Alexandre Bissonnette était étudiant en science politique à l'université Laval toute proche de la mosquée Sainte-Foy où dimanche soir il a pénétré, armé, avant de tirer dans le dos des fidèles rassemblés pour la prière.
C'est aussi un quartier qu'il connaît bien, il y a vécu dans la coquette maison familiale jusqu'à l'automne avant d'emménager dans un petit appartement avec son frère jumeau à quelques centaines de mètres du centre culturel islamique de Québec.
Ses messages sur son compte Facebook, fermé depuis, sont principalement apolitiques et concernent la famille, les amis ou la gastronomie.
Les pages qu'il suit "révèlent une sympathie apparente pour les groupes et les idéologies nationalistes", selon l'analyse du Site intelligence group spécialisé dans le suivi des profils radicalisés et extrémistes.
"C'est un profil cruellement banal qui ressemble à bien d'autres et dont il est extrêmement difficile de percevoir l'évolution", explique à l'AFP David Morin, codirecteur de l'Observatoire sur la radicalisation et l'extrémisme violent (OSR).
Sans être passionné, il suit ses cours de politique à la faculté des sciences sociales, lit Baudelaire et travaille à l'organisme de collecte de sang Héma-Québec qui s'est dit consterné d'apprendre "qu'un de ses employés a été appréhendé dans les tragiques événements" à la mosquée.
Sans avoir d'appartenance avérée à un groupe nationaliste, Alexandre Bissonnette a "un discours de droite, un peu réactionnaire, un peu anti-immigrant, antiféministe", développe David Morin.
Il aime, d'après son profil Facebook, les positions de Donald Trump contre les immigrants mais aussi Marine Le Pen, présidente du Front national, parti d'extrême droite en France ou encore Génération nationale, groupe identitaire nationaliste québécois.
Difficile, selon cet expert, de détecter dans un parcours aussi lisse "le point de rupture" d'un individu qui peut souffrir d'une crise existentielle, identitaire ou d'un désir d'affirmation.
En fait, le jeune homme "n'est peut-être même pas radicalisé" aux idées nationalistes et à un moment précis "la lumière s'est éteinte" et un retour en arrière s'est amorcé, souligne-t-il.
C'est ce qui expliquerait le comportement de l'étudiant qui après avoir perpétré son geste meurtrier, s'enfuit et appelle une demi-heure après la police pour se rendre en s'accusant de la tuerie.
Le codirecteur de l'OSR fait le parallèle avec Dylann Roof, partisan de la suprématie blanche ouvertement raciste, qui avait abattu neuf paroissiens noirs dans une église dans le sud-est des Etats-Unis en 2015.
Ces profils sont totalement différents des fanatiques qui, après le passage à l'acte, vont se faire sauter ou se suicider, analyse-t-il.
Reste un signe dans le parcours banal du jeune homme. Avant la visite de Marine Le Pen en mars l'an dernier à Québec, il montrait peu d'intérêt pour la politique en dépit de son cursus universitaire, selon des amis cités par le quotidien Globe and Mail.
C'est chez les Cadets, centre d'accueil de l'armée canadienne pour les jeunes, qu'Alexandre Bissonnette s'est exercé à l'utilisation des armes.
Il avait d'ailleurs posté sur son Facebook il y a quelques mois une de ses photos en tenue de jeune cadet de l'armée royale canadienne.