Le secrétaire d’État américain Antony Blinken est arrivé ce vendredi en Israël pour tenter d’arracher un accord de trêve à Gaza au moment où le Conseil de sécurité de l’ONU doit se prononcer sur une résolution des États-Unis sur un «cessez-le-feu immédiat» dans le territoire palestinien.
Après cinq mois et demi de guerre, «le fossé se réduit» dans les négociations pour une trêve associée à une libération d’otages, a déclaré jeudi M. Blinken. «S’il est difficile de parvenir» à un accord, «cela est toujours possible», a-t-il ajouté.
En parallèle de ces pourparlers, les États-Unis ont pour la première fois présenté un projet de résolution au Conseil de sécurité de l’ONU sur un « cessez-le-feu immédiat lié à la libération des otages » retenus à Gaza depuis le début de la guerre.
Le texte, qui doit être soumis vendredi au vote du Conseil de sécurité, souligne «la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat et durable pour protéger les civils de tous côtés, permettre la fourniture de l’aide humanitaire essentielle».
L’issue du vote est toutefois incertaine alors que la Russie réclame un «appel» plus clair à faire taire les armes. La Chine a pour sa part annoncé vendredi soutenir les efforts du Conseil de sécurité de l’ONU pour mettre fin aux combats dans la bande de Gaza, sans préciser si Pékin appuiera le projet de résolution.
Les États-Unis, alliés historiques d’Israël, ont déjà mis leur veto à plusieurs résolutions du Conseil de sécurité appelant à un cessez-le-feu. Mais face au lourd bilan humain et à la menace de famine, Washington redouble à présent d’efforts pour parvenir à une trêve et éviter une offensive terrestre sur Rafah.
Rafah, une «erreur»
«Il y a de meilleurs moyens de gérer la menace du Hamas», a déclaré jeudi M. Blinken, qualifiant «d’erreur» et «d’inutile» une éventuelle invasion terrestre de Rafah, ville à la frontière égyptienne où s’entassent environ 1,5 million de Palestiniens, en grande majorité des personnes déplacées par les opérations militaires israéliennes dans le reste du territoire.
Les 27 pays de l’Union européenne ont eux aussi exhorté jeudi Israël à ne pas lancer d’opération sur Rafah et appelé à une «pause humanitaire immédiate». Mais en dépit des pressions internationales, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu affirme qu’une offensive sur Rafah est «nécessaire».
L’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, Israël pilonne depuis plus de 5 mois la bande de Gaza, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué 31.988 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et fait près de 73.000 blessés, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.
En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté, plus de 450 Palestiniens ont été tués par les soldats et les colons israéliens depuis le 7 octobre, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.
Mossad et CIA au Qatar
Les discussions sur une trêve se poursuivent à Doha entre représentants des États-Unis, du Qatar et de l’Egypte. Le chef des services de renseignement israéliens, David Barnea, doit y rencontrer vendredi le directeur de la CIA, William Burns, ainsi que le Premier ministre qatari Mohammed ben Abdelrahman Al-Thani et le chef des services de renseignement égyptiens, Abbas Kamel.
Après avoir exigé un cessez-le-feu définitif, le Hamas a infléchi sa position la semaine dernière en acceptant le principe d’une pause de six semaines dans les combats. Mais des différends semblent persister sur l’échange d’otages israéliens détenus à Gaza contre des prisonniers palestiniens détenus en Israël.
Israël exige du Hamas avant une trêve la liste des otages encore en vie, tandis que le mouvement islamiste veut choisir l’identité des principaux prisonniers palestiniens qui seront libérés, soulignent des médias israéliens à propos de ces pourparlers.
«Les enfants meurent de faim»
Israël impose un siège complet à la bande de Gaza depuis le début de la guerre et contrôle strictement l’aide qui arrive principalement depuis l’Égypte via Rafah. Or ces contrôles serrés et très restrictifs sur la nature des produits «autorisés» ont pour effet de réduire le nombre de camions entrant dans le territoire et la quantité d’aide acheminée.
«Les enfants meurent de faim. Ils sont privés de nourriture», s’est alarmé jeudi le Comité des droits de l’enfant des Nations unies. «Même les miettes sont difficiles à trouver», affirme-t-il.
Afin de soulager la population, plusieurs pays organisent des parachutages de nourriture et ont ouvert un couloir maritime depuis Chypre vers Gaza. Mais l’aide reste largement insuffisante face aux besoins des 2,4 millions d’habitants de Gaza et ne parvient que très difficilement dans le nord, où vivent plus de 300.000 personnes selon l’ONU.
«Voici nos enfants, voyez-vous leur état ? Nous ne savons pas comment les nourrir», a déclaré jeudi à l’AFP une Palestinienne fuyant les combats dans le secteur de l’hôpital Al Chifa, cible depuis plusieurs jours de bombardements et de raids israéliens. «Nous sommes assiégés depuis trois jours, nous ne pouvons rien leur donner à manger ou à boire».