Le Premier ministre Edouard Philippe était à l'Elysée, dès 11H30 ce lundi, avec le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner et le secrétaire d'Etat Laurent Nuñes, ainsi que la garde des Sceaux Nicole Belloubet. Il fera "ses propositions d'adaptation au président (...) pour renforcer la doctrine d'emploi des forces de l'ordre" et "s'assurer à tout moment de la fermeté de son exécution", a indiqué Matignon, évoquant une réponse rapide.
Matignon a reconnu des "dysfonctionnements" du dispositif de sécurité face à une flambée de violence qui renvoie à un niveau de tension connu en décembre, avec le saccage de l'Arc de Triomphe, alors que le mouvement des "gilets jaunes", lancé il y a quatre mois, semblait marquer le pas dans la rue.
Le secrétaire d'Etat à l'Intérieur, Laurent Nuñez, est monté d'un cran dans l'autocritique, lundi sur RTL, en admettant un "échec" et en déclarant vouloir se pencher sur les responsabilités de la "chaîne de commandement".
Ses déclarations devraient relancer les spéculations sur un prochain départ du préfet de police de Paris, Michel Delpuech, régulièrement donné partant entre affaire Benalla et polémiques à répétition sur la gestion de l'ordre public dans la capitale.
Mais c'est le ministre de l'Intérieur et le président de la République qui sont directement mis en accusation par les Républicains.
Dans un texte publié sur sa page Facebook, Laurent Wauquiez, président des LR, accuse le président Macron, et Christophe Castaner, "dont la crédibilité est maintenant gravement atteinte" selon lui, d'avoir "sous-estimé la violence" et de ne pas avoir apporté de "réponse à la hauteur de la crise".
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Emmanuel Macron "a donné un permis de casser aux casseurs", a dénoncé le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau auprès de l'AFP, évoquant un "Notre-Dame-des-Landes sur les Champs-Elysées".
La porte-parole du parti Lydia Guirous a réclamé dimanche soir la démission de M. Castaner, qui n'est "pas à la hauteur".
Christophe Castaner et son homologue pour l'Economie, Bruno Le Maire, devront s'expliquer, mardi, devant les commissions des Lois et des Affaires économiques du Sénat sur ces violences et leurs conséquences économiques. M. Le Maire recevra lundi à Bercy des représentants des secteurs d'activités touchés (commerçants, assurances, hôtellerie).
Interrogé sur une éventuelle interdiction de manifester sur les Champs-Élysées ou la possibilité de rétablir l'état d'urgence, Philippe Bas, le président (LR) de la commission des Lois du Sénat, a répondu: "aucune hypothèse ne peut être écartée".
Il faut "interdire les manifestations" de "gilets jaunes" dans toute la France pour éviter de nouvelles flambées de violence, a estimé Frédéric Péchenard, vice-président (LR) de la région francilienne en charge de la sécurité.
L'indignation est générale après les images de pillages et d'incendie du restaurant Fouquet's, de magasins ou d'une succursale bancaire des Champs-Elysées, vitrine de la France à l'étranger, qui ont tourné en boucle dans les médias. Même si elles tranchaient avec celles des autres défilés globalement très calmes samedi de dizaines de milliers de manifestants "gilets jaunes" ou pour le climat dans la capitale et le reste du pays.
Des violences dévastatrices pour l'image de l'exécutif, d'autant que certains médias les juxtaposaient à celles du chef de l'Etat en week-end de ski à La Mongie et à celles du ministre de l'Intérieur embrassant une jeune femme lors d'une soirée dans une discothèque parisienne la semaine précédente.
"Le président de la République ne va pas se mettre à courir après chaque casseur sur les Champs Élysées", l'a défendu la secrétaire d'Etat Brune Poirson.
Emmanuel Macron a abrégé son séjour à la montagne pour rentrer dès samedi soir et promettre des "décisions fortes".
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Les violences font leur retour au premier plan alors que le gouvernement espérait sortir de la crise avec le grand débat national pour lequel le président n'a pas hésité à mouiller la chemise, enchaînant débats-marathons avec élus et citoyens.
Lundi soir, Macron devait dans ce cadre échanger avec une soixantaine d'intellectuels à l'Elysée.
L'exécutif vante une "réussite" pour le gouvernement, avec plus de 10.300 réunions locales et de 1,4 million de contributions sur le site dédié.
Il s'est donné jusqu'à la mi-avril pour décider ce qu'il compte faire des très nombreuses propositions qui ont émergé. Mais le gouvernement devra "accélérer certainement la réponse", a avancé sur BFMTV Nadia Bellaoui, l'un des cinq garants du grand débat.