Au total 13 personnes, dont dix manifestants, ont été tuées dans les violences qui ont émaillé ces protestations, parties jeudi de Machhad (nord-est), la deuxième ville du pays, pour se propager rapidement à travers le territoire.
Le président Hassan Rohani, qui avait appelé au calme dimanche, a averti lundi que "le peuple iranien répondra aux fauteurs de troubles", qui ne sont qu'une "petite minorité" selon lui.
Revenant à la charge contre le régime iranien, ennemi juré des Etats-Unis, le président américain Donald Trump a lui affirmé que "le temps du changement" était venu en Iran.
Au cinquième jour du mouvement de protestation contre le gouvernement et les difficultés économiques, un policier iranien a été tué et trois autres ont été blessés par des tirs d'arme de chasse à Najafabad (centre), selon un site internet de la télévision d'Etat.
Deux manifestants avaient été tués samedi et huit autres dimanche soir dans plusieurs villes d'Iran, selon les médias. Un père et son fils de quatorze ans, ont par ailleurs péri à Doroud (ouest) quand leur véhicule a été percuté par un camion de pompiers volé par des manifestants, d'après le préfet.
Lundi soir, des petits groupes de manifestants, dont certains scandaient des slogans antirégime, se sont rassemblés dans un quartier du centre de Téhéran sous forte présence policière, selon des vidéos publiées sur les sites de médias locaux et les réseaux sociaux. Le calme était revenu en fin de soirée et plusieurs "meneurs" ont été arrêtés, selon des médias iraniens.
La nuit précédente dans la capitale et plusieurs autres villes, des manifestants avaient attaqué et parfois incendié des bâtiments publics, des centres religieux, des banques, des voitures de police ou des sièges du Bassidj (milice islamique du régime).
Des centaines de personnes ont été arrêtées depuis le début des troubles, dont certaines ont ensuite été libérées. Quatre personnes ont ainsi été arrêtées pour avoir "insulté le drapeau sacré" de la République islamique en le brûlant.
Les autorités accusent "des fauteurs de troubles" ou des "contre-révolutionnaires" armés de s'infiltrer parmi les manifestants.
Les manifestations se poursuivent en dépit du blocage par les autorités sur les téléphones portables des messageries Telegram et Instagram, utilisées pour appeler à manifester. Elles sont les plus importantes depuis le mouvement de contestation en 2009 contre la réélection de l'ex-président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad. Trente-six personnes avaient été tuées dans la répression de ce mouvement, selon un bilan officiel (72 tués selon l'opposition).
Pointant du doigt une "petite minorité" d'agitateurs, Hassan Rohani a insisté lundi sur la détermination du gouvernement à "régler les problèmes de la population", en particulier le chômage. "Notre économie a besoin d'une grande opération chirurgicale", a-t-il dit.
M. Rohani dit qu'il faut protester d'une façon correcte, mais qu'est ce que ça veut dire?", se demandait lundi Arya Rahmani, un infirmier de 27 ans interrogé par l'AFP à Téhéran. "Si je me contente de lui dire +M. Rohani, je suis éduqué mais je suis au chômage+, il s'en fichera complètement".
"Je ne suis pas du tout pour les manifestations dans lesquelles les biens publics sont vandalisés", a déclaré pour sa part Shiva Daneshvar, femme au foyer de 55 ans. "Nous devrons payer (les réparations) plus tard."
M. Rohani, élu pour un second mandant en mai 2017, a permis à l'Iran de sortir de son isolement avec la levée de sanctions internationales liées aux activités nucléaires du pays. Cette conséquence de la signature en 2015 d'un accord nucléaire historique avec les grandes puissances avait fait espérer aux Iraniens une amélioration de la mauvaise situation économique.
Face aux protestations antigouvernementales, des manifestations de soutien au pouvoir ont été organisées lundi dans plusieurs villes du pays, dont Rasht, Zanjan, Ahvaz et Takestan.
"Ce qui fait descendre les Iraniens dans la rue le plus souvent, ce sont des problèmes économiques ordinaires --la frustration face au manque d'emplois, l'incertitude par rapport à l'avenir de leurs enfants", explique à l'AFP Esfandyar Batmanghelidj, fondateur du Europe-Iran Business Forum.
Selon cet expert, les troubles ont été provoqués par les mesures d'austérité de M. Rohani, comme les réductions des budgets sociaux ou les augmentations des prix des carburants.
Dans une nouvelle réaction aux protestations en Iran, M. Trump a écrit sur Twitter "Le grand peuple iranien est réprimé depuis des années. Il a faim de nourriture et de liberté (...) Il est temps que ça change".
"Il s'agit d'une affaire intérieure iranienne", a estimé de son côté le ministère russe des Affaires étrangères cité par les agences de presse, ajoutant que "toute intervention extérieure déstabilisant la situation (en Iran) était inadmissible".