Cette tournée, qui doit le conduire aussi au Qatar et en Arabie saoudite selon le département d'Etat, intervient en l'absence de progrès apparents dans la médiation que le Koweït mène entre le Qatar et ses adversaires arabes, qui campent sur leurs positions respectives. Tillerson, qui venait de Turquie où il a évoqué la crise du Golfe, doit être reçu en soirée par l'émir du Koweït, cheikh Sabah al-Ahmad Al-Sabah, avant d'avoir un entretien avec son homologue koweïtien, cheikh Sabah Khaled al-Hamad Al-Sabah.
Avant Tillerson, les ministres des Affaires étrangères de Grande-Bretagne, d'Allemagne et d'Oman ainsi qu'un haut responsable de l'ONU sont venus dans la région offrir, sans résultat jusqu'ici, leurs bons offices dans cette crise sans précédent. Le 5 juin, l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l'Egypte ont rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar, accusant le riche émirat gazier de soutenir le "terrorisme" et de se rapprocher de l'Iran chiite, rival régional du royaume saoudien et conspué par Donald Trump.
Le 22 juin, ces pays ont soumis au Qatar une liste de 13 demandes, exigeant notamment de fermer la chaîne de télévision Al-Jazeera et de réduire ses relations avec Téhéran pour lever leurs sanctions économiques, dont la fermeture de la seule frontière terrestre de l'émirat. Doha a rejeté les accusations de ses adversaires et refusé de se plier à leurs demandes qui, selon lui, sont "irréalistes" et empiètent sur sa souveraineté.
Réunis mercredi au Caire, les quatre pays ont menacé d'imposer des nouvelles sanctions au Qatar, sans préciser lesquelles. "Nous sommes dans une impasse", a déclaré RC Hammond, porte-parole de Tillerson. Après la réunion du Caire, "nous sommes à quelques mois de ce que nous pensions être une solution réelle. C'est très décourageant", a-t-il ajouté aux journalistes.
Les Etats-Unis, qui disposent au Qatar d'une base militaire stratégique dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI) et dont la Ve Flotte est basée à Bahreïn, ont d'importants intérêts économiques et politiques dans la région du Golfe, qui assure le cinquième des approvisionnements du monde en pétrole. Or l'administration du président Donald Trump a émis jusqu'ici des signaux contradictoires face à la crise du Golfe.
Si le président américain a semblé apporter son soutien tacite à l'isolement du Qatar, qu'il a accusé publiquement d'avoir "financé le terrorisme à un très haut niveau", son chef de la diplomatie a dès le départ adopté une stratégie de neutralité. L'analyste koweïtien Abdallah al-Shayeji estime que la tournée de Tillerson témoigne d'un sérieux engagement des Etats-Unis à régler la crise. "C'est une ultime tentative pour sauver la situation et essayer de résoudre la crise qui a des incidences sur la stabilité régionale, la lutte antiterroriste et la campagne contre l'EI", ajoute-t-il à l'AFP.
Il admet toutefois qu'un succès ne sera possible que si les deux parties font des concessions substantielles. Pour Neil Partrick, un spécialiste des affaires du Golfe, la mission de Tillerson n'aura d'impact que si les dirigeants de la région "croient que le secrétaire d'Etat est pleinement soutenu par le président Trump".
Le ministre britannique des Affaires étrangères Boris Johnson a, au terme d'une tournée régionale, appelé samedi à la levée du boycott imposé au Qatar et à un contrôle sur le financement du terrorisme dans tous les Etats du Golfe. Le Conseiller de la sécurité nationale britannique, Mark Sedwill, assistera à des entretiens de M. Tillerson avec son homologue koweïtien.
Malgré les multiples offres de bons offices, les protagonistes ont campé jusqu'ici sur leurs positions. "Aucun effort ou médiation diplomatique ne peut réussir tant que Doha n'aura pas fait preuve de rationalité, de maturité et de réalisme", a prévenu le ministre d'Etat émirati aux Affaires étrangères, Anwar Gargash, dans un tweet.