Près d'un mois après le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie et alors que les bombardements se poursuivent sur les grandes villes du pays, le président ukrainien s'est pour la première fois dit ouvert à «essayer d'aborder tout ce qui contrarie et mécontente la Russie», dans une interview à plusieurs médias diffusée dans la nuit de lundi à mardi.
«La question de la Crimée et du Donbass est une histoire très difficile pour tout le monde». Il faut «des garanties de sécurité» et la fin des hostilités, et «une fois que ce blocage sera levé, parlons», a dit Volodymyr Zelensky à propos de la presqu'île annexée par la Russie en 2014 et de la région de l'est de l'Ukraine où des séparatistes prorusses ont proclamé deux «républiques», uniquement reconnues par Moscou.
Le chef d'Etat, qui veut parler directement à son homologue russe, a aussi avancé que le peuple devrait, par référendum, «se prononcer sur certaines formes de compromis» conclus avec la Russie. Tout en prévenant: «nous devons tout faire pour que le Donbass et la Crimée nous reviennent (...) Une question de temps? Oui. Mais l'arrêt de la guerre, maintenant, c'est ça la question».
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Volodymyr Zelensky a aussi déclaré qu'il ne voulait pas «que l'Histoire fasse de nous des héros et une nation qui n'existe pas», et a martelé que l'Ukraine serait «détruite» avant de se rendre.
Plusieurs sessions de tractations entre Kiev et Moscou se sont déroulées en présentiel et par visioconférence depuis le déclenchement de la guerre, sans résultat pour l'heure.
Couvre-feu à KievSur le terrain, les bombardements se sont poursuivis en ce début de semaine sur plusieurs villes comme Kiev, Kharkiv, Marioupol, Odessa ou Mykolaïv.
Dans la capitale, où un nouveau couvre-feu est entré en vigueur lundi à 20H00 (18H00 GMT) jusqu'à mercredi 07H00, «65 habitants pacifiques de Kiev, dont quatre enfants, sont morts» et environ 300 personnes, dont 16 enfants, ont été blessées dans «les bombardements des militaires russes», a déclaré hier, lundi, son maire, Vitali Klitschko.
Tard dimanche soir, une puissante frappe russe, vraisemblablement causée par un missile, avait détruit l'immense centre commercial Retroville, l'attaque la plus violente contre la capitale depuis le début de la guerre. Selon Moscou, le centre commercial «inopérant» servait de dépôt d'armements. L'AFP a vu six cadavres sortis des décombres, des hommes vêtus d'effets militaires, laissant à penser que des soldats dormaient sans doute là.
La situation reste dramatique à Marioupol, grande ville portuaire du sud, majoritairement russophone, située entre la Crimée et le territoire séparatiste de Donetsk et assiégée, bombardée depuis des semaines par les Russes. Le gouvernement ukrainien a rejeté un ultimatum lancé par Moscou sur une reddition de la ville.
La situation humanitaire y est «extrêmement grave», selon l'ONU, avec «une pénurie critique et potentiellement mortelle de nourriture, d'eau et de médicaments». Et pour le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell, «ce qui se passe à Marioupol est un crime de guerre majeur».
Hier, lundi, le président américain Joe Biden et les dirigeants français Emmanuel Macron, britannique Boris Johnson, allemand Olaf Scholtz et italien Mario Draghi se sont entretenus par vidéoconférence notamment de la «situation humanitaire critique à Marioupol, et l'urgence d'obtenir un accès sans entrave de l'aide humanitaire», a indiqué la présidence française.
Le président Zelensky a lui accusé la Russie de «tout simplement détruire» la ville, où des chars russes sont entrés. «Ils la réduisent en cendres, mais nous leur survivrons», a-t-il assuré hier soir.
Biden: Poutine «dos au mur»A Kherson, ville du sud de l'Ukraine, une manifestation de civils contre l'occupation des forces russes a été dispersée hier, lundi, par des tirs d'armes automatiques, des grenades assourdissantes et des gaz lacrymogènes, qui ont fait au moins un blessé, selon des responsables ukrainiens.
Au total l'armée ukrainienne a affirmé hier, lundi, que les Russes avaient perdu 15.000 soldats, tandis que Volodymyr Zelensky annonçait 1.300 militaires ukrainiens tués le 12 mars -des chiffres impossibles à vérifier. Des sources du renseignement américain citées par le New York Times avancent plus de 7.000 Russes tués.
Le ministre ukrainien de la Défense Oleksii Reznikov a admis que «la situation est très difficile» face à «un ennemi très supérieur numériquement et la menace d'une invasion terrestre de l’armée» de la Biélorussie, allié de Moscou.
Les ministres des Affaires étrangères et de la Défense de l'Union européenne ont décidé lundi de doubler leur soutien financier pour les achats d'armements envoyés à Kiev, après l'épuisement d'une première enveloppe de 500 millions d'euros.
Des armes chimiques et biologiques seront-elles utilisées par les Russes? Moscou a suggéré que l'Ukraine en détenait, ce qui est «un signe clair qu'il (Vladimir Poutine) envisage d'utiliser ces deux types d’armes», a estimé Joe Biden hier soir lors d'une rencontre à Washington avec des représentants du monde des affaires, estimant que son homologue russe était «dos au mur».
La fin de semaine sera marquée par une intense activité diplomatique. Joe Biden participera ce jeudi à Bruxelles à un sommet extraordinaire de l'Otan, une réunion du G7 et un sommet de l'UE, avant de séjourner vendredi et samedi prochains en Pologne, principal pays d'arrivée des réfugiés ukrainiens.
Près de 3,5 millions de personnes -essentiellement des femmes et des enfants- ont fui l'Ukraine depuis le 24 février, selon le décompte de l'ONU publié hier, lundi.
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A Moscou, le ministère russe des Affaires étrangères a lui estimé que Joe Biden avait conduit les relations russo-américaines «au bord de la rupture» par ses déclarations «indignes» visant Vladimir Poutine, qu'il a qualifié de «criminel de guerre». L'ambassadeur américain a été convoqué lundi.
Le sujet d'un éventuel embargo européen sur les hydrocarbures russes a été remis sur le tapis, avec l'appel de Volodymyr Zelensky lancé hier lundi à l'UE de cesser tout commerce avec la Russie, notamment concernant «les ressources énergétiques». Les Européens, très dépendants des hydrocarbures russes, ont jusqu'ici exclu de sanctionner ce secteur.
«Aucun train de sanctions ne sera décidé cette semaine», a déclaré Josep Borrell.
«Mais des orientations seront données jeudi et vendredi lors du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement et elle seront suivies par des décisions concrètes», a-t-il avancé.