Amnesty considère que l'armée birmane mène une politique de la terre brûlée en dévastant des villages entiers de musulmans Rohingyas. C'est ce que l'ONG déclare dans un rapport publié ce vendredi.
"Plus de 80 sites (ont été) incendiés depuis le 25 août dans le cadre d'une campagne planifiée", affirme l'ONG. "Des témoignages attestent du caractère planifié, délibéré et systématique des attaques". Selon l'ONU, près de 389.000 Rohingyas se sont réfugiés au Bangladesh.
Amnesty se base sur des images satellites montrant dans l'Etat Rakhine (ouest) les villages avant et après, mais aussi sur des témoignages recueillis des deux côtés de la frontière, alors qu'il est quasiment impossible pour la presse d'accéder à la zone de conflit.
"Les preuves sont irréfutables. Les forces de sécurité du Myanmar mettent le nord de l'État d'Arakan (autre nom de l'Etat Rakhine, ndlr) à feu et à sang dans le cadre d'une campagne ciblée visant à faire partir les Rohingyas du Myanmar. Ne vous méprenez pas: il s'agit bien de nettoyage ethnique", estime Tirana Hassan, directrice du programme Réaction aux crises à Amnesty International.
"Nous sommes face à une politique claire et systématique qui se traduit par des violations des droits humains. Les forces de sécurité encerclent un village, tirent sur les habitants qui fuient dans la panique, puis mettent le feu aux maisons. Sur le plan juridique, ce sont des crimes contre l'humanité, des attaques systématiques et l'expulsion forcée de civils", dénonce Mme Hassan.
"Les tentatives du gouvernement de rejeter la responsabilité sur les Rohingyas sont des mensonges éhontés. Notre enquête fait clairement ressortir que ses propres forces de sécurité, appuyées par des milices, ont mis le feu aux maisons des Rohingyas", dénonce-t-elle, alors que la Birmanie accuse les rebelles d'être les auteurs des incendies.
Elle appelle la communauté internationale à "intensifier les pressions sur Aung San Suu Kyi et les hauts dirigeants de l'armée".
Les tensions entre musulmans et bouddhistes sont vives depuis des années dans cette région de la Birmanie, majoritairement musulmane alors que le reste du pays est à plus de 90% bouddhiste.
Les autorités birmanes et un puissant mouvement de moines radicaux voient les Rohingyas comme une menace à l'identité bouddhiste du pays.
Les rebelles de l'Armée du salut des Rohingyas de l'Arakan (ARSA), auteurs des attaques contre plusieurs dizaines de poste-frontières birmans depuis le 25 août, disent vouloir défendre les droits de cette minorité, qui est la plus importante population apatride au monde.