Bien qu'il soit rare que cette institution réagisse à une campagne médiatique enragée, la Banque mondiale vient d'adresser une sévère mise au point au régime algérien. Mais il faut bien reconnaître que l’hystérie du régime algérien dépasse actuellement tout ce qui a pu être constaté jusqu'ici.
Après la diffusion de son dernier «Rapport de suivi de la situation économique en Algérie», la Banque mondiale a en effet publié hier, jeudi 6 janvier 2022, une mise au point qui prend froidement le contrepied des réactions hystériques et de fumeuses théories du complot qui ont pu être avancées par Alger et ses relais médiatiques.
L’institution financière internationale dont le siège est à Washington y fustige «des informations factuellement inexactes sur le contenu du rapport, qui a été préparé avec la plus grande rigueur, ainsi que sur ses auteurs, une équipe d’économistes travaillant sur la région du Maghreb».
La junte s’en était en effet pris dans une dépêche d’anthologie de son organe officiel de propagande, APS, à l’un des auteurs de ce rapport, le Tunisien Farid Belhadj, qui serait «un ami proche du prince du Maroc, Moulay Rachid, et de nombreux ministres marocains».
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Dans sa mise au point, la Banque mondiale explique que son dernier rapport sur l’Algérie, «qui fait l'objet d'un examen de qualité approfondi avant sa publication, est basé exclusivement sur des données publiques, dont la référence figure dans le document, ou sur des données fournies par les autorités des pays membres».
En d’autres termes, les auteurs de ce rapport se sont appuyés sur les données communiquées par le régime algérien lui-même. D’ailleurs la gêne du Premier ministre algérien et ministre des Finances, Aïmene Benabderrahmane, a pu être constatée, quand il a dénoncé le caractère excessif de la réaction des médias de son pays, suite à la publication de ce rapport de la Banque mondiale.
«Certains médias ont exagéré dans l’analyse de la teneur» du rapport de la Banque mondiale, en le présentant comme un «document uniquement négatif», a en effet déclaré le Premier ministre algérien. Une position compréhensible, car la Banque mondiale n’a fait que reprendre des données que son département lui avaient communiquées. Aïmene Benabderrahmane est d’ailleurs nommément remercié dans ce rapport, qui a fait perdre leurs nerfs à la junte.
Dans sa mise au point, la Banque mondiale insiste sur le caractère public des données qui ont pu être exploitées dans ce document, et affirme que «les conclusions du rapport sont cohérentes avec les données officielles disponibles à la date de clôture des données du rapport (le 1er novembre 2021), dont la plupart sont présentées dans la Note de Conjoncture de la Banque d'Algérie publiée le 22 décembre 2021».
La junte va-t-elle, au regard de cette mise au point aux termes limpides, décider de limoger le Premier ministre algérien et le gouverneur de la Banque d’Algérie, qui se sont rendus coupables d'avoir livré ces données à la Banque mondiale?
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Cette mise au point de la Banque mondiale n’épargne d'ailleurs pas la campagne médiatique enragée qui s'en est suivie, suite à la dépêche vengeresse d'APS: «nous avons noté avec regret que certains articles [dans les médias algériens, Ndlr] ont adopté un langage qui peut avoir dépassé les pensées de leurs auteurs anonymes. Tout inacceptables qu’ils soient, il ne sera pas répondu à ces propos, tant nous considérons qu’ils ne sauraient porter argument ni ne constituent un élément de débat», indique froidement l'institution financière internationale.
Après avoir rappelé que le groupe de la Banque mondiale est de fait, une institution internationale aux visées de développement, composée de plusieurs pays membres, qui s’est fixé comme «double objectif de mettre fin à l’extrême pauvreté et de promouvoir une prospérité partagée», cette mise au point écrite à Washington rappelle le fait que «le personnel et la direction du Groupe de la Banque mondiale servent uniquement les objectifs de l'institution».
Une question demeure en suspens: il reste à savoir comment la junte va, maintenant, réagir à cette mise au point de la Banque mondiale, qui vient de donner un écho planétaire au spectacle burlesque d’un régime qui sait très bien se couvrir, tout seul, de ridicule.