Depuis quelques semaines, des voix s'élèvent pour s'émouvoir du traitement judiciaire de l'intellectuel musulman de 55 ans, inculpé pour viols et écroué depuis le 2 février, estimant sa présomption d'innocence bafouée et son état de santé ignoré.
La cour d'appel de Paris a décidé jeudi de maintenir en détention provisoire le conférencier, qui clame son innocence et avait demandé sa remise en liberté en affirmant souffrir d'une sclérose en plaques et d'une neuropathie périphérique. L'expert médical désigné par la chambre de l'instruction a toutefois jugé son état compatible avec une incarcération.
Dans la rue, la mobilisation a été jusqu'alors très modeste. Environ 80 personnes se sont rassemblées jeudi devant le Palais de justice de Paris pour protester contre son maintien en détention. Samedi dernier, à Casablanca (Maroc), une "conférence de solidarité avec Tariq Ramadan" s'était transformée en un rassemblement d'une quarantaine de manifestants.
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C'est sur internet que les soutiens se comptent et relaient la riposte. Elle s'est organisée autour du mouvement "Résistance & Alternative" créé fin janvier pour continuer à promouvoir la "pensée" du petit-fils du fondateur de la confrérie des Frères musulmans, qui a toujours affiché un discours réformiste quand ses détracteurs y voient le projet d'un islam politique.
Des proches de l'intellectuel ont lancé sur les réseaux sociaux des comptes #FreeTariqRamadan. Sous ce mot-clé, une tweetstorm ("tempête" de tweets) a été lancée, de même qu'une pétition en ligne affichant plus de 100.000 signatures pour la libération du "Professeur Tariq Ramadan".
La campagne a relayé deux vidéos de la femme du théologien, Iman Ramadan, respectivement visionnées près de 700.000 et plus de 160.000 fois. "Il y a tout lieu de se poser des questions et de se demander si derrière tout ça, il n'y a pas une vraie volonté politique à vouloir garder mon mari en prison", argue l'épouse dans la seconde vidéo.
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Hani Radaman, frère sulfureux de Tariq, et Yamin Makri, directeur des éditions Tawhid à Lyon, sont même allés jusqu'à s'en prendre aux deux plaignantes en criant au complot "sioniste", même si cette position reste très minoritaire chez les personnalités soutenant l'islamologue.
Une soixantaine de militants de l'antiracisme politique ou d'un islam identitaire ont, eux, signé une tribune réclamant "une justice impartiale et égalitaire". Parmi eux, la porte-parole des Indigènes de la République, Houria Bouteldja, Nabil Ennasri qui a consacré une longue vidéo à l'affaire, mais aussi l'ancien directeur du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), Marwan Muhammad, auteur par ailleurs d'un texte sur le sujet.
Longtemps prudents et silencieux sur un dossier qui trouble, voire divise leurs fidèles, des recteurs de mosquées ont pris plus clairement la parole ces derniers jours en faveur de "frère Tariq". "Tariq Ramadan c'est notre frère (...), jusqu'à preuve du contraire il est innocent", a dit à Lille (nord) Amar Lasfar, président des Musulmans de France (ex-UOIF), qui gravite dans l'orbite des Frères musulmans. A Marseille (sud-est), l'imam Ismail Abou Ibrahim a fait de même.
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Les recteurs Azzedine Gaci (Villeurbanne), visage libéral de la succursale "frériste", et surtout Kamel Kabtane (Lyon) ont pu surprendre en réclamant la "libération immédiate" du conférencier, victime selon eux "d'un lynchage médiatico-politique".
Ces marques de soutien plus ou moins appuyées ne font pas l'unanimité dans les rangs musulmans, où l'étoile de Tariq Ramadan a pâli ces dernières années, suscitant indifférence ou rejet.
"Premier site d'information de l'islam francophone", le média Oumma.com s'en est ainsi pris aux "prédicateurs et militants associatifs" qui "exploitent cette terrible affaire à des fins bassement carriéristes". Et promis d'informer sur l'affaire "de la manière la plus équilibrée possible".