Cette accélération, à l'approche du sommet européen des 23-24 juin qui devra décider à l'unanimité et surmonter les réticences de certains pays membres, intervient au moment où l'armée ukrainienne est à la peine face à la puissance de feu russe dans la région orientale du Donbass.
«Nous savons tous que les Ukrainiens sont prêts à mourir pour leurs aspirations européennes. Nous voulons qu'ils vivent avec nous, pour le rêve européen», a déclaré à Bruxelles la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, vêtue de bleu et de jaune, les couleurs de l'Ukraine.
«La Commission recommande au Conseil, premièrement, de donner à l'Ukraine une perspective européenne et, deuxièmement, de lui accorder le statut de candidat», a-t-elle ajouté, au lendemain de la visite à Kiev des dirigeants de l'Allemagne, de la France et de l'Italie, les trois premières puissances européennes qui ont délivré le même message.
Dans sa désormais traditionnelle intervention vidéo du soir, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a réagi en déclarant qu'il s'agissait d'un «acquis historique».
«Il nous reste d’attendre la décision du Conseil européen la semaine prochaine. L’Ukraine mérite ces nouvelles positives», a-t-il ajouté.
Vendredi, c'était au tour du Premier ministre britannique Boris Johnson - dont le pays n'est plus membre de l'UE - de revenir à Kiev, où il a annoncé un programme de formation des forces ukrainiennes.
Il s'est promené sur la place Saint-Michel avec le président Zelensky puis a visité une exposition de matériel militaire saisi à l'armée russe. Rencontrant des soldats ukrainiens, il leur a lancé «Gloire à l'Ukraine», dans leur langue, puis: «Je suis Boris Johnson, de Londres et je veux que vous sachiez que nous vous soutenons».
Réplique de Moscou
S'exprimant au forum économique de Saint-Pétersbourg, le président Vladimir Poutine a affirmé vendredi que la Russie n'avait «rien contre» une adhésion de l'Ukraine à l'UE, mais a affirmé que «l'Ukraine va se transformer en semi-colonie» des pays occidentaux.
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La porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova a été plus directe: «Depuis des années, la communauté occidentale manipule cette histoire d'engagement de l'Ukraine dans leurs structures d'intégration, et depuis l'Ukraine va de plus en plus mal», a-t-elle dit aux agences russes.
L'examen express de la candidature de Kiev, déposée en février, est d'une rapidité inédite, justifiée par la guerre lancée le 24 février par Vladimir Poutine.
L'Autriche, de son côté, a invité ses partenaires de l'UE à envoyer également «des signaux clairs aux pays des Balkans occidentaux lors du sommet, en particulier à la Macédoine du Nord, à l'Albanie et à la Bosnie-Herzégovine», soulignant «le grand potentiel de déstabilisation de la Russie non seulement à l’est de l'Europe, mais aussi au sud-est», par la voix de son ministre des Affaires étrangères Alexander Schallenberg.
Lors de cette semaine décisive dans sa lutte d'influence avec l'Occident, Moscou a adjoint le geste à la parole, coupant progressivement mais massivement ses livraisons de gaz à l'Europe occidentale qui en est très dépendante.
Le gestionnaire du réseau gazier français, GRTgaz, a annoncé vendredi ne plus recevoir de gaz russe par gazoduc depuis le 15 juin, avec «l'interruption du flux physique entre la France et l'Allemagne».
Le géant russe Gazprom a considérablement réduit ces derniers jours ses livraisons notamment vers l'Allemagne via le gazoduc Nord Stream 1, suscitant une explosion des prix.
En Italie, Gazprom livrera seulement 50% du gaz demandé vendredi par Eni, a annoncé le groupe italien.
Le chef du gouvernement italien Mario Draghi a dénoncé jeudi à Kiev une «utilisation politique du gaz».
«Il ne faut pas se faire d'illusions, nous sommes dans une épreuve de force avec Poutine», a dit Robert Habeck, le ministre allemand de l'Economie et du Climat. «C'est comme ça que les dictateurs et les despotes agissent.»
Le président américain Joe Biden, dont le pays est un fournisseur possible de gaz liquéfié GNL à l'Europe, a accusé la Russie vendredi d'alimenter avec sa guerre contre l'Ukraine une «crise énergétique mondiale».
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«Nos actions pour libérer le Donbass n'ont rien à voir avec ça», a rétorqué le président russe Vladimir Poutine au forum économique de Saint-Pétersbourg. «C'est le résultat des erreurs systémiques de l'administration américaine et de la bureaucratie européenne».
Drame humanitaire
Sur le front des combats, les forces ukrainiennes restent en difficulté dans le Donbass, cette région de l'est du pays partiellement contrôlée par des séparatistes prorusses depuis 2014, et que Moscou s'est fixé pour objectif de conquérir.
L'ONU a souligné vendredi que «la situation humanitaire dans toute l'Ukraine, en particulier dans l'est du Donbass, est extrêmement alarmante et continue de se détériorer rapidement».
Les combats se concentrent depuis plusieurs semaines sur Severodonetsk et Lyssytchansk, deux villes clefs pour le contrôle du Donbass, soumises à des bombardements constants.
La grande usine chimique Azot de Severodonetsk, où environ 500 civils ont trouvé refuge aux côtés de militaires ukrainiens, est impossible à évacuer sans «cessez-le-feu complet» en raison de «bombardements et combats constants», a déclaré le gouverneur de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï.
A Lyssytchansk, une frappe de missile sur la «Maison de la Culture», où étaient réfugiés des habitants de la ville, a fait trois morts et sept blessés, a indiqué vendredi le service de presse du président ukrainien.
Une frappe russe vendredi matin à Mykolaïv, dans le sud de l'Ukraine, a en outre fait au moins deux morts et vingt blessés, selon un bilan communiqué par le gouverneur de la région.
L'armée russe a affirmé par ailleurs qu'un peu moins de 7.000 «mercenaires étrangers», issus de 64 pays, étaient arrivés en Ukraine depuis le début du conflit et que près de 2.000 d'entre eux auraient été tués.
Par ailleurs, la marine ukrainienne a affirmé vendredi avoir détruit un remorqueur russe, le «Vasiliy Bekh», qui transportait des armes et des munitions en mer Noire.
La Russie a «déjà perdu sur le plan stratégique» sa guerre en Ukraine et «ne prendra jamais le contrôle» du pays, a estimé vendredi le chef d'état-major des armées britannique, l'amiral Tony Radakin. Selon lui, «le président Poutine a utilisé 25% de la puissance de son armée pour engranger des gains territoriaux minuscules».
Par ailleurs l'Ukraine, qui a remporté cette année le concours de l'Eurovision, a dénoncé vendredi la décision de lui retirer l'accueil de la prochaine édition pour des raisons de sécurité.
«L'Ukraine n'est pas d'accord avec la nature de la décision prise par l'Union Européenne de Radio-Télévision» (UER), a déclaré le ministre de la Culture Oleksandre Tkatchenko. «Nous réclamons des négociations supplémentaires sur l'accueil de l'Eurovision-2023 en Ukraine».