La majorité séparatiste du Parlement régional catalan a aussi annoncé la tenue d'une séance parlementaire jeudi, à la veille de la mise sous tutelle de la région qui doit être votée vendredi par le Sénat espagnol.
Cette séance, qui pourra aussi se prolonger jusqu'à vendredi, aura pour but d'analyser "l'agression institutionnelle" dont les indépendantistes accusent le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy, a précisé le chef de la coalition sécessionniste "Ensemble pour le oui" au Parlement, Lluis Corominas.
En cas de mise en œuvre de ces mesures drastiques de la part de Madrid, les séparatistes ont menacé de faire voter une déclaration unilatérale d'indépendance au Parlement catalan.
L'aile la plus radicale des indépendantistes a promis d'orchestrer une campagne de "désobéissance massive" en réponse aux mesures en préparation par Madrid.
La Candidature d'unité populaire (CUP), petit parti d'extrême gauche et allié-clef de la coalition du président séparatiste catalan Carles Puigdemont, a dénoncé "la plus grande agression" contre la Catalogne depuis la dictature de Francisco Franco (1939-1975), qui lui avait retiré son autonomie.
Cette "agression" déclenchera une riposte, prévient la CUP dans un communiqué qui annonce une "réponse sous forme de désobéissance massive de la part des citoyens".
Les pompiers membres de l'Assemblée nationale catalane (ANC, indépendantistes), environ la moitié du corps, ont assuré lundi qu'ils ne reconnaîtraient d'autre autorité que celle de leurs "président, gouvernement et Parlement".
"Si une route est bloquée (par des manifestants) et que l'on nous demande de la débloquer, il est probable que nous ne répondions pas", a expliqué un membre de ce collectif à l'AFP sous couvert de l'anonymat.
Des collectifs d'étudiants ont par ailleurs aussi appelé à une grève dès jeudi à Barcelone.
Samedi à Madrid, le Conseil des ministres a décidé de déclencher l'application de l'article 155 de la Constitution, qui doit encore être autorisée par le Sénat où le parti de M. Rajoy a la majorité absolue.
L'article 155 permet de mettre en œuvre des mesures drastiques de reprise de contrôle de la région: l'Exécutif indépendantiste serait limogé, le Parlement et les médias publics catalans placés sous tutelle.
Dans les faits, les mesures proposées par Mariano Rajoy déboucheront sur une suspension de facto de l'autonomie de la Catalogne, une région qui tient énormément à sa culture, sa langue et son autonomie reconquise après la mort de Franco.
Les conservateurs espagnols soulignent qu'il s'agit de "restaurer la démocratie" en Catalogne, où la population est profondément divisée sur l'indépendance, presque à parts égales selon les sondages, et d'organiser des élections dans un délai de six mois.
Mais pour les indépendantistes, l'État espagnol fera ainsi preuve "d'une violence institutionnelle sans précédent", et il faudra "défendre de manière pacifique" les institutions de Catalogne, une région de 7,5 millions d'habitants au cœur de l'Europe méditerranéenne, qui représente 19% du PIB de l'Espagne.
À Madrid, la vice-présidente du gouvernement espagnol Soraya Saenz de Santamaria a de son côté admis qu'aucun rapprochement ou contact n'avait eu lieu depuis l'annonce samedi des mesures envisagées par Madrid.
Elle a rappelé que le président Carles Puigdemont pouvait s'il le souhaitait s'exprimer devant le Sénat, qui siègera à partir de mardi.
Une fois que le Sénat aura autorisé la suspension d'autonomie de sa région, M. Puigdemont n'aura plus aucun pouvoir, a-t-elle prévenu.
"Il n'aura plus de signature, il ne pourra plus prendre de décisions valables, il ne touchera plus son salaire", a-t-elle ajouté, en insistant sur le fait qu'il ne pourra plus jouir d'aucun avantage assorti à sa fonction.
Le président a des gardes du corps, un appartement à Barcelone, dans le palais de la Generalitat, et des voitures de fonction.
La vice-présidente n'a cependant pas précisé quelles mesures concrètes prendra le gouvernement si Carles Puigdemont, qui dirige la Catalogne depuis début 2016, désobéit.
Seule l'organisation par lui-même d'élections régionales pourrait mettre fin au déclenchement de la mise sous tutelle, d'après les conservateurs et les socialistes qui l'implorent toujours de céder.
Mais le porte-parole du gouvernement catalan Jordi Turull a déclaré dimanche qu'il ne l'envisageait pas, faisant craindre une escalade d'agitation-répression.