France: plombée par les affaires, la campagne s'envenime à un mois de la présidentielle

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"Cabinet noir", assassinat politique: à un mois du premier tour, la campagne présidentielle en France s'envenime avec les accusations brandies par le conservateur François Fillon contre le pouvoir socialiste, qu'il dit responsable de ses déboires judiciaires.

Le 25/03/2017 à 09h44

Jusqu'ici discret dans la campagne, le président François Hollande est sorti vendredi de sa réserve pour dénoncer le manque de "responsabilité" du candidat de la droite. M. Fillon, 63 ans, tente depuis des semaines de sauver une campagne empêtrée dans les affaires judiciaires en accusant le pouvoir, les juges et la presse de chercher à le discréditer.

Le ton était monté jeudi soir lorsque le candidat, désormais donné battu au premier tour du 23 avril par le centriste Emmanuel Macron et la candidate de l'extrême droite Marine Le Pen, a dénoncé l'existence d'un "cabinet noir" dirigé par le chef de l'Etat, qui orchestrerait des fuites dans la presse.

"Je ne suis pas candidat, mais il y a une dignité, une responsabilité à respecter. Je pense que M. Fillon est au-delà maintenant, ou en-deçà", a réagi le président, qui a renoncé à briguer un second mandat après cinq ans d'exercice du pouvoir marqués par une impopularité record.

M. Fillon a été inculpé la semaine dernière pour détournement de fonds publics dans l'affaire de soupçons d'emplois fictifs accordés à son épouse Penelope et deux de ses enfants lorsqu'il était parlementaire. L'enquête a été élargie à des soupçons de trafic d'influence, d'escroquerie aggravée et de faux.

Son ancien suppléant à l'Assemblée nationale, Marc Jouland, qui avait lui aussi employé Penelope Fillon comme assistante parlementaire, a également été inculpé vendredi pour détournement de fonds publics.

Vendredi soir, le candidat a poursuivi sa rhétorique du complot: "La seule façon de sauver la gauche, c'est de tuer Fillon", a-t-il lancé lors d'un meeting à Biarritz (sud-ouest).

Cadeaux de valeurAu même moment, la radio France Info révélait que François Fillon s'était fait offrir en 2009, lorsqu'il était Premier ministre, une montre valant plus de 10.000 euros par un homme d'affaires italo-suisse, Pablo Victor Dana, puis en 2013 une deuxième montre par le manufacturier suisse Rebellion.

Le candidat de la droite a déploré auprès de l'AFP que la presse mentionne des cadeaux relevant à ses yeux de sa vie privée - après, déjà, l'histoire des costumes de luxe d'une valeur de 13.000 euros, offerts en février par le sulfureux avocat Robert Bourgi, un "ami", et qu'il aurait finalement "rendus".

Dans sa déclaration de patrimoine, il a déclaré posséder deux montres valant 12.000 et 15.000 euros, selon son "évaluation personnelle".

M. Fillon, qui avait fait de la probité un thème-clé de sa campagne avant les révélations qui se succèdent depuis des semaines, a affirmé jeudi soir que ses accusations de "cabinet noir" étaient étayées par un ouvrage co-écrit par trois journalistes.

Mais l'un des auteurs, Didier Hassoux, a démenti ses propos et dénoncé une instrumentalisation du livre par un homme "aux abois" qui "essaye de faire un coup".

"Escalade pathétique"La presse française est sévère samedi avec M. Fillon. Le quotidien Le Monde fustige ainsi une "escalade pathétique" qui "témoigne de l'affolement rageur d'un candidat prêt à tout".

Selon un nouveau sondage de l'institut BVA, François Fillon perd 2,5 points dans les intentions de vote au premier tour de la présidentielle (17%), nettement distancé par Emmanuel Macron (26%, +1) et Marine Le Pen (25%, -1).

Unanime contre M. Fillon, la gauche est néanmoins fracturée par les ralliements de plus en plus nombreux à Emmanuel Macron dans l'espoir de faire barrage à l'extrême droite.Alourdissant encore le climat de la campagne, le candidat socialiste, Benoît Hamon, donné en quatrième position le 23 avril au coude-à-coude avec le représentant de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, a dénoncé les "trahisons" de son camp.

L'ancien Premier ministre Manuel Valls, battu à la primaire socialiste, a refusé de lui accorder son parrainage et publiquement critiqué son programme aux idées novatrices, comme l'instauration d'un revenu universel d'existence.

Pendant ce temps, la chef du parti Front national Marine Le Pen a été reçue officiellement vendredi à Moscou par Vladimir Poutine, une première. Indiquant préférer "laisser se bagarrer" MM. Fillon et Hollande, elle a estimé que le président russe représentait "une nouvelle vision" d'un "monde multipolaire".

M. Poutine a de son côté assuré que "la Russie n'interfèrera pas dans l'élection", alors que Moscou est accusé par les Occidentaux d'avoir interféré dans l'élection présidentielle américaine pour aider à faire élire Donald Trump et que Berlin craint des tentatives de "déstabilisation" de Moscou avant les élections législatives allemandes de septembre 2017.

Le 25/03/2017 à 09h44