À l’issue des élections présidentielles tenues dimanche 17 mars, Vladimir Poutine, au pouvoir en Russie depuis près d’un quart de siècle, a récolté plus de 87% des suffrages après dépouillement de 99% des bureaux de vote, selon l’agence officielle russe Ria Novosti, citant la commission électorale. Il s’agit là de son meilleur résultat, qui l’installe pour six années supplémentaires au Kremlin.
S’adressant aux Russes en fin de soirée, le Président russe a remercié ceux qui sont allés voter, avant de promettre que la Russie tiendra tête à tous ses adversaires.«Peu importe qui veut nous intimider ou à quel point, peu importe qui veut nous écraser ou à quel point, notre volonté ou notre conscience. Personne n’a jamais réussi à faire quelque chose de semblable dans l’histoire. Cela n’a pas fonctionné aujourd’hui et ne fonctionnera pas à l’avenir», a-t-il lancé.
Ce scrutin de trois jours, de vendredi à dimanche, a été marqué par des bombardements ukrainiens meurtriers et des incursions de combattants armés se disant être des Russes pro-Ukraine dans des régions russes frontalières, ainsi que par des actions de protestation dans les bureaux de vote.
L’ombre de Navalny
Vladimir Poutine, qui pourra se représenter après ce nouveau mandat pour se maintenir potentiellement au pouvoir jusqu’en 2036, a salué dans son discours les soldats combattant en Ukraine, qui «risquent leur vie» pour «protéger les territoires historiques de la Russie». Il a estimé que les forces russes, à l’offensive depuis la prise d’Avdiïvka mi-février, avaient «entièrement l’initiative» sur le front.
Sur le volet intérieur, Vladimir Poutine a assuré que le décès d’Alexeï Navalny, son principal détracteur, était un «événement triste» et qu’il avait été favorable à l’idée de l’échanger avec les Occidentaux. «Il n’y avait qu’une condition: que nous l’échangions pour qu’il ne revienne pas», a-t-il lancé.
Pour cette présidentielle, la veuve de l’opposant russe, Ioulia Navalnaïa, avait appelé ses partisans à se montrer en nombre en allant tous voter au même moment, à midi dimanche. Elle-même a voté après plusieurs heures d’attente dans une foule immense à l’ambassade de Russie à Berlin. «J’ai écrit (sur le bulletin de vote) le nom “Navalny” parce qu’il n’est pas possible (...) qu’un mois avant les élections, le principal opposant à Poutine, déjà emprisonné, soit tué», a-t-elle déclaré à la presse après avoir voté.
Frappes et incursions
Par endroits à Moscou, comme à Saint-Pétersbourg, des queues importantes se sont formées à l’heure dite. Mais devant d’autres bureaux de vote, l’affluence ne semblait pas particulièrement élevée. Dans le quartier moscovite de Marino, devant le bureau où Alexeï Navalny votait naguère, quelques dizaines de personnes ont répondu à l’appel.
«J’ai pu rencontrer quelques personnes, leur parler, et j’ai senti qu’ils pensaient la même chose que moi. Je ne suis pas seule», explique Olga, 52 ans, avant de partir avec son fils pour se recueillir sur la tombe de l’opposant, inhumé dans le quartier. Dans le cimetière, des dizaines de personnes ont défilé, déposant des fleurs fraîches sur la sépulture ainsi que des bulletins sur lesquels avait été ajouté le nom de Navalny.
Dans l’ensemble, la mobilisation de l’opposition s’est déroulée dans le calme mais l’ONG OVD-Info, spécialisée dans le suivi de la répression, a fait état d’au moins 85 interpellations pour diverses formes d’actions de protestation. Vladimir Poutine a de son côté assuré que les actions de l’opposition n’avaient eu «aucun effet» sur le scrutin, tout en menaçant de poursuites pénales ceux qui ont gâché leur bulletin de vote.
Les hostilités en Ukraine se sont aussi invitées dans le scrutin. La semaine électorale a été marquée par des frappes aériennes meurtrières et des tentatives d’incursion terrestre à partir de l’Ukraine sur le territoire russe, répliques aux bombardements et assauts quotidiens de la Russie contre sa voisine depuis plus de deux ans.