Le projet de résolution préparé par l’Algérie, vu par l’AFP, «exige un cessez-le-feu humanitaire immédiat qui doit être respecté par toutes les parties». Il s’oppose au «déplacement forcé de la population civile palestinienne», alors qu’Israël a évoqué une évacuation des civils avant une offensive terrestre à Rafah où s’entassent 1,4 million de personnes dans le sud de la bande de Gaza. Et il réclame la libération de tous les otages.
Le vote doit avoir lieu à 10H00 locales (15H00 GMT).
Comme de précédents textes fustigés par Israël et les États-Unis, il ne condamne en revanche pas l’attaque sans précédent du Hamas du 7 octobre contre Israël qui a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, l’armée israélienne a lancé une offensive qui a fait plus de 29.000 morts à Gaza, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.
Les États-Unis ont prévenu ce week-end que le texte algérien n’était pas acceptable, menaçant d’y mettre leur veto. «Nous ne pensons pas que ce produit du Conseil améliorerait la situation sur le terrain, et donc si cette résolution est mise aux voix, elle ne passera pas», a répété lundi l’ambassadeur américain adjoint à l’ONU Robert Wood.
Les Américains estiment que cette résolution mettrait en danger les négociations diplomatiques délicates sur le terrain pour obtenir une trêve incluant une nouvelle libération d’otages.
Dans ce contexte, ils ont fait circuler un projet alternatif de résolution, vu par l’AFP lundi. Alors qu’ils s’étaient jusqu’ici systématiquement opposés à l’utilisation du terme «cessez-le-feu», mettant leur veto à deux textes en octobre et en décembre, leur version soutient un cessez-le-feu mais pas immédiat.
«Obligation morale»
Faisant échos aux récentes déclarations de Joe Biden, le texte évoque ainsi un «cessez-le-feu temporaire à Gaza dès que ce sera réalisable» et sur la base d’une «formule» incluant la libération de tous les otages.
Le projet américain s’inquiète d’autre part pour Rafah, prévenant qu’«une offensive terrestre d’ampleur ne devrait pas avoir lieu dans les conditions actuelles». «Nous ne prévoyons pas de nous précipiter vers un vote sur notre texte», a indiqué lundi un haut responsable américain, disant ne pas avoir de «date butoir».
«En l’état, il ne peut pas passer», a commenté de son côté une source diplomatique, évoquant plusieurs «problèmes» liés notamment à la formulation autour d’un cessez-le-feu, et le risque d’un veto russe face à un texte produit par les États-Unis.
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Dans tous les cas, ce projet américain «va rendre Israël nerveux. Les États-Unis utilisent enfin le Conseil de sécurité comme plate-forme pour montrer les limites de leur patience face à la campagne israélienne», a commenté auprès de l’AFP Richard Gowan, analyste à l’International Crisis Group.
Le Conseil, largement divisé sur le dossier israélo-palestinien depuis des années, n’a pu adopter depuis le 7 octobre sur ce dossier que deux résolutions, essentiellement humanitaires; sans grand résultat, l’entrée de l’aide à Gaza restant largement insuffisante.
Malgré la perspective d’un veto américain, l’ambassadeur palestinien à l’ONU Riyad Mansour a insisté il y a quelques jours pour un vote, notant que le groupe arabe avait été «plus que généreux pour donner plus de temps».
Alors on s’achemine vers un veto américain «dont personne ne veut vraiment, mais que personne ne peut éviter», a commenté Richard Gowan, notant la coïncidence malheureuse à quelques jours du deuxième anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
«Je suis certain que la Russie va utiliser cette opportunité pour accuser les États-Unis d’une politique deux-poids-deux-mesures en matière de souffrance des civils, en Ukraine et au Moyen-Orient.»
«C’est triste», a d’ailleurs commencé lundi l’ambassadeur russe à l’ONU Vassili Nebenzia.
Le Conseil a une «obligation morale» d’agir «pour mettre fin à cette situation tragique», a renchéri son homologue chinois Jun Zhang, ironisant sur la position des États-Unis qui appellent pourtant «toujours à la protection des droits humains».