L'arrêt de la Cour suprême replace la question catalane au centre du débat politique à moins d'un mois des élections législatives du 10 novembre. L'ancien vice-président régional catalan Oriol Junqueras a écopé de 13 ans de prison, la plus lourde peine des douze indépendantistes jugés de février à juin par la haute instance judiciaire du pays, pour sédition et détournements de fonds publics.
Les juges ont donc écarté les accusations de rébellion émises par le parquet qui avait requis jusqu'à 25 ans de prison à l'encontre de Junqueras, numéro un du parti Gauche républicaine de Catalogne (ERC), qui était le principal accusé en l'absence de l'ex-président catalan Carles Puigdemont, qui a fui en Belgique. Huit autres indépendantistes ont été condamnés à des peines allant de 9 à 12 ans de prison pour sédition, et certains également pour détournements de fonds publics.
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Figurent parmi eux l'ancienne présidente du parlement catalan, Carmen Forcadell, les dirigeants des puissantes associations indépendantistes ANC et Omnium Cultural, Jordi Sanchez et Jordi Cuixart et cinq anciens "ministres" régionaux. Ces neuf indépendantistes étaient en détention provisoire, pour certains depuis deux ans. Trois autres anciens membres du gouvernement catalan, qui étaient en liberté conditionnelle, ont eux été condamnés à des amendes pour désobéissance.
Ces douze indépendantistes ont été jugés pour avoir organisé le 1er octobre 2017, en dépit de l'interdiction de la justice, un référendum d'autodétermination, émaillé de violences policières, et pour la proclamation le 27 du même mois d'une vaine déclaration d'indépendance votée par le parlement catalan.
Cette tentative de sécession de la Catalogne, riche région du nord-est de l'Espagne, avait été la pire crise politique qu'ait connue le pays depuis la fin de la dictature franquiste en 1975. Condition indispensable de la rébellion -- qui est un délit contre la Constitution sévèrement puni --, l'existence ou non d'un soulèvement violent avait été la question centrale du procès historique de ces indépendantistes.
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Le parquet n'avait pas hésité à qualifier les évènements de 2017 de "coup d'État" alors que la défense rétorquait que la violence était venue quasi-exclusivement de la police le jour du référendum. Insistant sur le caractère pacifique de leur mouvement, les accusés avaient assuré pour la plupart qu'ils recommenceraient s'ils le pouvaient. En Catalogne où, depuis 2010, l'indépendantisme mobilise de vastes manifestations, les forces de l'ordre se préparent à un regain de tension.
Divisés sur le plan politique, les partis séparatistes, qui contrôlent toujours le gouvernement régional, ont fait front uni en appelant à la "désobéissance civile" en cas de condamnation par la Cour suprême. Des blocages de routes, de grandes manifestations et une grève sont attendus.
La situation s'est déjà tendue dans la région après le placement en détention provisoire à la fin septembre de sept militants indépendantistes radicaux soupçonnés de préparer des actions violentes. Les partis indépendantistes ont réagi en adoptant au parlement régional plusieurs motions défiant l'Etat espagnol.
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Déjà en campagne électorale, le chef du gouvernement socialiste sortant, Pedro Sanchez, les a prévenus qu'il n'hésiterait pas à prendre des mesures extraordinaires pour garantir la sécurité dans la région si cela s'avérait nécessaire, même à suspendre son autonomie, comme en octobre 2017 après la tentative de sécession.