Plus d'un demi-million de membres de cette minorité musulmane de l'ouest de la Birmanie ont déjà trouvé abri depuis fin août au Bangladesh voisin pour échapper à ce que l'ONU considère comme une épuration ethnique. À l'heure actuelle, estiment les autorités, 4.000 à 5.000 Rohingyas franchissent quotidiennement la frontière.
Ces nouvelles arrivées sont motivées, selon des récits de réfugiés recueillis par l'AFP, par de nouvelles manoeuvres militaires dans l'État birman du Rakhine (ouest). Des opérations qui font douter de la concrétisation du retour de réfugiés en Birmanie, dont discutent Naypyidaw et Dacca.
Rashida Begum, une Rohingya arrivée lundi soir de Birmanie, raconte que des responsables locaux leur assuraient depuis des semaines qu'ils étaient en sécurité en restant dans leurs villages.
Mais en fin de semaine dernière, dans la région de Maungdaw, "l'armée est venue et a fait du porte-à-porte, nous ordonnant de partir", déclare-t-elle à l'AFP.
"Ils disaient qu'ils ne nous feraient pas de mal, mais ils ont fini par nous pousser dehors et ont brûlé nos maisons", dit-elle.
Selon les médias officiels birmans, les Rohingyas partent "de leur propre chef" malgré des garanties sur leur sécurité.
"Je voulais rester dans mon village", explique Hasina Khatum, 25 ans, arrivée dans la ville côtière de Shah Porir Dwip sur la rive bangladaise.
Les responsables locaux "nous disaient N'allez pas au Bangladesh. Tout ira bien. Nous les avons crus, mais rien ne s'est amélioré. À la fin, nous avons dû partir".
Fazlul Haq, un conseiller local dans le sud du Bangladesh, raconte que le flux de bateaux de réfugiés avait presque cessé fin septembre, mais a repris de plus belle ces derniers jours, amenant des cohortes de familles rohingyas menacées par l'armée.
Depuis le Bangladesh, d'épais panaches de fumée étaient visibles côté birman. Amnesty International accuse les militaires birmans de pratiquer la "politique de la terre brûlée" en détruisant les villages rohingyas.
Au 30 septembre, 509.000 réfugiés rohingyas étaient passés au Bangladesh depuis fin août, selon des chiffres de l'ONU. Ils fuient une campagne de répression de l'armée birmane consécutive à des attaques de la rébellion rohingya le 25 août dernier.
Cette marée humaine est venue s'ajouter aux 300.000 réfugiés rohingyas au moins qui se trouvaient déjà dans les camps miséreux du sud du Bangladesh, legs de vagues de violences précédentes.
Les Rohingyas, qui constituent la plus grande population apatride au monde, sont traités comme des étrangers en Birmanie, un pays à plus de 90% bouddhiste.
Victimes de discriminations, ils ne peuvent pas voyager ou se marier sans autorisation. Et ils n'ont accès ni au marché du travail ni aux services publics comme les écoles et hôpitaux.