La visite du président américain prévue les 2 et 3 septembre a tout simplement "été annulée à ce stade", a expliqué à l’AFP hier, mardi 20 août, un porte-parole de la Maison Blanche, quelques instants après une série de tweets de son locataire.
"Le Danemark est un pays très spécial avec des gens incroyables mais étant donné les commentaires de la Première ministre Mette Frederiksen, selon lesquels elle n'aurait aucun intérêt à discuter de l'achat du Groenland, je vais repousser notre rencontre prévue dans deux semaines à un autre moment", a lancé Donald Trump.
A Copenhague, la maison royale, à l'origine de l'invitation de Donald Trump, a exprimé sa "surprise", dans un commentaire écrit transmis à la chaîne de télévision publique DR.
La Première ministre devait s'adresser à la presse ce mercredi à 13H00 GMT.
L'ensemble de la classe politique du pays scandinave s'est pour sa part dite stupéfaite.
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"La réalité transcende la fiction (...), cet homme est imprévisible", a twitté Morten Østergaard, chef de la gauche radicale et membre de la majorité parlementaire.
"Sans aucune raison Trump considère qu'une partie (autonome) de notre pays est à vendre. Ensuite il annule de manière insultante une visite que tout le monde était en train de préparer. Est-ce que des morceaux des Etats-Unis sont à vendre? L'Alaska?", s'est insurgé sur Twitter le conservateur Rasmus Jarlov.
Pour le politologue Marc Jacobsen, spécialiste du Groenland à l'université de Copenhague, Donald Trump se comporte en "maître colonial ignorant".
"L'idée de Donald Trump d'acheter le Groenland est absurde et l'annulation de sa visite d'Etat au Danemark est tout aussi absurde alors qu'il sait qu'il n'y a aucune chance que le Groenland devienne le 51e Etat de l'Amérique", a-t-il dit à l'AFP.
De son côté, le quotidien Jyllands-Posten estime que l'attitude du président américain profite à plein à Copenhague.
"L'amitié (entre les deux pays) est intacte. Et la position du Danemark dans le jeu géopolitique dans la région arctique s'en trouve renforcée", écrit le journal dans un édito.
Cette annonce intervient dans une séquence diplomatique importante pour le dirigeant américain qui doit bientôt s'envoler pour la France, où il assistera au sommet du G7 à Biarritz, du 24 au 26 août.
Aux côtés des autres leaders des grandes puissances mondiales, il pourrait encore jouer les trouble-fêtes, tant les sujets de discorde se multiplient entre les Etats-Unis et leurs alliés traditionnels.
En fin de semaine dernière, la presse américaine avait révélé que Donald Trump s'était renseigné sur la possibilité pour les Etats-Unis d'acheter le Groenland, immense territoire autonome de quelque 56.000 habitants, rattaché au Danemark.
Si cette idée avait d'abord fait sourire certains, ce dernier rebondissement montre, une nouvelle fois, la capacité du 45e président américain à casser les codes de la diplomatie traditionnelle.
Le week-end dernier, l'ancien homme d'affaires new-yorkais avait confirmé s'intéresser au Groenland en qualifiant devant la presse cette éventuelle transaction de "grosse transaction immobilière", qui serait "stratégiquement intéressante".
Donald Trump avait pourtant assuré dimanche dernier que cette visite n'était "pas du tout" liée à son ambition territoriale.
De leur côté, les autorités locales n'ont pas apprécié cette convoitise de l'ex-magnat de l'immobilier.
"Le Groenland est riche en ressources précieuses (...). Nous sommes prêts à faire des affaires, pas à vendre" le territoire, avait réagi vendredi dernier le ministère groenlandais des Affaires étrangères.
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Le Groenland est une gigantesque île arctique, grande comme quatre fois la France. Ses ressources naturelles (pétrole, gaz, or, diamant, uranium, zinc, plomb) et le réchauffement climatique qui ouvre de nouvelles voies maritimes entre Pacifique et Atlantique et entre Europe et Asie attisent les convoitises, notamment des Etats-Unis, de la Chine et de la Russie.
Ce n'est pas la première fois que les États-Unis tentent de mettre la main dessus. En 1867 déjà, le département d'État avait manifesté son intérêt. Puis en 1946, le président Harry S. Truman avait offert en échange de l'île 100 millions de dollars de l'époque - en or - et des territoires en Alaska. En vain.
Les Américains avaient pu en revanche développer leur base aérienne de Thulé, dans l'extrême nord-ouest de l'île.