Voix rauque de ténor, cheveux argentés inamovibles, souvent vêtu d'un complet-cravate bleu sur une chemise blanche, Benjamin Netanyahu s'est imposé au coeur du système politique israélien comme s'il y avait toujours été.
Et pourtant, ce stratège, habitué du louvoiement, est, de tous les Premiers ministres d'Israël, le seul à être né après la création, en mai 1948, du seul pays majoritairement juif.
Né le 21 octobre 1949 à Tel-Aviv, Benjamin Netanyahu, a longtemps défendu l'idée d'un "Grand Israël", une idéologie héritée de son histoire personnelle.
Il a grandi dans un environnement pétri par la pensée de Zeev Jabotinsky, leader de la tendance sioniste dite "révisionniste" qui souhaitait non seulement un Etat juif en Palestine mais d'un "Grand Israël" intégrant la Jordanie. Or le père de Benjamin Netanyahu, Benzion, avait été l'assistant personnel de Jabotinsky.
Benjamin Netanyahu effectue son service militaire dans un commando prestigieux. Le Proche-Orient est alors dans l'après-guerre des Six Jours, qui a vu en 1967 Israël s'emparer des territoires palestiniens de Cisjordanie, Jérusalem-Est et la bande de Gaza ainsi que du Golan syrien et du Sinaï égyptien.
Côté arabe la défaite est amère. Hors du champ des armées classiques, de nouveaux acteurs s'imposent comme l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) qui regroupe des mouvements armés palestiniens.
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En 1972, le soldat Netanyahu est blessé dans le sauvetage d'un avion détourné par des Palestiniens. Quatre ans plus tard, c'est la catastrophe. Son frère, Yoni, commandant de l'unité chargée de libérer les otages d'un vol Tel-Aviv/Paris, détourné en Ouganda est tué pendant l'assaut israélien.
La mort de son frère aîné ébranle profondément Benjamin Netanyahu qui fera de la "lutte contre le terrorisme", qu'il associe souvent aux Palestiniens, un des fils conducteurs de sa carrière politique.
Orateur né, pugnace aussi, il devient diplomate à Washington, puis ambassadeur à l'ONU dans les années 1980, avant de rentrer en Israël et se fait élire sous la bannière du Likoud, grand parti de droite dont il est l'étoile montante avec un style à l'américaine.
Pendant la guerre du Golfe de 1991, et la pluie de missiles Scud irakiens qui s'abat sur Israël, Benjamin Netanyahu défend le point de vue israélien sur CNN. Il est à l'aise devant la caméra, connaît les codes des médias, maitrise l'anglais pour avoir déjà étudié au prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT).
L'étoile continue son ascension jusqu'à une première consécration en 1996. A 47 ans, il triomphe du doyen Shimon Peres. Mais son règne est de courte durée. Trois ans. Après une brève retraite, il retourne à sa passion, reprend la tête du Likoud et redevient Premier ministre en 2009.
Depuis, Israël n'a connu que "Bibi". Lui se présente comme le grand défenseur de l'Etat hébreu face à l'Iran, nouvel "Amalek", ennemi mortel des Hébreux dans la Bible, mais ses adversaires voient plutôt un autocrate ne reculant devant aucune manoeuvre pour former des coalitions et homme usé par le pouvoir.
Idéologue ou pragmatique? "Bien que Benjamin Netanyahu sympathise avec la politique de son père (...), ses actions comme Premier ministre sont avant tout motivées par des considérations pragmatiques", conclut l'universitaire Neill Lochery dans une biographie récente.
Marié et père de trois enfants, il est désormais dans le collimateur de la justice pour corruption, fraude et abus de confiance dans des affaires de dons reçus de la part de milliardaires, d'échanges de bons procédés avec des patrons d'entreprises, et de tentatives de collusion avec la presse.
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Le principal intéressé, qui doit être auditionné le mois prochain par la justice, dénonce une "chasse aux sorcières". Et multiplie les déclarations fortes afin de mobiliser son électorat, comme en promettant cette semaine l'annexion d'un pan stratégique de la Cisjordanie occupée s'il est reporté au pouvoir.
Pour Gideon Rahat, professeur de sciences politiques à l'Université Hébraïque de Jérusalem, Benjamin Netanyahu oscille entre "faucon extrémiste" et "modéré".
"Depuis les accusations de corruption, il est plus à droite, plus enclin au populisme et à des lois antidémocratiques (...) Il se bat pour sa survie, pour éviter les tribunaux, c'est une guerre personnelle", dit-il.
Après l'ascension et le pouvoir, ses adversaires attendent désormais la chute du "roi Bibi". Mais savent qu'il ne faut jamais le donner pour vaincu.