Car au-delà des gestes de bonne volonté et de bonnes paroles, rien ne dit que la Chine va fondamentalement changer de modus opérandi et ils devront être suivis de mesures concrètes si le président chinois entend en tirer bénéfice face au ralentissement de l’économie du pays et la fuite de capitaux étrangers, disent-ils.
Le président chinois a certes bénéficié d’une tribune de prestige à San Francisco, où il a participé au sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec). Associée à plusieurs accords avec les Etats-Unis dont un sur le rétablissement des communications militaires, c’est la marque d’une visite réussie.
«Pour la Chine, la capacité de Xi à obtenir une plateforme de premier plan à San Francisco pour s’entretenir avec des chefs d’entreprises américains est un succès en soi», estime Nathaniel Sher, analyste chez Carnegie China.
«Partenaire et ami»
Le dirigeant chinois a multiplié les courtoisies. Il s’est dit prêt «à être un partenaire et un ami des Etats-Unis», lors d’un dîner avec des patrons mercredi soir, dont Tim Cook d’Apple, Laurence Fink de BlackRock ou Albert Bourla de Pfizer.
Il s’est également entretenu avec l’homme le plus riche du monde Elon Musk. Et il a laissé entrevoir un retour prochain des pandas aux Etats-Unis, en «émissaires de l’amitié».
Dans un discours écrit jeudi, M. Xi a encore invité les entreprises à investir et à renforcer leur présence en Chine, promettant des mesures «réconfortantes» pour «faciliter les investissements et les activités des entreprises étrangères en Chine».
Mais les investisseurs américains risquent de se montrer prudents, alors que la deuxième économie mondiale ralentit et que la confiance s’affaiblit.
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Le dirigeant chinois n’a pas participé en personne au sommet parallèle des PDG de l’Apec, constate Trivium China dans sa lettre d’information.
Des lois répressives, des raids de police visant des multinationales, des détentions abusives et des pratiques anti-commerciales «ont tous un effet dissuasif sur les investissements étrangers», rappelle M. Sher.
Or, les multinationales «veulent avant tout plus de prévisibilité légale et réglementaire» en Chine, et «pas seulement des déclarations d’intentions sur un échange gagnant-gagnant», dit-il.
«Tournant potentiel»
Sur le plan politique, le tête-à-tête mercredi de plus de quatre heures avec Joe Biden représente un succès pour Xi Jinping, selon les observateurs.
Les Etats-Unis et la Chine ont l’objectif commun de stabiliser leurs relations, a indiqué l’ambassadeur australien aux Etats-Unis, Kevin Rudd.
«Cela signifie rouvrir d’anciennes lignes de communication politique, diplomatique et, à présent, militaire», a-t-il déclaré à des journalistes en marge du sommet de l’Apec.
«En conclusion, c’est à l’usage qu’on pourra juger des résultats. Le cadre est là, il est mesurable. Qu’en sera-t-il dans la pratique?», a ajouté l’ancien Premier ministre australien, en soulignant par exemple que le rétablissement des communications entre militaires n’est «qu’un premier pas».
L’incertitude demeure pour connaître les intentions de la Chine concernant Taïwan, dont Pékin revendique la souveraineté, et pour savoir si l’armée chinoise changera de comportement.
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Pour Zheng Wang, de l’université de Seton Hall, cette première visite de Xi aux Etats-Unis depuis six ans et le sommet avec Joe Biden représentent «un tournant potentiel» dans les relations bilatérales après des années de tensions.
«Des relations stables et constructives entre les Etats-Unis et la Chine sont nécessaires pour les deux parties», dit-il.
Mais le président Xi aurait pu aller «beaucoup plus loin» pour rassurer les Etats-Unis et la communauté internationale sur les intentions de la Chine, souligne M. Sher.
Et si le renouvellement en Chine «implique un rejet de l’ordre international existant, rien de ce que les dirigeants chinois diront dans les forums internationaux n’empêchera les Etats-Unis et leurs partenaires de chercher à entraver l’essor de Pékin», conclut-il.