Hasard du calendrier, le chef de l'Etat français sera toute la journée en Espagne au moment même où, en France, débutent les manifestations et grèves potentiellement massives contre sa réforme des retraites.
Discret ces derniers jours sur la grande réforme de son second mandat, il pourrait devoir commenter cette mobilisation sociale depuis Barcelone durant sa conférence de presse commune avec le chef du gouvernement espagnol, ou lors d'un discours prévu devant la communauté française.
Après un tête-à-tête au Musée national d'art de Catalogne, les deux dirigeants, accompagnés par de nombreux ministres, signeront en grande pompe un «traité d'amitié et de coopération».
Un texte qui prévoit, dans le détail, un renforcement de la relation bilatérale sur les questions migratoires, de défense, d'énergie ou de jeunesse.Traité «hautement symbolique» Ce traité est seulement le troisième de la sorte signé en Europe par la France après celui de l'Elysée, paraphé en 1963 avec l'Allemagne et complété depuis par celui d'Aix-la-Chapelle en 2019, et celui du Quirinal, signé avec l'Italie en 2021.
Paris veut graver dans le marbre le renforcement de ses relations avec d'autres voisins que l'Allemagne, notamment du sud de l'Europe, au moment où le moteur franco-allemand de l'UE est souvent apparu essoufflé.
«Hautement symbolique» pour la présidence française, «ce traité ne vient qu'encadrer ou structurer une relation qui est déjà dense dans tous les domaines», souligne-t-on à l'Elysée où «on note un certain nombre de convergences sur des sujets fondamentaux pour l'agenda européen des prochains mois».
Madrid le voit, pour sa part, comme l'élévation au plus haut niveau de relations déjà excellentes entre deux pays dont les dirigeants ont déjà affiché des positions communes sur bien des sujets ces dernières années.
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«Ligne commune» sur le plan Biden Mais Emmanuel Macron a surtout dans l'esprit de concrétiser à Barcelone une «ligne commune avec Madrid» sur la réponse européenne à l'Inflation Reduction Act, le plan d'investissement massif du président américain Joe Biden dans la transition énergétique.
Le président français, qui avait dénoncé fin novembre à Washington des subventions américaines «super agressives», veut une action tout aussi massive de l'UE et des décisions rapides pour éviter la fuite d'entreprises européennes attirées par les aides américaines.
Un ton ferme à l'égard des Etats-Unis que n'a pas adopté le Premier ministre espagnol.
Depuis Davos, Pedro Sanchez s'est contenté lundi, sur la chaîne américaine CNBC, de noter que l'UE devait «faire ses devoirs» et réformer sa propre politique en matière d'aides d'Etat afin d'envoyer aux entreprises «le message que l'Europe et bien sûr l'Espagne sont un bon endroit» pour investir.
Emmanuel Macron caresse aussi l'espoir de rallier, dans une certaine mesure, le chancelier allemand Olaf Scholz à sa position.
Ce dernier sera reçu dimanche à Paris pour, justement, célébrer les 60 ans du Traité de l'Elysée et participer à un conseil des ministres franco-allemand censé solder les différends entre les deux premières puissances européennes.
La signature du traité franco-espagnol intervient trois mois après la levée d'un des principaux désaccords entre les deux pays qui ont décidé, avec le Portugal, d'enterrer le projet de gazoduc «Midcat», auquel s'opposait Paris, pour le remplacer par un pipeline d'hydrogène «vert» reliant Barcelone à Marseille et baptisé «H2Med».
Barcelone a justement été choisie comme ville hôte du sommet pour souligner l'importance de ce projet stratégique.
Le choix de la ville méditerranéenne visait aussi à montrer que la situation s'est apaisée en Catalogne, théâtre d'une tentative de sécession en 2017. Mais les indépendantistes catalans ne le voient pas ainsi et manifesteront pour protester contre la tenue de ce sommet.
Rare point d'achoppement entre les deux pays, Madrid insistera jeudi sur l'importance de rouvrir au plus vite huit petits postes-frontières toujours fermés au nom de la lutte des autorités françaises contre le terrorisme et l'immigration illégale.