Le mouvement islamiste palestinien a accusé l’armée israélienne d’avoir mené des tirs à partir de «chars et d’hélicoptères» sur des personnes qui attendaient une distribution de farine au rond-point «Koweït» situé à proximité de la ville de Gaza. De son côté, l’armée israélienne a affirmé ne pas avoir «attaqué» des Palestiniens «à un point de distribution d’aide», précisant «analyser l’incident avec sérieux» mais sans détailler à ce stade sa version des faits.
L’ONU redoute une famine généralisée dans le territoire assiégé par Israël, notamment dans le nord, difficilement accessible, où vivent actuellement environ 300.000 personnes.
Dans le nord de la bande de Gaza, les habitants scrutent quotidiennement le ciel dans l’attente d’un parachutage, mais les quantités larguées sont limitées. Dès que les parachutes s’approchent du sol, ils se précipitent au milieu des ruines, en espérant récupérer un sac de nourriture.
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Dans la nuit de jeudi à vendredi, une foule réunie au rond-point «Koweït» pour attendre l’arrivée de rares camions remplis d’aide a été la cible de «tirs israéliens», ont indiqué des responsables locaux. «Le bilan des victimes transportées à l’hôpital al-Chifa a été revu à la hausse à 20 morts et 155 blessés», a déclaré le ministère de la santé du Hamas.
«Il y a eu des tirs directs des forces d’occupation sur des gens rassemblés au rond-point “Koweït” pour attendre l’arrivée de camions avec de la nourriture», a indiqué à l’AFP le docteur Mohammed Ghurab, directeur des services d’urgence de cet hôpital. Sur place, un collaborateur de l’AFP a vu de nombreuses ambulances avec des dépouilles et des blessés.
Un navire attendu
Les efforts s’accélèrent pour tenter d’acheminer davantage d’aide humanitaire dans le territoire palestinien où la population manque de nourriture après plus de cinq mois de guerre entre Israël et le Hamas.
L’aide par voie terrestre, très insuffisante face aux besoins immenses des 2,4 millions d’habitants du territoire, entre principalement dans la bande de Gaza depuis l’Égypte via le poste-frontière de Rafah, après avoir été inspectée par Israël.
Mais ce volume d’aide ne répond pas aux besoins de la population, d’où les appels pour ouvrir d’autres voies, donnant sur le nord du territoire, et différentes initiatives comme les parachutages de sacs de nourriture.
«Depuis que la guerre a commencé et que les gens se sont déplacés vers le sud, nous n’avons pas reçu d’aide. Nous errons depuis tôt le matin dans l’espoir qu’un avion largue des parachutes au-dessus de nous», a raconté à l’AFP un déplacé, Mokhles al-Masry, un sac de farine sur les épaules, à Beit Lahya.
Mais «tout le monde se bouscule violemment pour obtenir un carton pour ses enfants, pour récupérer une boîte de thon ou de fèves. Tout le peuple est affamé et épuisé.»
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Autre initiative: un couloir maritime humanitaire ouvert depuis Chypre, à l’initiative de l’Union européenne et des Émirats arabes unis, avec le départ mardi d’un premier bateau de l’ONG espagnole Open Arms chargé de 200 tonnes de vivres fournies par l’ONG américaine World Central Kitchen (WCK).
Tôt vendredi, ce bateau était situé au large de la bande de Gaza, selon le site spécialisé Marine Traffic. Une équipe de WCK présente à Gaza a construit une jetée flottante où seront débarquées les cargaisons destinées à la population du nord du territoire.
«Nous espérons décharger l’aide dès qu’il sera possible de s’amarrer, mais de nombreux facteurs jouent dans cette opération compliquée», a déclaré jeudi la présidente de WCK, Erin Gore, à propos d’un chargement d’environ 300.000 repas préparés.
«Nous savons tous que ce n’est pas suffisant (...) c’est pourquoi nous devons ouvrir ce couloir avec un flux continu de bateaux», a ajouté Mme Gore dont l’ONG a indiqué dans la nuit affréter un second navire avec «des centaines de tonnes» de vivres destinés à Gaza.
Trêve encore possible?
Ces développements interviennent alors que les États-Unis, l’Égypte et le Qatar -- trois pays médiateurs -- tentent d’arracher un accord de trêve de plusieurs semaines assorti à des libérations d’otages israéliens à Gaza et de prisonniers palestiniens en Israël, et à une hausse de l’aide entrant à Gaza ravagée par des mois de conflit.
La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent menée par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël, qui a entraîné la mort d’au moins 1.160 personnes, la plupart des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de sources officielles israéliennes.
Selon Israël, environ 250 personnes ont été enlevées ce jour-là et 130 d’entre elles sont toujours otages à Gaza, dont 32 seraient mortes.
En représailles, Israël a promis «d’anéantir» le mouvement islamiste, au pouvoir à Gaza depuis 2007, et lancé une vaste offensive qui a fait jusqu’à présent au moins 31.341 morts dans la bande de Gaza, en majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.
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Une source au sein du Hamas a indiqué à l’AFP que le mouvement islamiste avait présenté aux médiateurs de l’Égypte et du Qatar, «qui en informeront les Américains», une position faisant preuve de «flexibilité» quant à «l’échange» d’otages contre des prisonniers. Le Hamas demande en outre «le retrait des forces israéliennes» de «toutes les zones peuplées» de Gaza, a ajouté cette source.
Jeudi soir, le bureau de Benjamin Netanyahu a jugé «irréalistes» les demandes du Hamas, précisant qu’une mise à jour sur les pourparlers allait être présentée «demain» aux cabinets de guerre et de sécurité.
À Jérusalem, des milliers de membres des forces de l’ordre sont déployés vendredi pour la première grande prière sur l’esplanade des Mosquées depuis le début du ramadan par craintes de débordements en marge de la guerre Israël-Hamas à Gaza.