L'Union chrétienne-sociale, "parti frère" de la CDU de Mme Merkel qui domine la région depuis les années 1950, arrive certes en tête aux régionales, mais son score d'environ 37% a tout d'une débâcle politique, selon les projections corrigées à 18H30 GMT des chaînes publiques ARD et ZDF qui lui accordaient deux point de moins plus tôt dans la soirée. Elle perd une dizaine de points par rapport à 2013, sa majorité absolue, et va être obligée de chercher une alliance pour gouverner ce Land parmi les plus riches d'Allemagne. Autre mauvaise nouvelle pour Mme Merkel, l'autre membre de sa coalition gouvernementale, les sociaux-démocrates du SPD, subit une gifle (9,5% des voix).
Les gagnants du scrutin sont les Verts, 2e avec 17,8%, et l'Alternative pour l'Allemagne (AfD), parti d'extrême droite anti-Merkel et anti-migrant (10,6%) qui se retrouve au coude-à-coude avec les Freie Wähler, des conservateurs bavarois indépendants (11,6%). Les Libéraux du FDP (5%) ferment la marche. Ces résultats font monter la pression sur la chancelière dont le parti, la CDU, fera face à un scrutin ardu le 28 octobre en Hesse, Land que les conservateurs dirigent en coalition avec les écologistes.
"C'est un avertissement pour la CDU et c'est pourquoi notre priorité des deux semaines à venir doit être la Hesse", a dit dimanche la secrétaire-générale du parti Annegret Kramp-Karrenbauer, à la veille d'une réunion de la direction des chrétiens-démocrates dont Angela Merkel. D'autant que ces élections régionales interviennent avant un vote militant à la CDU en décembre pour reconduire la chancelière à la tête du parti.
Au pouvoir dans la première économie européenne depuis 13 ans, Angela Merkel a connu une année très difficile, conséquence politique de sa décision de 2015 d'ouvrir l'Allemagne à plus d'un million de demandeurs d'asile. Même si elle a considérablement resserré l'accueil des migrants, la chancelière a été handicapée par l'essor de l'extrême droite aux législatives de septembre 2017. Elle a dû batailler six mois pour former une coalition gouvernementale, finalement avec des sociaux-démocrates récalcitrants.
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Puis, durant l'été 2018, la CSU bavaroise s'est rebellée, conduite par son chef, le ministre de l'Intérieur Horst Seehofer, qui a risqué à deux reprises de faire tomber le gouvernement en poussant des thèmes chers à l'AfD. La cheffe du SPD, Andrea Nahles, et la secrétaire générale de la CDU ont d'ailleurs relevé dimanche que ces crises avaient contribué à la sanction bavaroise. "C'est indiscutable", a jugé Annegret Kramp-Karrenbauer. Mme Nahles a elle pointé du doigt "la mauvaise performance de la grande coalition à Berlin".
L'AfD s'est de son côté félicitée des résultats en Bavière. "Celui qui a voté AfD en Bavière a dit aussi +Merkel doit partir+", a lâché une de ses dirigeantes, Alice Weidel, "libérez la voie pour des élections anticipées !". Elle a reçu le soutien appuyé du ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini, qui a proclamé par communiqué une "défaite historique des chrétiens-démocrates et des socialistes" avant de lancer un "Au revoir Merkel".
Les sondages des derniers mois mettent en évidence le désamour croissant des Allemands pour cette coalition CDU/CSU-SPD au pouvoir qui navigue de crise en dispute depuis sa formation en mars. Le baromètre publié dimanche par le quotidien Bild crédite les conservateurs d'un piètre 26%. Le SPD végète à 17%, au même niveau que des Verts en pleine confiance et juste devant l'extrême droite (15%). Illustrant cette recomposition du paysage politique, la stratégie droitière déployée par la CSU pour regagner les voix conquises par l'AfD n'a pas eu l'effet escompté. Selon les enquêtes d'opinion, les citoyens tentés par l'extrême droite n'ont pas été convaincus de revenir dans le giron conservateur, et d'autres, plus modérés, se sont tournés vers les Verts. "Celui qui court derrière l'extrême droite perd", a noté non sans satisfaction, la co-dirigeante des Verts Annalena Baerbock.
Dernier problème pour la chancelière, les intentions du SPD à moyen terme. Depuis le début de la législature, des voix y réclament bruyamment une sortie du gouvernement et une cure de jouvence dans l'opposition. Un tel scénario, rendrait probable un scrutin anticipé et un départ de Mme Merkel avant la fin de son mandat en 2021.