La capitale néerlandaise accueillera l'Agence européenne du médicament (EMA) et la capitale française l'Autorité bancaire européenne (EBA), contraintes toutes deux de plier bagage après des années passées dans le quartier d'affaires londonien de Canary Wharf.
"C'est la reconnaissance de l'attractivité et de l'engagement européen de la France. Heureux et fier pour notre pays", a immédiatement twitté le président français Emmanuel Macron.
Pour l'EMA comme pour l'EBA, le choix final s'est joué par tirage au sort, les deux villes finalistes ayant dans chaque cas enregistré le même nombre de voix lors du dernier tour de scrutin: Amsterdam contre Milan pour l'Agence du médicament, Paris contre Dublin pour l'Autorité bancaire.
"C'était un grand bol transparent" avec deux boules. "C'est à moi qu'est revenue la responsabilité du tirage", a raconté Matti Maasikas, ministre estonien des Affaires européennes, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE.
Conséquence logique de la décision du Royaume-Uni de quitter l'UE, ces deux déménagements ont aiguisé l'appétit des 27 pays qui en resteront membres, intéressés par l'accueil de ces agences, de leurs employés et de leurs familles, avec toutes les retombées économiques associées.
Pour éviter que cette concurrence ne compromette l'unité que l'UE s'efforce d'afficher depuis l'annonce du Brexit, les 27 avaient imaginé une procédure de vote très complexe.
En coulisses, "il y a eu des marchandages étonnants", selon une source diplomatique, les différents gouvernements tentant de s'assurer le soutien d'autres pays lors du vote de lundi, organisé à bulletins secrets en marge d'une réunion ministérielle à Bruxelles.
Au total, 19 villes étaient proposées pour accueillir l'EMA et ses quelque 900 employés, chargés d'évaluer et de superviser les médicaments.
"C'est une bonne nouvelle pour tous les patients en Europe et aussi pour les Pays-Bas", a réagi sur Facebook le Premier ministre néerlandais Mark Rutte après la victoire d'Amsterdam.
Les candidatures de Bonn et Lille ont pour leur part été éliminées dès le premier tour, tout comme Barcelone, les conservateurs du Parti populaire au pouvoir en Espagne et les indépendantistes catalans se renvoyant la responsabilité de l'élimination de la capitale catalane.
En France, le mauvais résultat lillois a déclenché des critiques contre Emmanuel Macron, auquel la maire socialiste de la ville, Martine Aubry, et le président de la région Xavier Bertrand (droite) ont reproché un "soutien tardif".
Mais Paris a remporté l'autre agence mise en jeu, l'EBA, et ses quelque 170 employés.
"C'est sur la capacité à assurer la continuité des agences nous avons travaillé pour notre candidature", a expliqué la ministre française des Affaires européennes, Nathalie Loiseau .
La liste des postulants était moins longue pour cette institution, avec huit candidats, dont le finaliste malheureux Dublin, qui a salué la victoire de Paris, ou Francfort, un candidat sérieux éliminé au deuxième tour.
La Commission européenne avait livré fin septembre une évaluation des candidatures, basée sur des critères comme l'accessibilité des sites ou les perspectives d'emploi pour les conjoints.
Mais elle s'était bien gardée de formuler des préférences, et les Etats membres étaient libres de voter comme ils l'entendaient.
Les candidats avaient mené d'intenses campagnes de communication pour vanter les mérites de leurs villes postulantes. Peu d'éléments ont en revanche filtré sur les "marchandages" plus discrets entre capitales.
"Nous pensons qu'au moins une des agences devrait aller dans un Etat membre récent", avait estimé lundi matin le secrétaire d'Etat tchèque aux Affaires européennes Ales Chmelar, reflétant le point de vue des pays d'Europe centrale.
La perspective d'un choix politique inquiétait les personnels des agences en question. L'Agence du médicament avait ainsi prévenu dans un rapport qu'un mauvais choix pourrait se traduire par "un taux de rétention du personnel très en dessous de 30%", qui menacerait son fonctionnement.
Le vote complexe qui avait été prévu rendait les pronostics difficiles.
"Quel que soit le résultat, le véritable vainqueur du vote est l'UE à 27", avait estimé avant le vote le président du Conseil européen Donald Tusk, estimant que cette décision démontrerait la bonne préparation des Européens avant l'échéance du Brexit, prévue fin mars 2019.
Le déménagement de ces agences est "le premier résultat visible" du Brexit, a réagi de son côté la Commission européenne après le vote.