Il suffit d'un rien pour montrer l'extrême fragilité de l'Algérie. En un clin d'oeil, une grève tourne à l'émeute, combinée à des scènes de pillages et saccages des biens d'autrui. Ce qui s'est produit, dans la nuit de lundi 2 à mardi 3 janvier, dans la wilaya de Béjaïa, en Kabylie, (et qui risque de s'élargir à d'autres villes et régions) constitue un indice très préoccupant concernant la santé d'un régime algérien presque totalement rentier et complètement désarmé exception faite du vieux recours aux subventions pour acheter la paix sociale. Une panacée à l'origine de sa survie mais sur laquelle il ne peut désormais plus compter, au regard de l'assèchement des caisses publiques, dû au plongeon des cours des hydrocarbures.
Une simple grève observée par les commerçants de Béjaïa, lundi 2 janvier, en protestation contre la loi de Finances 2017 validée par le président Abdelaziz Bouteflika, s'est vite transformée en émeutes et violents affrontements entre la population (notamment des jeunes) et les policiers et, signe des temps, des commerces ont été saccagés et pillés! Les images filmées et diffusées par nos confrères algériens -partisans et opposés au gouvernement inclus- sont dignes de scènes de guerre.
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La sortie ce mardi du ministre algérien de l'Intérieur, Noureddine Bedoui, en dit long sur la panique des locataires du prestigieux Club des Pins, QG de l'élite algérienne au pouvoir, quant à la non-maîtrise de la situation. " "Le gouvernement a consacré 10 milliards de dollars pour justement soutenir le pouvoir d'achat des Algériens", a en effet assuré le "ministre de la police", sans être sûr que cette "assurance" puisse se traduire dans les faits au regard de la cure d'austérité imposée par le gouvernement Sellal. La loi de finances 2017 prévoit, en effet, une petite hausse de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 17 à 19%. Une hausse presqu'insignifiante si l'on tient compte du fait que l'informel est la pratique dominante dans la majorité des commerces concernés par cette grève. Mais passons. Immédiatement le ministre de l'Intérieur se sent dans le besoin de rassurer la population sur le prix consenti par l'Etat algérien pour subventionner les produits de consommation et ce faisant, d'acheter la paix sociale.
Il ne faut donc pas s'étonner que le ministre algérien de l'Intérieur ne fasse pas preuve d'autorité et brandisse la carotte dans l'espoir de calmer les esprits. Il sait mieux que quiconque que l'Algérie est une poudrière et qu'en un rien de temps, elle peut basculer dans le pire. Les 10 milliards de dollars qu'il paie sont à la hauteur de la panique d'un régime qui ne tient pas le pays sous contrôle.
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L'Etat algérien, ou ce qu'il en reste, ne peut plus s'offrir le luxe de donner sans compter à son peuple pour s'assurer une longévité au pouvoir. Une difficulté qui, ajoutée à la vacance institutionnelle (un président inapte physiquement et mentalement depuis qu'il a été atteint d'un accident vaculaire cérébral, AVC, en 2013), risque de coûter ses jours à un régime en rupture de ban, celui de Bouteflika appelé à rendre des comptes pour les 800 milliards de dollars engrangés mais évaporés lors de la fameuse "embellie pétrolière" (années 2000), et dont une partie a été allouée pour contrer la marche du Maroc et acheter des soutiens africains à la "RASD".
Autant d'indicateurs crisogènes qui, réunis, peuvent conduire à une déflagration générale en Algérie. Il y a des signes qui ne trompent pas. Les affrontements de Béjaïa s'étendent à la capitale Alger. "Les habitants du quartier Boushaki, à Alger, ont passé une nuite blanche, en raison des actes de violences perpétrés par des dizaines de jeunes, munis de coutelas voire, de sabres", rapporte un site algérien. "Les assaillants, après avoir agressé un ressortissant étranger, ont investi le quartier commercial dit "hay chinois", où ils se sont livrés à des actes de pillage", rapporte la même source.
Des actes qui ramènent à l'esprit les souvenirs de la sinistre décennie noire (années 90), marquée par une guerre civile très coûteuse en termes de pertes humaines (250.000 morts)!
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Un scénario qui risque de se reproduire en Algérie, à la défaveur de tout le voisinage, proche ou lointain de ce pays à haut risque. "Le risque d'implosion et de guerre civile est très sérieux", avait en effet averti Pierre Defraigne, directeur général honoraire à la Commission européenne, dans une tribune de La Libre Belgique. «L’Europe doit tirer des leçons de la tragédie d’Alep. Et elle doit le faire vite parce qu’une nouvelle crise menace dans son voisinage immédiat: l’Algérie, 40 millions d’habitants, attend en effet la mort clinique du Président Bouteflika, ce dernier étant en réalité hors d’état de régner depuis plusieurs années», avait encore alerté ce responsable européen, appelant l’Europe à «se doter impérativement d’une défense commune par unification des forces armées existantes de ses Etats-membres dans le cadre de l’OTAN».
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Fait rare, le prestigieux quotidien américain New York Times a sorti, mi-décembre 2016, un article fleuve sous ce titre "Climat liberticide en Algérie", indiquant que ce pays était dirigé par "un petit cercle de généraux et d’officiers du renseignement". Or, ce petit cercle de généraux a non seulement "échoué à apporter une solution aux problèmes chroniques de l’Algérie", constatait-il, confirmant les mises en garde émises par les services occidentaux contre une explosion imminente dans ce pays. Une simple étincelle peut en effet mettre le feu aux poudres. Un risque qui ne concerne pas que l'Algérie car, faut-il l'occulter, une implosion chez le voisin de l'Est peut causer un exode massif de ses citoyens vers les pays voisins, notamment le Maroc qui partage avec ce pays 1550 kilomètres!