Malgré les appels internationaux à faire taire les armes, aucun répit n’est en vue pour Gaza après 80 jours de guerre. «Nous n’arrêtons pas, (...) nous intensifions les combats dans les jours à venir. Ca sera une longue guerre», a martelé lundi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, après s’être rendu dans le territoire palestinien.
Dans une tribune publiée sur le Wall Street Journal, il a également posé trois «pré-requis» pour parvenir à la paix. «Le Hamas doit être détruit, Gaza doit être démilitarisée et la société palestinienne doit être déradicalisée», a-t-il détaillé. Il a également évoqué la nécessité «d’établir une zone de sécurité temporaire sur le périmètre de Gaza», excluant de confier son administration future à l’Autorité palestinienne. «Dans un avenir proche, Israël devra conserver la responsabilité principale de la sécurité à Gaza», a-t-il répété.
Selon le quotidien israélien Haaretz, Netanyahu s’est également déclaré prêt à encourager la «migration volontaire» des Palestiniens hors de Gaza. «Notre problème n’est pas de savoir s’il faut autoriser une sortie, mais s’il y aura des pays qui seront prêts à absorber une sortie», a-t-il déclaré devant les élus du Likoud, son parti, selon Haaretz.
«Projet absurde»
Le Hamas a réagi en dénonçant un «projet absurde». Les Palestiniens «refusent d’être déportés et déplacés. Il ne peut y avoir d’exil et il n’y a pas d’autre choix que de rester sur notre terre», s’est-il indigné dans un communiqué.
Selon un dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas, 20.674 personnes, en grande majorité des femmes et des enfants, ont été tuées dans les opérations militaires israéliennes, qui ont aussi fait près de 55.000 blessés. Cette offensive, la plus sanglante jamais menée par Israël à Gaza, a été lancée en représailles à l’attaque du mouvement islamiste palestinien sur son sol le 7 octobre, qui a fait environ 1.140 morts, la plupart des civils, selon Israël. Les commandos palestiniens ont aussi enlevé environ 250 personnes, dont 129 restent détenues à Gaza.
Le petit territoire surpeuplé est soumis à un siège total depuis le 7 octobre, sans approvisionnement d’eau, de nourriture, de médicaments, d’électricité et de carburant, les bombardements israéliens ont forcé 1,9 million de personnes à fuir leur domicile, soit 85% de la population selon l’ONU. En Cisjordanie occupée, où le Hamas n’est pas représenté, plus de 300 Palestiniens ont été tués par les soldats et les colons israéliens depuis le début de la guerre.
«Ils nous disent d’aller au sud, au nord, au centre: ce ne sont que des mensonges et des tromperies, il n’y a pas de zone sûre dans la bande de Gaza. Les enfants sont réduits à l’état de restes. Quelle est la faute de ces enfants innocents?», s’est indigné auprès de l’AFP Abou Rami Abou Al-Ais, un habitant du camp de réfugiés d’al-Maghazi (centre de la bande de Gaza), où une frappe survenue dimanche soir a notamment tué au moins 70 personnes, selon le ministère de la Santé du Hamas. À l’hôpital voisin de Deir el-Balah, des dizaines de corps, ont été enveloppés dans des sacs mortuaires après la frappe, a constaté l’AFP.
«Récits déchirants»
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est rendue dans cet hôpital et a entendu des «récits déchirants» de familles entières tuées, a expliqué lundi sur X son directeur, Tedros Adhanom Ghebreyesus. «Cette dernière frappe sur une communauté de Gaza montre bien pourquoi il faut un cessez-le-feu tout de suite», a-t-il insisté.
Les différentes agences des Nations unies alertent sans relâche sur la catastrophe humanitaire en cours. La plupart des hôpitaux de Gaza sont hors services et dans les six prochaines semaines, l’ensemble des 2,4 millions d’habitants risquent de subir un niveau élevé d’insécurité alimentaire, pouvant aller jusqu’à la famine, selon l’ONU.
L’aide humanitaire n’a pas augmenté de manière significative à Gaza, malgré le vote vendredi par le Conseil de sécurité de l’ONU d’une résolution réclamant son acheminement «immédiat» et «à grande échelle». Sans arrêt des combats, distribuer l’aide alimentaire est quasiment impossible, selon les agences onusiennes.
En Israël, la pression perdure pour libérer les otages. Lundi, Benjamin Netanyahu a été chahuté lors d’un discours au Parlement par des familles qui scandaient «Maintenant, maintenant!». «Et si c’était ton fils?», «80 jours, chaque minute c’est l’enfer», pouvait-on lire sur des banderoles brandies par ces proches. Une manifestation a également eu lieu à Tel-Aviv.
Le Hamas exige une fin des combats avant d’entamer de nouvelles négociations pour des libérations d’otages. Malgré l’intransigeance des deux camps, les médiateurs égyptiens et qataris tentent toujours de négocier une nouvelle trêve, après celle d’une semaine fin novembre qui a permis la libération de 105 otages contre 240 prisonniers palestiniens et l’entrée à Gaza d’importantes aides.
Au-delà de Gaza, le spectre d’un élargissement du conflit plane toujours, avec des échanges de tirs quasi-quotidiens et parfois meurtriers entre le Hezbollah et l’armée israélienne à la frontière entre le Liban et Israël, et les attaques des rebelles Houthis du Yémen contre des navires en mer Rouge et en mer d’Arabie.
Frappes américaines en Irak
Les États-Unis ont annoncé avoir frappé lundi trois sites utilisés en Irak par le Hezbollah, allié du Hamas, et d’autres forces soutenues par l’Iran, en réponse notamment à une attaque ayant ciblé des personnels américains à Erbil, dans le nord de l’Irak.
L’Iran a également accusé Israël d’avoir tué lundi un de ses hauts-gradés par une frappe de missiles en Syrie. Les Gardiens de la Révolution ont identifié ce général de brigade, Razi Moussavi, comme un «responsable logistique de l’axe de la résistance» à Israël. Interrogée sur cette frappe, l’armée israélienne s’est refusée à tout commentaire.