Arabie saoudite: l’autre visage de Mohammed Ben Salmane

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Revue de presseKiosque360. Alors qu’il traîne la réputation d’être un sanguinaire écervelé, après l'assassinat au retentissement mondial de Jamal Khashoggi, l’héritier du trône d’Arabie serait en réalité un réformateur visionnaire. L’éditorialiste Abou Wael Al Riffi révèle ses qualités et apporte des exemples.

Le 05/10/2020 à 17h32

«Mohammed Ben Salmane est un homme d'exception qui entrera dans l'histoire saoudienne par la grande porte.» Voilà comment l’éditorialiste vedette (et bien briefé) de chouf.tv présente l’homme fort d’Arabie saoudite. Selon Abou Wael Al Riffi, le jeune âge du prince héritier d’Arabie Saoudite -il n'a que 35 ans- laisse présager une longue période de règne, qui pourrait battre le record des 21 ans au sommet de l’Etat de son grand-père, le roi Abdulaziz Al Saoud. Normal, puisque le père de MBS a décidé (le 21 juin 2017) de rompre la chaîne de succession chez les Al Saoud, qui jusque-là, voulait que le trône passe d’un frère à l’autre.

Pour l’éditorialiste, MBS est un fin connaisseur des arcanes de la grande famille royale saoudienne. Dès son jeune âge, il a pris en charge le cabinet de son père, alors que ce dernier était le gouverneur de l'émirat de Riyad (un poste qu’il a occupé pendant 40 ans). 

Il a eu donc tout le loisir de connaître les subtilités de la gestion des affaires de cette très vaste famille, composée de quelque 1200 membres. Mohammed Ben Salmane a ainsi hérité de l'autorité morale de son père, «correcteur des princes» et l’a pleinement assumée dès qu’il est devenu prince héritier. «Il a écarté tous les corrompus au sein de la famille royale et leur a imposé des arrangements financiers grâce auxquels il a recouvert une partie des fonds détournés», écrit l’éditorialiste.

MBS s’est également attelé à réformer les fondements de l'alliance entre le fondateur de la dynastie, Saoud Al-Kabir, et Muhammad Ben Abdelwahab, ce pacte entre la plume des salafistes et l'épée des Al Saoud, qui conditionne le fonctionnement et le partage des pouvoirs en Arabie saoudite. En effet, le mufti qui, jusqu’à l’avènement de MBS, s'asseyait à la droite du roi d'Arabie, durant les cérémonies officielles, a dû céder sa place au prince héritier, qui devait jusqu’alors se contenter d’une place à la gauche du souverain.

MBS a également remis à sa juste place le rôle de la police religieuse, qui sévissait dans les rues du royaume. Les châtiments corporels infligés aux Saoudiennes qui ne portent pas le voile intégrale, le Niqab, sont désormais révolus. Le prince héritier a ainsi changé le paysage des villes saoudiennes. «Grâce à sa politique de la préférence nationale, il a imposé le recrutement de femmes saoudiennes à des salaires attractifs, alors que l’institution religieuse perdait de son influence», écrit Abou Wael Al Riffi. 

Soutenu par son père, Mohammed Ben Salmane est aujourd'hui aux commandes de l'Arabie saoudite. «Tous ses projets sont menés de manière harmonieuse, avec l’adhésion d’une large partie des Saoudiens, mobilisés pour construire une société non-rentière qui aspire à la modernité en bousculant le conservatisme social, établi par la réalité tribale et le pouvoir religieux sous-développé, qui regarde le XXe siècle avec des concepts désuets», souligne l’éditorialiste.

Le seul dossier dérangeant qui a perturbé les projets de Mohammed Ben Salmane est l'assassinat de Jamal Khashoggi, avec son cortège de faits incompréhensibles. «Le premier est le choix pour cette opération d'un Etat hostile aux grandes ambitions saoudiennes, dirigé par Erdogan qui rêve de reconquérir la grandeur de l’empire Ottoman. Un choix qui a placé l'Arabie saoudite dans une position très embarrassante et a permis aux opposants de MBS de le présenter à l'opinion publique internationale et régionale comme un imprudent, un sanguinaire et un néophyte dans la gestion des affaires du royaume», peut-on lire dans cet éditorial.

L’exécution de l'opération au consulat saoudien à Istanbul, sans tenir compte du fait qu'elle soit sous l’étroite surveillance des renseignements turcs –alors que tous les spécialistes considèrent le consulat comme un lieu peu sûr pour ce type d'opération– est intriguant, soutient Abou Wael Al-Riffi.

Pour l’auteur, l'affaiblissement diplomatique de Mohammed Ben Salmane –sous la pression de la campagne de dénigrement internationale menée par le Qatar, la Turquie et tous leurs relais médiatiques– a rendu MBS docile face à l'administration Trump, qui en a profité pour accélérer la normalisation avec Israël. Cette pression, MBS n’a pu s’en débarrasser qu'en poussant les Emirats arabes unis et le Bahreïn à une normalisation avec l’Etat hébreu.

Mohammed Ben Salmane, selon les sources de l’éditorialiste, dispose d’un atout dans cette affaire Khashoggi qu'il peut révéler au moment opportun. Une carte secrète détenue par le prince Turki Ben Faisal Ben Abdulaziz, le deuxième chef du renseignement général saoudien, qui a succédé à son oncle Kamal Adham.

«Si Ben Salmane utilise cette carte, il va pouvoir renverser la vapeur et tourner l’opinion publique en sa faveur. Cette révélation mettra dans l’embarras toutes les forces qui instrumentalisent l’affaire Khashoggi», affirme l'éditorialiste. Et de poursuivre: «tous les pays de la planète traitent leurs dissidents d’une manière peu orthodoxe, qui peut conduire à l'assassinat, afin de protéger leur sécurité nationale». «Le fera-t-il un jour?», s'interroge-t-il, avant de conclure que «l’avenir nous le dira».

Par Le360
Le 05/10/2020 à 17h32