Ce nouvel attentat-suicide, le deuxième en 10 jours dans le nord du pays, illustre la capacité de nuisance toujours considérable de Boko Haram qui, bien qu'affaibli par une opération militaire régionale, a multiplié les violences ces dernières semaines dans la région du lac Tchad.
Le président camerounais Paul Biya a condamné dans un communiqué des actes "lâches et ignobles perpétrés contre des populations innocentes". Il a appelé la population à la "vigilance" et à une "collaboration étroite avec les forces de sécurité", promettant "la mise hors d?état de nuire de ces criminels sanguinaires". Le double attentat n'avait pas été revendiqué mercredi soir.
Les "deux terroristes se sont fait exploser aux environs de 14H30 (13H30 GMT) au quartier Barmaré et à l?entrée du marché central de la ville de Maroua", affirme la présidence, donnant un bilan de 11 morts, plus les deux kamikazes, et 32 blessés.
Plus tôt, le gouverneur de la région, Midjiyawa Bakari, avait affirmé à l'AFP que deux jeunes filles âgées "de moins de 15 ans" s'étaient fait exploser au marché central de la ville et dans un quartier voisin majoritairement peuplé par des Haoussas.
Une autre source proche des autorités locales avait confirmé que "deux fillettes qui faisaient de la mendicité" s'étaient "fait exploser".
“Panique totale”
Un journaliste camerounais présent dans la ville, a décrit une "panique totale" dans la ville lorsque les explosions ont retenti.
"Il y avait des corps déchiquetés, des bouts de membres partout par terre, c'est terrible (...) Les gens n'ont jamais connu ça ici à Maroua", jusque-là épargnée, a-t-il témoigné, précisant que de nombreux blessés l'étaient "très gravement".
Il s'agit du deuxième attentat-suicide au Cameroun en 10 jours. Le 12 juillet, deux femmes kamikazes s'étaient fait exploser à Fotokol (nord), localité frontalière du Nigeria, tuant 11 personnes dont 10 civils et un soldat tchadien. Les autorités de la région avaient dans la foulée interdit le port du voile islamique intégral par mesure de sécurité.
De telles attaques-suicides en territoire camerounais sont sans précédent, même si depuis deux ans, les islamistes nigérians ont enchaîné raids meurtriers et enlèvements dans l'Extrême-Nord.
Maroua, ville commerçante jadis animée et majoritairement peuplée de musulmans, vivait déjà dans la peur et sous étroite surveillance militaire depuis des mois. La circulation des deux-roues, connus pour être le moyen de transport privilégié par les islamistes, était notamment interdite dès la tombée de la nuit.
Des sources sécuritaires avaient affirmé à l'AFP que de nombreux sympathisants, mais aussi des membres du groupe islamiste avaient infiltré la ville et fournissaient des renseignements à leur chefs.
“Impossible de les repérer"
"On se méfie de tout le monde. Ce sont des gens comme vous et moi, ça peut être un chauffeur de taxi ou un passant, et il est quasiment impossible de les repérer", soulignait ainsi récemment un officier camerounais.
Le Cameroun participe avec plusieurs pays voisins (Nigeria, Tchad, Niger) à une coalition militaire régionale mise sur pied début 2015 contre Boko Haram.
Bien qu'affaiblis, les insurgés ont multiplié les violences dans la région du lac Tchad et notamment au Nigeria, où trois policiers ont été tués lundi par l'explosion d'une bombe à un check-point lors d'une fouille près de Damaturu (nord-est).
Depuis la prise de fonction du nouveau président nigérian Muhammadu Buhari le 29 mai, qui a fait de la lutte contre Boko Haram une priorité, quelque 570 personnes ont péri au Nigeria dans les violences islamistes, selon un comptage de l'AFP.
Les pays voisins ne sont pas épargnés. N'Djamena, la capitale tchadienne, a été frappée à deux reprises en moins d'un mois, et le dernier attentat-suicide avait fait 15 morts et 80 blessés le 11 juillet sur le marché central.