«C’est pour répondre à une invitation du président Bouteflika que le président français sera aujourd’hui à Alger», indique une source autorisée française, au sujet de la visite éclair -de 13h50 à 22 h- qu’effectuera, ce lundi 15 juin, le président Hollande à Alger. Autrement dit, le président Hollande veut simplement «honorer» l’invitation que lui a adressée le locataire du Palais El Mouradia, le président Bouteflika. Le seul ministre qui accompagnera François Hollande est celui des Affaires étrangères.«Pas un seul homme d’affaires français ne sera du voyage», constate le quotidien algérien El Watan, qui a titré dans son édition de ce lundi: «Algérie-France: que vient faire Hollande en Algérie ?». Bonne question, mais à laquelle il n’y a à l’évidence pas de réponse. En dehors, bien entendu, de la crise dans laquelle se débat le régime algérien actuellement. «Un régime sans visage », relève cet historien français spécialiste du Maghreb, Pierre Vermeren, dans une interview-fleuve au quotidien français «Libération », parue hier dimanche 14 juin.
“Le système n’a même plus de visage”«L’Algérie n’est plus gouvernée par une personne physique capable de discuter, de diriger, de voyager, de faire ne serait-ce qu’un discours. De sorte que le système est devenu la caricature parfaite de lui-même. Depuis des années, les Algériens disent que le pays est dirigé par un système, et aujourd’hui, le système n’a même plus de visage. C’est ça qui rend la relation France-Algérie extrêmement compliquée. Qui dirige ? Qui a été élu? Qui est l’Etat algérien? Quelle est aujourd’hui “la légitimité démocratique”? A la limite presque nulle. C’est qui l’Algérie ? L’armée ? Les “Services” (Direction du renseignement et de la sécurité, DRS, ndlr)? Les puissances économiques? Les grands intérêts capitalistes pétroliers? C’est du jamais vu. Je ne connais pas de précédent illustrant une telle situation à la tête d’un Etat», explique l’analyste français.
Danger d’une déflagration socialeC’est un tableau très sombre que dresse donc Pierre Vermeren de l’Algérie, à juste titre d’ailleurs. «L’absence de perspectives, de gouvernement, de prévisions sérieuses, engage un avenir très noir pour l’Algérie, pour la région, et aussi la France», relève encore le spécialiste du Maghreb, pour qui «l’invitation» adressée par le président-fantôme Abdelaziz Bouteflika dénote comme une ultime tentative de «fuite en avant» du régime algérien, ou ce qu’il en reste. Les clignotants au tableau de bord économique de l’Algérie sont tous au rouge, le vide institutionnel sidéral au sommet de l’Etat fait planer le spectre d’un coup d’Etat militaire, et, à l’horizon, pointe déjà le danger d’une déflagration sociale inédite.
Et ce n’est surtout pas le plongeon des cours de pétrole qui va sauver les meubles. Est-ce un hasard si aucun homme d’affaires français n’accompagne le président Hollande à Alger ? Une source autorisée française s’est donc sentie obligée de préciser que le seul enjeu de cette visite est d’ «honorer » l’invitation du président Bouteflika. Un président malade, à l’image d’un régime en fin de parcours. Au secours …