Après deux mois d'enquête, la Chambre des représentants, contrôlée par les démocrates, entame cette semaine le débat juridique pour savoir si les faits reprochés au président sont suffisamment graves pour justifier sa mise en accusation ("impeachment").
Sa commission judiciaire doit donner le coup d'envoi à cette réflexion mercredi lors d'une audition avec des spécialistes de la Constitution. Elle avait invité Donald Trump à y "participer" soit en personne, soit par l'entremise de ses avocats ou en posant des questions écrites aux témoins.
Dimanche soir, elle a essuyé un refus.
"Concernant l'audition du 4 décembre, on ne peut légitimement attendre que nous y participions, alors que les noms des témoins n'ont pas été rendus publics et qu'il reste douteux que la commission judiciaire offre une procédure équitable", lui a écrit l'avocat de la Maison Blanche, Pat Cipollone.
"Mais si vous êtes vraiment décidé à superviser une procédure équitable à l'avenir, nous pourrions envisager de prendre part" à la suite de vos travaux, ajoute l'avocat.
Donald Trump est dans la tourmente parce qu'il a demandé à l'Ukraine d'enquêter sur Joe Biden, un de ses adversaires potentiels à la présidentielle de 2020, dont le fils a longtemps siégé au conseil d'administration d'un groupe gazier de ce pays.
Le milliardaire républicain assure avoir été dans son bon droit en soulevant une possible affaire de "corruption" et jure n'avoir exercé aucune pression sur Kiev.
Mais l'opposition démocrate est convaincue qu'il a abusé de ses pouvoirs pour favoriser sa campagne de réélection, notamment en gelant une aide militaire de près de 400 millions de dollars destinée à ce pays en conflit avec la Russie.
Pendant deux mois, la commission judiciaire de la Chambre des représentants a mené l'enquête. Malgré le refus de la Maison Blanche de coopérer, elle a entendu une quinzaine de témoins qui ont fourni des éléments gênants pour le président.
Elle doit transmettre mardi son rapport d'enquête à la commission judiciaire, qui est, elle, chargée de qualifier juridiquement les faits reprochés au chef de l'Etat.
"La question est de savoir s'ils constituent un acte de +trahison, corruption ou autres crimes et délits majeurs+", a relevé l'élue démocrate Zoe Lofgren, en référence aux motifs de destitution cités dans la Constitution des Etats-Unis.
Tenu à l'écart de la phase d'enquête, Donald Trump a été invité à se défendre dans cette nouvelle étape.
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Jerry Nadler, le président de la commission judiciaire lui avait laissé jusqu'au vendredi 6 décembre pour faire connaître ses intentions sur la suite de ses travaux.
"Le président doit faire un choix: il peut saisir cette opportunité d'être représenté dans les auditions ou il peut arrêter de se plaindre", avait ajouté l'élu de New York, un adversaire de longue date du magnat de l'immobilier.
Même dans les rangs républicains, l'idée séduisait. "Je pense que ça servirait le président d'avoir ses avocats", déclarait dimanche le représentant Tom McClintock.
La commission judiciaire devrait débattre d'au moins quatre chefs d'accusations: abus de pouvoir, corruption, entrave à la bonne marche du Congrès et entrave à la Justice.
Les républicains semblent prêts à tous les balayer. "Soyez prêts pour un spectacle sans substance" a estimé Doug Collins, l'élu chargé de mener la contre-attaque. Pour lui, le président "n'a rien fait de mal".
Une fois rédigés, les articles seront soumis à un vote en séance plénière à la chambre basse du Congrès, peut-être avant Noël.
Compte tenu de la majorité démocrate dans cette enceinte, Donald Trump devrait entrer dans les livres d'histoire comme le troisième président américain mis en accusation, après Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1998, tous deux acquittés par la suite. Richard Nixon avait démissionné avant cette étape, en 1974.
Le Sénat sera ensuite chargé de juger le président, et il faudrait une majorité des deux tiers pour le destituer, ce qui paraît très improbable. Les républicains sont en effet majoritaires et, pour l'instant, ils font bloc autour de leur président.