L'abstention atteindrait 50% selon l'institut de sondage Ifop, 50,4% selon Elabe et 51,2% selon Ipsos Sopra Steria, très au-delà du taux des 42,78% du premier tour de 2012, déjà historiquement élevé. Elle devrait être la plus élevée depuis 1958, lors des premières législatives de la Vè République. Elle peut s'expliquer par un effet d'essoufflement après les primaires de gauche et de droite et les deux tours de la présidentielle, le tout en moins de sept mois.
Depuis l'entrée en vigueur en 2002 du quinquennat et la coïncidence entre scrutin présidentiel et législatives (le mandat des députés étant de cinq ans), les Français ont aussi tendance à donner mécaniquement une majorité au président tout juste élu. "C'est un scrutin qui a perdu son autonomie. Les électeurs ont le sentiment que les jeux sont faits après la présidentielle, et se disent +à quoi bon aller voter+", relève Frédéric Dabi, directeur adjoint de l'Ifop.
Le désintérêt pour les législatives a pu être amplifié cette année par la large victoire d'Emmanuel Macron, élu avec 66% des voix face à Marine Le Pen en partie grâce au rejet de la candidate d'extrême droite mais pas toujours sur un vote d'adhésion.
Pour Jean-Daniel Lévy, de l'institut Harris interactive, "les Français ne sont pas complètement fans du président de la République". "En même temps, il n'y a pas de force alternative qui suscite un engouement important", estime-t-il. "Dans ce contexte-là, ils n'ont pas forcément envie de voter, mais pas non plus de créer d'entrave", selon lui. Le jeune mouvement d'Emmanuel Macron, La République en marche (LREM), se dirige vers une victoire écrasante et pourrait ravir avec son allié centriste du MoDem 390 à 445 des 577 sièges de députés, à l'issue du second tour le 18 juin, selon les estimations.
Le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, dont le parti s'est effondré dimanche à environ 10%, a vu dans cette abstention "le signe d'une immense fatigue démocratique". Le chef de file de la droite traditionnelle François Baroin - qui réussit à se stabiliser autour de 21% comme à la présidentielle - a lui appelé à la mobilisation pour éviter que les pouvoirs soient "concentrés" dans "un seul et même parti".