Ce vote risque en effet de compliquer encore des relations déjà tendues avec Ankara, notamment sur l'application d'un accord controversé entre l'Union européenne et la Turquie, porté par Berlin, qui a permis de réduire considérablement l'afflux de migrants en Europe.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan menace de ne pas appliquer ce pacte, faute d'obtenir à ses conditions une exemption de visas Schengen pour ses concitoyens.
Le texte, intitulé "Souvenir et commémoration du génocide des Arméniens et d'autres minorités chrétiennes il y a 101 ans", a été adopté à la quasi-unanimité des présents (une voix contre et une abstention) à la mi-journée, alors que des personnes présentes dans le public ont brandi des panneaux sur lesquels on pouvait lire "Danke" (merci).
Quelques minutes après le vote, la Turquie a qualifié l'adoption du texte d'"erreur historique" de l'Allemagne, considérant cette résolution comme "nulle et non avenue" tandis que l'Arménie saluait "un apport appréciable de l'Allemagne à la reconnaissance et à la condamnation internationale du génocide arménien".
En ouverture des débats au Bundestag, Norbert Lammert, le président du Bundestag, Chambre basse du Parlement allemand, avait souligné que cette Assemblée n'était ni "un tribunal" ni une "commission d'historiens" mais que les députés allemands prenaient "leurs responsabilités" en se prononçant sur une telle résolution.
Il a déploré les "nombreuses menaces, y compris de mort" ayant visé certains députés en amont de ce débat, notamment les élus ayant des origines turques. L'Allemagne compte près de trois millions d'habitants d'origine turque, l'une des plus grandes diasporas au monde. Ces menaces sont "inacceptables" et "nous ne nous laisserons pas intimider", a-t-il ajouté.
Test pour l'amitié germano-turque La majorité des orateurs a pris soin de souligner que cette résolution ne visait pas les autorités turques actuelles, mais le gouvernement Jeune Turc de l'époque, responsable des massacres de 1915.
A quelques heures du vote, le Premier ministre turc, Binali Yildirim, depuis Ankara, avait estimé que l'initiative de la Chambre basse du Parlement, le Bundestag, constituait "un véritable test de l'amitié" entre l'Allemagne et la Turquie.
Le président Recep Tayyip Erdogan avait lui téléphoné mardi à la chancelière Angela Merkel pour dénoncer un "piège" qui pourrait "détériorer toutes nos relations avec l'Allemagne".
Dans le texte, le Bundestag "nomme par son nom ce qu'a été la réalité des massacres commis (...) à savoir un génocide", a expliqué Franz Josef Jung, le vice-président du groupe parlementaire conservateur (CDU/CSU) à l'origine de cette résolution avec les sociaux-démocrates du SPD et le groupe d'opposition des Verts.
La résolution déplore en outre "le rôle déplorable du Reich allemand qui, en tant que principal allié militaire de l'empire ottoman (...) n'a rien entrepris pour stopper ce crime contre l'Humanité".
Angela Merkel n'était pas présente pour assister aux débats et voter sur ce texte. Mais lors d'un vote-test au sein du groupe parlementaire conservateur, elle avait soutenu la résolution.
L'un des responsables du groupe d'opposition de la gauche radicale, Die Linke, Gregor Gysi, a critiqué l'absence de la chancelière, comme celle du vice-chancelier et chef du SPD, Sigmar Gabriel : "Ce n'est pas particulièrement courageux".