Après deux mois et demi de guerre contre l’armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo annonçaient, dans un communiqué diffusé dans la soirée du dimanche 25 juin, une «victoire dans la bataille pour le QG de la police».
La mission de l’ONU au Soudan a jugé les violences «très préoccupantes» et fait état de «la fuite de centaines de civils vers l’Ethiopie». Ce même groupe avait déjà ouvert jeudi un nouveau front au Kordofan-Sud, frontalier du Soudan du Sud, obligeant l’armée à répondre sur différents fronts, tous dans le sud.
«Nous contrôlons totalement ce QG (...) et nous avons saisi un grand nombre de véhicules, d’armes et de munitions», affirment les FSR, énumérant la prise de dizaines de pick-up, de blindés et de chars. «Ce n’est pas une victoire militaire (...) mais une attaque flagrante contre les institutions de l’Etat qui protègent les civils», a répondu l’armée.
Contrôle et menace
Or, décrypte pour l’AFP un ancien officier de l’armée sous couvert d’anonymat, la prise du QG de la police -en bordure sud de la capitale- change radicalement la donne. La prise du QG de la police, si elle n’est pas renversée, «aura un impact important sur la bataille de Khartoum», assure l’officier car elle «garantit le contrôle de l’entrée sud de la capitale» aux FSR.
Lundi, «des civils ont été blessés quand leur bus a été touché par une attaque de drone des FSR visant un point de contrôle de l’armée», ont rapporté à l’AFP des habitants du quartier du QG de la police. La présence des paramilitaires dans cette zone constitue en outre «une menace sérieuse sur le QG du corps blindé mécanisé», l’un des grands atouts de l’armée dans le sud de Khartoum, poursuit l’ancien officier.
Dimanche, «14 civils, dont deux enfants ont été tués» aux abords du QG de la police, selon un réseau de militants qui tentent d’organiser les secours et les évacuations vers les rares hôpitaux encore en fonctionnement dans la zone. En outre, «217 blessés sont arrivés, dont 72 dans un état critique et 147 ont été opérés», touchés par «des balles perdues, les raids aériens ou les tirs de roquettes» au cœur de quartiers résidentiels, poursuit ce comité de militants.
Les vidéos diffusées par les FSR montrent leurs hommes s’emparant d’importants stocks d’armes et de munitions -l’assurance de pouvoir poursuivre encore longtemps la guerre d’usure lancée le 15 avril. Selon une source au sein de l’armée, les FRS ont perdu «plus de 400 hommes» dans la prise de ce QG.
L’ONG Acled recense plus de 2.800 morts dans la guerre au Soudan, un bilan largement sous-estimé car aucun des belligérants n’a rendu publiques ses pertes et de nombreux corps jonchent encore les rues de Khartoum ou du Darfour (ouest), où les affrontements sont les plus violents.
«Roquettes sur les maisons»
Depuis le début de la guerre, deux tiers des établissements de santé sont hors service. Ceux restés ouverts doivent composer avec des réserves de médicaments quasiment à sec, de longues coupures d’eau et d’électricité et des soignants ayant fui ou ayant été emportés par la guerre.
Les combats se poursuivent également à Nyala, chef-lieu du Darfour-Sud, où au moins 12 civils ont été tués dimanche, selon un médecin. Dans la nuit, des habitants y ont fait état de tirs intenses de l’artillerie. «Des roquettes tombent sur des maisons de civils», a rapporté l’un d’eux à l’AFP.
Chaque jour, de nouveaux déplacés fuient les combats, mais aussi les violences sexuelles et les pillages devenus légion. En tout, plus de 2,5 millions de personnes ont quitté leur maison. Plus d’un demi-million ont traversé des frontières, principalement vers l’Egypte, au Nord, et le Tchad à l’ouest, selon l’ONU.