Si vous ramassez ne serait-ce qu'un seul déchet par jour, vous aurez droit au titre de "Chasseur d'ordures". Telle est l'idée que ce couple de trentenaires propage avec succès sur internet.
Dans la même veine, l'Anglais Eddie Platt s'est déjà taillé un beau succès depuis plus d'un an sur les réseaux sociaux avec son opération "Un déchet par jour" ("One piece of rubbish") lancée depuis Marseille, sa ville d'adoption dans le sud de la France. Son idée de poster un selfie à chaque fois qu'on ramasse un déchet pour le mettre à la poubelle a fait des émules jusqu'à New York ou Buenos Aires.
"Nous sommes en quelque sorte des pros de la motivation", explique à l'AFP Rastislav Krul en cueillant une énième bouteille de plastique lors de sa promenade un samedi.
Avec sa femme Veronika, évaluatrice de projets de recherche et de développement, il se souvient du début de leur croisade pacifique contre les détritus.
Le déclic lui est venu il y a deux ans: il vivait alors dans un appartement de Bratislava lorsqu'il a entendu, en bas de chez lui, des voisins critiquer la présence d'ordures autour du bâtiment.
"Je me suis rendu compte que si les gens se plaignaient moins et se mettaient, chacun, à ramasser ne serait-ce qu'un seul déchet et le jeter à la poubelle, notre ville serait moins sale", raconte-t-il à l'AFP.
Il s'est donc lancé et a pris l'habitude de ramasser des ordures. Sa compagne, entre-temps devenue son épouse, s'est vite laissée convaincre et a suivi son exemple.
"Il m'a montré que ramasser un peu ne demande pas d'effort particulier. C'est maintenant naturel chez moi", dit Veronika Krul, montrant du doigt les déchets les plus courants cachés dans l'herbe. "Bouteilles de plastique, canettes de bière, emballages de cigarettes ou de bonbons, etc, tout cela nous encercle", détaille-t-elle.
Pour Rastislav, "donner l'exemple est une affaire de longue haleine". "Quand les gens nous voient ramasser des ordures, ils ne viennent jamais nous aider. Mais je crois qu'au moins cela les incite à réfléchir et que peut-être, la prochaine fois,ils ne jetteront plus leur canette de bière ou le papier de leur gomme à mâcher", assure-t-il, se disant optimiste.
"J'espère qu'un jour nous serons majoritaires, que les jeteurs d'ordures seront une minorité absolue de gens bizarres", dit-il.
Statistiquement, la Slovaquie n'est pas un pays riche en ordures. Au contraire, elle figure parmi les derniers dans l'Union européenne, avec 321 kilos de déchets ménagers par habitant en 2014, selon Eurostat. Soit environ 1,7 million de tonnes pour ce pays de 5,4 millions d'habitants.
Quelle est la part qui se retrouve dans les rues? Difficile de l'estimer, mais Rastislav et Veronika ont de quoi faire.
Déterminés, ils ont même pris l'habitude d'emporter avec eux des gants et des sacs lorsqu'ils font une balade à pied ou à vélo et ramassent tout ce qu'ils trouvent.
En 2015, ils ont créé une page Facebook qui a gagné depuis des milliers de suiveurs, où ces derniers postent leurs photos en train de nettoyer les rues ou les campagnes.
"J'ai déjà contaminé mon chef, se vante Rastislav. Quand il se promène avec ses enfants, il leur arrive de ramasser des déchets".
Il pense que les "Chasseurs d'ordures" attirent ceux qui n'aiment pas être embrigadés dans des actions organisées. "Ils n'ont pas à le planifier. On peut faire cela en rentrant à la maison, en allant au cinéma ou en attendant le bus".
"Les lois et les amendes ne sont pas une solution. C'est la mentalité des gens qui doit changer", estime-t-il.
Les "Chasseurs d'ordures" ont lancé tout récemment un site web. Ils y proposent aussi des tuyaux pour combattre la déferlante de déchets.
"Mon premier pas fut de ne plus acheter d'eau en bouteille pour le bureau. J'ai apporté une bouteille en verre, que je réutilise", raconte Rastislav.
Mais l'objectif premier reste les détritus: "Essayez! Vous allez voir combien vous vous sentez bien quand vous faites quelque chose pour votre village, votre ville, l'environnement. Si vous le faites, vous ne jetterez plus jamais d'ordures".