui vient trahir avec éclat les mains étrangères qui ont participé à la confection de cette «enquête». Des mains restées décidément bien trop attachées à la monnaie de leur pays.